lundi 4 février 2013

Embryologie et anatomie du rachis cervical et application aux techniques de manipulations vertébrales cervicales
Ce rappel anatomique et embryologique est intéressant à connaître en traumatologie sportive en particulier pour les médecins qui encadrent les équipes de rugby.
En effet dans ce sport, le rachis cervical est particulièrement exposé, surtout au niveau des 1ères lignes. Intérêt également en médecine manuelle, les manipulations vertébrales constituant une arme thérapeutique sans pareille dans le traitement des cervicalgies communes mais également une contre indication absolue en cas de malformations en particulier de la jonction cranio- rachidienne. 
Les médecins du rugby et ceux de médecine manuelle doivent absolument faire la traque aux malformations cervicales qui  contre indiquent la pratique du rugby et les manipulations vertébrales cervicales dans le traitement des cervicalgies ou des céphalées d'origine cervicale et pour cette traque à la malformation, la connaissance de l'embryologie du rachis cervical est la bienvenue en vertu de cet aphorisme: "on trouve ce que l'on cherche, on cherche ce que l'on connaît et l'on connaît ce que l'on a bien appris parce que bien enseigné".
I/ RAPPEL  EMBRYOLOGIQUE cours des Pr PIGANIOL  et du Dr de WINTER

Pr Guy Piganiol

7 vertèbres , chiffre remarquablement constant chez tous les mammifères composent le rachis cervical; elles s'inscrivent dans la lordose cervicale conditionnée par l'épaisseur vers l'avant des disques intervertébraux cervicaux qui sont également hauts(1/3).
A cause de l'indépendance de la tête qui a sa mobilité propre , très vite est apparu dans la phylogenèse une différenciation des 2 premières vertèbres cervicales et de leur articulation avec le crane dont la surface articulaire de sa partie postérieure est déjà un condyle, des 5 autres et ce des le début de la vie terrestre avec les premiers reptiles.

La phylogenèse, évolution de l'espèce et l' évolution embryologique ou ontogenèse sont intéressantes à considérer car alors que l'anatomie descriptive montre des vertèbres cervicales très différentes des autres étages vertébraux , phylogenèse et ontogenèse orientent vers une analyse globale du rachis avec une vertèbre type dite fondamentale et des variations régionales imposées par la fonction qui module l'organe.

Elles fournissent également l'explication aux variations et autres anomalies observées en clinique humaine ; l'ontogenèse suit le même cheminement que la phylogénie avec ces 3 stades (mésenchymateux puis cartilagineux puis osseux ) par la mise en place d'une notochorde mésenchymateuse dès la 3ème semaine a partir du 3ème feuillet tissulaire primordial le chordomésoderme.

La chorde dorsale ou notochorde se complète par 2 colonnes mésodermiques paramédianes, ébauche de la future colonne vertébrale et de ses muscles avec dès la 4ème semaine 2 centres cartilagineux de part et d'autre de la notochorde suivis de l'arc neural
 (la chorde disparaît sauf au niveau discal avec la présence de quelques cellules physaliformes; des reliquats chordaux existent aussi sur l'occipital et le sacrum à l'origine de chordomes) .


Les 2 colonnes mésodermiques vont subir 2 segmentations successives : 
1-La première segmentation Elle aboutit à 42 paires de somites dont:
- 4 occipitales dont les sclérotomes vont fusionner pour former l'os occipital, le canal condylien étant l'équivalent d'un trou de conjugaison et le nerf hypoglosse peut être considéré comme la réunion de 3 nerfs; la vertèbre occipitale s'intégrant dans l'os occipital avec en particulier les condyles, mais aussi s'intégrant dans l'arc antérieur de l'atlas et l'extrême pointe de la dent avec possibilité de vestiges sous la forme d'un condyle médian ou d' une articulation entre occipital par l'intermédiaire d' un tubercule ou troisième condyle occipital qu'on retrouve chez les tortues, les crocodiles et certains oiseaux et la pointe de la dent, considérée comme un vestige de disque normalement remplacé par le ligament suspenseur, ou d'un arc antérieur entre occiput et atlas ou par une ossification du ligament occipito-odontoidien.
L'atlas se developpe à partir de 2 centres primitifs latéraux , futures masses latérales fusionnant vers l'arrière pour constituer l'arc postérieur et 2 points d'ossification antérieurs secondaires qui apparaissent au 5ème mois de vie extra utérine pour fusionner et constituer l'arc antérieur avec sa fissure antérieure ou postérieure et formation d'un rachis-chisis.
 ll existe des occipitalisations de l'atlas et des manifestations de la vertèbre occipitale .
L'axis se développe à partir de 4 centres :
-1 centre inférieur médian qui va donner C2 
- 3 centres odontoïdes à considérer comme le corps de C1: 1 supérieur ou os terminal qui apparaît à 2 ans et se soude aux 2 autres vers 12 ans et 2 centres odontoïdiens inférieurs qui se soudent entre eux puis la dent se fixera en bas au corps de C2 vers I'age de 4 ans .
Les zones cartilagineuses peuvent persister chez l'adulte et ne doivent pas être confondues avec des traits de fracture et il existe des dents de l'axis malformées, mobiles . 
L'anomalie la plus importante est l'impression basilaire qui fait passer la pointe de l'odontoïde au dessus du trou occipital et s'accompagne fréquemment de luxation intra occipitale de la dent avec manifestations neurologiques .
ll existe de fréquentes transformations de la gouttière de l'artère vertébrale des 2 cotés ou d'un seul côté et plutôt à droite, en un canal vertébral qui fixe l'artère vertébrale et la rend vulnérable dans une manipulation vertébrale.
- 7 cervicales 
- 12 thoraciques avec des points costaux détachés des ébauches vertébrales et évoluant indépendamment
- 5 lombaires dont les ébauches costales vont constituer les apophyses costiformes,
5 sacrées qui fusionneront pour former le sacrum (l'absence de soudure entre S1 et S2 déterminera la lombalisation de S1 , tandis que l'extension de la soudure entre L5 et S1 constituera la sacralisation de L5 )
-  8 coccygiènnes dont 5 vont régresser.
Chaque somite correspond à un métamère avec en para-médian un sclérotome qui va se développer:
- vers l'avant et fusionner avec son alter ego en séparant la notochorde des autres éléments de l'endoderme : intestin primitif et éléments vasculaires ( l'absence de fusion ou rachischisis antérieur s'associe avec des anomalies intestinales et vasculaires).
- vers l'arrière ou le sclérotome va envelopper la notochorde en la séparant du tube 
neural , futur cordon nerveux ou moelle épinière ; tube neural qui sera à son tour isolé et protégé vers l'arrière par 2 hémi-arcs qui vont fusionner en arrière ( absence de fusion égale myéloméningocèle par spina bifida).
- en postéro latéral un dermatomyotome, future musculature qui conservera la disposition segmentaire primitive .
2- La 2ème segmentation
Elle ne touche que le sclérotome et consistera en une fissuration transversale du sclérotome qui va former le disque (si défaut = bloc vertébral ) tandis que les 2 hémisclérotomes cranial et caudal vont constituer le corps vertèbral ( avec en cas de soudure absente ou partielle: hémivertèbre unique ou multiple).
 Chaque vertèbre se trouve donc à cheval sur 2 métamères , les muscles antérieurs vertébraux s'insérant sur les disques et par des arcades sur les 2 corps vertébraux adjacents.
L'innervation des muscles rachidiens 
Elle s' explique par l'embryologie :
- la musculature dorsale para vertébrale est innervée par les branches postérieures des nerfs rachidiens et ceci chez pratiquement tous les vertébrés
- les muscles antérieurs et des ceintures lesquels recouvrent les muscles des gouttières, le sont par les branches antérieures avec des exceptions : Trapèze et SCM (sterno cléido mastoidien) secondairement annexés au membre supérieur sont innervés par la branche externe du spinal (XI).
- les muscles en position intermédiaire comme les serratus posterior inferior et superior (petit dentelé supérieur et inférieur) sont innervés par les branches antérieures et postérieures parce qu'issus du développement somitique mixte .
II/ Anatomie descriptive et fonctionnelle il est intéressant de scinder le rachis cervical en 3 étages comme le propose ERIC DE WINTER et son GETM repris par l'école de médecine manuelle  Bourguignone, ce qui sur le plan clinique et des techniques manuelles s'avère judicieux .
1-La jonction cranio rachidienne



Cette zone correspond à 'extrémité céphalique du rachis a qui incombe le support mais aussi l'orientation ample de la tête dans l'espace avec conservation pour les besoins de l'équilibre de l'horizontalité du regard et de l'homéostasie des canaux semi-circulaires, et bien entendu la protection des éléments nerveux et de l'artère vertébrale.
Ce programme est réalisé à partir de :
- 3 éléments osseux : ce qu'il est convenu d'appeler la vertèbre occipitale ou C0 , l'atlas ou C1 et l'axis ou C2.
- 6 articulations : 2 C0-C1 : entre condyles occipitaux biconvexes et glènes atloidiennes concaves priviliégeant le mouvement sagittal et les inclinaisons latérales
4 C1-C2: trépied articulaire :
- médian antérieur avec C1- Dent ( portion de cylindre creux arc antérieur de l'atlas - cylindre plein de l'atlas encroûté de cartilage +++)
- médian postérieur Dent - Ligament transverse, située dans un plan plus bas que l'antérieure et donc autorisant des mouvements de rotation appuyée.



 - latéral C1-C2 ( facette articulaire C1 convexe - facette articulaire supérieure de C2 en épaulette convexe aussi , l'incongruence favorisant la mobilité corrigée par un épais cartilage), avec quelques caractéristiques :
1- l'absence de disque intervertébral et la rupture de la colonne des apophyses articulaires,  qui modifie considérablement les forces de transmissions.
2- l'absence de corps vertébral de C1 (en fait incorporé dans C2 :l'apophyse odontoïde. L'existence de ce pivot osseux permettant un défilement panoramique du regard
3- une musculature globalement complexe:faite de fibres longues , moyennes et courtes, un même muscle pouvant être à la fois tonique pour le maintien de la posture et phasique intervenant dans la mobilité comme la musculature courte sous occipitale de vigilance faite de 14 muscles dont 8 postérieurs, le centre de gravité de la tête situé en avant des condyles occipitaux ne reposant qu'en hyperextension sur le coussinet musculaire postérieur et nécessitant de puissants haubans. 
Rôle également dynamique de ces haubans courts avec:
- une extension de la tête en cas de contraction bilatérale 
- une rotation homolatérale en cas de contraction unilatérale.
La musculature moyenne et longue aussi bien adaptée , oriente la tête et contribue à la fonction oculocéphalogyre. 




- des ligaments intra canalaires : le cruciforme et les 2 alaires
Au total cette zone proximale, complète, ajuste et amortit grâce à la richesse en propriocepteurs de la musculature sous occipitale, tous les mouvements du rachis cervical.
2-La zone discocervicale de C2-C3 à C7.
Elle assure le transit des éléments vasculonerveux, complète le placement dans l'espace des organes sensoriels, solidarise le rachis cervical avec le squelette appendiculaire et le thorax, est capable de résister aux phénomènes de compression axiale grâce au haubans parallèles qui serrent tandis que les haubans obliques ont un effet de frettage.
 Elle possède des axes de mouvements interapophysaires qui s'inclinent différemment sur l'horizontale privilégiant l'inclinaison latérale en zone moyenne et la rotation presque pure en zone charnière.
 Enfin son inscription dans la lordose cervicale favorise les inversions des actions musculaires et l'exemple des SCM est très explicite :
   - leur contraction simultanée étend la tête et fléchit le cou sur le thorax si le rachis est rendu rigide par la contraction des muscles prévertébraux et fléchit la tête et le cou si le rachis est souple.
   - en position normale, il n'y a aucune contraction.
   - tandis qu'ils se contractent fortement pour maintenir la tête droite lors du passage couché - assis.
   - à partir d'une position de légère extension ils deviennent extenseurs cervicaux.
  - leur contraction unilatérale induit une inflexion homolatérale et un rotation controlatérale.
Les scalènes sont rotateurs et inclinateurs homolatéraux.
 Le trapèze est extenseur homolatéral et rotateur controlatéral.
Quelques caractéristiques :



- Le corps vertébral cervical est quadrangulaire à grand axe transversal et relevé à sa partie supérieure par 2 saillies latérales les uncus transformant la vertèbre cervicale en un rail et la colonne cervicale en une pile d'assiette particulièrement stable mais siège d'une dégénérescence rapide dès 18 ans et limitant considérablement le mouvement disco-corporéal cervical protégeant ainsi l'artère vertébrale qui chemine dans le canal inter-transversaire.



- Les apophyses articulaires sont planes et inclinées à 45°et possèdent des formations méniscoides.
- Les épineuses sont peu développées et bifides de C2 à CG , C7 est proéminente
Les apophyses transverses sont trouées par le canal transversaire pour l'artère vertébrale à partir de C6 et la veine vertébrale en C7, formées à partir de la fusion des 2 points d'ossification vertébral et costal, la persistance de ce dernier signe la présence d'une côte cervicale souvent unilatérale et gauche.
La présence d'un disque rend ce système tripode hyperstable mais aussi sujet à dégénérescence parce que mobile au niveau des surplombs les plus hauts (surtout en C5-C6).
 Au total le rachis disco cervical est une zone plutôt exposée mais aussi plutôt mécaniquement bien adaptée aux contraintes physiologiques. 
Les traumatismes en hyperextension réduisant le rapport contenant/ contenu sont graves en C5-C6; la mobilité globale cervicale cache des inégalités d'amplitude segmentaires des différents étages cervicaux (rotation quasi pure en cervical bas et plutôt inflexion latérale au début) dont on doit tenir compte dans les thérapeutiques manuelles.
3- La charnière cervico-thoracique



Cette " troisième " zone du rachis cervical est une zone carrefour de la base du cou, du sommet du thorax et du hile du membre supérieur avec son appendice scapulaire; dans cette zone, il y a intrication avec la pathologie abarticulaire de l'épaule et celle de l'apex pulmonaire.
Du côté cervical : 
- C6 est très mobile et s'efface en extension.
-  C7 présente une épineuse proéminente non bifide qui ne s'efface pas en extension.
Possibilité de côte cervicale bilatérale ou unilatérale gauche par non fusion des ébauches costales et vertébrales de l'apophyse transverse et triade clinique : trouble vasculaire/névralgie cubitale/masse osseuse palpable dans le creux sus claviculaire.
Du côté thoracique : 
- T1 est peu mobile ; présence du dôme pleural et du ganglion étoilé; ligne brisée de la 1ère côte de 3 cm de rayon inscrite dans la concavité de la 2ème côte et ses trois segments aux angles très marqués :
-segment postérieur articulaire avec le rachis et ses attaches costo-vertébrales et costo-transversaires. 
- segment moyen vasculo-nerveux avec l'artère sous clavière et les racines nerveuses C8 et T1 qui forment une pince autour du col de la 1ère côte pour former le tronc primaire inférieur du plexus brachial.
- segment antérieur musculaire avec les scalènes et la veine sous clavière.
III/ Application aux techniques de manipulations vertébrales cervicales
Seules les cervicalgies communes relèvent de traitements par médecine manuelle; il faut  quasi exclure les manipulations vertébrales cervicales du traitement des névralgies cervico- brachiales par hernie discale molle ou dure et totalement les exclure dans la myélopathie cervicarthrosique et les cervicalgies symptomatiques.
Extrêmement efficaces dans les cervicalgies communes, les manipulations vertébrales cervicales sont de réalisations aisées; il est toutefois impératif de les réserver à des médecins de médecine manuelle chevronnés et qui respectent les recommandations de la société française de médecine manuelle- ostéopathie- orthopédie SOFMMOO 
( indications,  contre indications relatives et absolues et en les faisant précéder des tests habituels vasculaires). En effet manipuler un rachis cervical implique d'avoir à l'esprit 3 pièges potentiels:
1- l'apophyse odontoïde de C2 qui peut être dysplasique et toute manoeuvre cervicale doit être obligatoirement précédée de clichés du rachis, surtout quand il y a la notion de traumatisme récent ou ancien.
2- le système vertébro-basillaire qui présente souvent des anomalies de calibre 
(2 fois sur 3 en ce qui concerne l'artère vertébrale) et un débit artériel vertébral qui physiologiquement est modifié du côté opposé à la rotation cervicale, si cette dernière dépasse 30°.
3- les trous vertébraux situés de part et d'autre du corps vertébral, peuvent être le siège de rétrécissements potentiels soit par cloisonnement et d'origine constitutionnelle, soit sur dégénérescence acquise.
 Les manoeuvres les plus usuelles se font en décubitus dorsal et tête sur table. 
Mais il en existe tout un tas d'autres: tête libre, en décubitus ventral type menton pivot, en décubitus latéral type mandoline, en position assise et en désinflexion, etc, que l'on apprend dans toutes les bonnes écoles de médecine manuelle et qu'il est bon de faire précéder pour détendre le patient de techniques de massages et de mobilisations  cervico-scapulaires.
1-Manoeuvres sur la jonction crânio rachidienne C0/C1 et C1/ C2
Dans les manoeuvres cranio-rachidiènnes, il y a 1 interdit c'est la manoeuvre Hole in line, qui porte le cou en inflexion latérale avec appui direct sur la face latérale de l'axis, sujet positionné en décubitus latéral. Le praticien doit avoir la hantise de la dissection de l'artère vertébrale et la plus grande prudence est recommandée en particulier le respect des règles  éditées par la SOFMMOO. Il faut savoir aussi que les dysfonctions cranio rachidiennes se décompensent sur l'étage inférieur C2/C3 et que le traitement manuel de ce joint donne d'excellents résultats avec une toxicité potentielle nettement moindre++.




La crânio rachidienne = Sama de l'extrémité céphalique; indications:céphalées, névralgie d'Arnold , attitude antalgique, difficulté à l'hyper extension du cou, à tourner la tête, contracture du triangle de Tillaux, cellulalgies de Maigne.
Recherche clinique de la restriction du mouvement dans le paramêtre de moindre amplitude : la rotation pour C0/C1 et l'inflexion pour C1/C2 patient en décubitus dorsal dans le positionnement de la manipulation cranio- rachidienne avec manoeuvres de sécurité préalables : surveiller yeux ouverts du patient,tête sur table. 
- mobilisation qui recrute tout le rachis cervical dans le sens libre et qui permet de bien  positionner la main manipulatrice sur la cranio-rachidienne
- ensuite  par un petit déplacement latéral (jeu corporel) dans le sens inverse restreint par la main mobilisatrice controlatérale cranienne:verrouiller la crânio rachidienne en hyper extension
- puis rechercher la restriction de mobilité d'abord en inflexion pouce vers mandibule puis en rotation pouce vers orbite
- manipulation en dérotation C0-C1 ou en désinflexion C1- C2 avec pulsion dans le sens libre. 
2- MANOEUVRES DISCOCERVICALES de C2/C3 à C7/T1
 Ce sont des manoeuvres en détorsion ( combiné de flexion et d'extension et de rotation et d'inflexion latérale); la pulsion se fait sur le joint supérieur dans le sens libre.




Principe similaire aux 2 manoeuvres précédentes: recrutement dans le sens libre en faisant rouler la tête sur la table, ce qui permet de bien placer la butée manipulatrice sur le joint à manipuler, revenir dans le sens restreint par déplacement latéral jusqu'au verrouillage du joint à  manipuler, pulsion dans le sens libre. 
3- Manoeuvres sur la charnière cervico / thoracique 
- technique en menton pivot:
 technique très utilisée; pulsion par le talon de la main caudale ou mieux du Pisciforme sur l'apophyse transverse de T1; la main céphalique avec contact palmaire sur l'occiput ne bouge pas; les coudes restent tendus


- technique en mandoline
= manoeuvre en désinflexion; la pulsion se fait sur le joint supérieur C7 par un mouvement de couple des épaules de l'opérateur, le pouce caudal sur la face latérale du joint inférieur T1 assiste mais n'intervient pas.



- technique à la Récamier
 = manoeuvre en désinflexion; la pulsion se fait par le pouce caudal sur la face latérale de l'épineuse  de T1.




En conclusion: Les techniques manuelles cervicales sont remarquablement efficaces mais elles doivent impérativement être précédées des manoeuvres préalables  de sécurité comme recommandé par la SOFMMOO+++.
Les 5 recommandations de la SOFMMOO:
• au cours de l’interrogatoire, il est essentiel de questionner le patient afin de 

savoir si il a déjà eu un traitement par manipulation cervicale et si ce traitement a été suivi d’effets indésirables, en particulier vertiges ou état nauséeux.

• cervicalgie d’apparition brutale : examen neurologique simple indispensable afin d’éliminer un accident vertébro-basilaire ischémique en cours de constitution qui peut se manifester par des douleurs cervicales.

• Les manipulations cervicales sont absolument contre indiquées lorsque la douleur pour laquelle le patient est venu consulter ne peut être rapportée au rachis cervical.
• Le médecin manipulateur ne doit pas pratiquer de manipulation cervicale s’il n’ a pas au moins un an d’exercice continu des techniques manipulatives depuis l’acquisition de son diplôme universitaire.
• Il n’est pas recommandé de recourir aux manipulations cervicales en rotation chez la femme de moins de 50 ans.
Cinq recommandations pour les médecins ostéopathes
La SOFMMOO a proposé 5 recommandations pour que les manipulations vertébrales – et en particulier cervicales - soient strictement encadrées. Ces recommandations ont été proposées aux praticiens qui pratiquent les manipulations afin qu’ils puissent, à la lumière d’un diagnostic médical précis, choisir l’acte manipulatif – entre autres traitements – et le réalisent eux mêmes. Elles ne s’adressent qu’aux médecins ostéopathes - les ostéopathes exclusifs n’ont pas été signataires de ce travail.
Avant tout, le médecin manipulateur doit être diplômé et techniquement très compétent. Un an d’exercice continu des techniques manipulatives après l’acquisition du diplôme universitaire de troisième cycle est indispensable avant de réaliser des manipulations rachidiennes.
Le premier temps de la consultation est déterminant : il s’agit d’un interrogatoire pré-manipulatif qui a pour but de préciser l’existence d’antécédents d’effets indésirables en lien avec des manipulations antérieures (vertiges, état nauséeux..). Tout événement indésirable préalable doit faire réfuter une nouvelle manipulation.
L’examen clinique neurologique et vasculaire ensuite est indispensable avant toute manipulation, en particulier cervicale.
Pour la SOFMMOO, « au cours de la première consultation, il n’est pas recommandé de recourir aux manipulations cervicales chez la femme de moins de 50 ans. Ces manipulation ne peuvent être proposées qu’après l’échec des traitements médicamenteux et physiques habituels. Dans ce cas, après l’accord éclairé du patient à qui on explique de manière simple, loyale et intelligible en quoi consiste la manipulation et ses risques et après réalisation clinique de test vasculaires prémanipulatifs. La technique manipulative doit être réalisée avec douceur et doigté et le moins de rotation possible (geste de grande technicité). Un suivi médical doit être assuré ».
Dans le cas où le geste de manipulation cervicale est réalisé par un non médecin, un certificat médical de non contre indication doit être rédigé avant l’acte.
REFERENCES :
Vautravers P. Manipulations vertébrales-ostéopathie. Indications raisonnées, complications. Entretiens de Bichat, 26 septembre 2014.
Vautravers P, Maigne JY. Cervical manipulation and the precautionary principle. Joint Bone Spine 2000 ; 67 : 349-354

Les fractures de l'enfant

Les fractures représentent environ 20 % des admissions dans un service d’urgences pédiatriques. Elles surviennent sur un os en période de croissance qui présente des différences anatomiques, physiologiques et biomécaniques par rapport à l' os adulte.



Sur le plan physiopathologique
On distingue:
- des traumatismes à basse énergie (accidents de sport, accidents domestiques) rencontrés chez les plus jeunes
- et des traumatismes à haute énergie (accidents de la voie publique) prédominant chez les grands.
La difficulté tient au diagnostic face à une symptomatologie parfois frustre et des lésions souvent difficilement visibles sur les clichés standard pour un œil non exercé. 
L’incidence des fractures augmente avec l’âge avec un pic à l’adolescence chez les garçons qui mettent en jeu le pronostic fonctionnel. 
Il faut donc être prudent dans la prise en charge d’un traumatisme même mineur et réaliser un examen clinique précis et des examens radiologiques systématiques. 
La règle de l’immobilisation dans le doute est non seulement préférable mais aussi antalgique.
Classification


Les fractures diaphysaires
La diaphyse est la partie médiane d'un os long, de forme tubulaire, elle constitue l'axe longitudinal de l'os. L'os immature, plus poreux et moins dense, est entouré d'un périoste épais qui limite le déplacement en cas de fracture. Le seuil de rupture pour une même énergie est plus bas que chez l'adulte et la densité moindre permet une déformation plastique des corticales, retrouvée uniquement chez l'enfant dans les fractures en bois vert. 
Il y a possibilité de remodelage à partir du périoste qui est rarement rompu surtout si enfant en bas âge.
La tolérance est bonne si le déplacement est inférieur à 10 mm; il n'y a pas lieu alors de les réduire et on traite orthopédiquement par mise en place d'un plâtre avec surveillance sous plâtre.
Si déplacement supérieur à 10 mm: préférer le clou centro médullaire à la plaque qui induirait un allongement hypertrophique.
La consolidation se fait en 2 à 3 mois avec surveillance du déplacement sous plâtre.
Les fractures en bois vert sont traitées par immobilisation simple. La réduction orthopédique dans les fractures déplacées sans rotation est d'autant moins nécessaire que l'enfant est jeune.
Formes cliniques
- La fracture en bois vert (fig 1-a) 
Il s'agit d'une rupture corticale partielle: 1 seule corticale cède avec persistance d'une continuité cortico-périostée dans la concavité de l'incurvation induite par le traumatisme; traitement: réduction+ plâtre 6 semaines+ surveillance.
-L' incurvation traumatique (fig 1-b) 
Elle est rare, c'est une déformation plastique et se traduit par une exagération de la concavité de l'os par de multiples micro-fractures, sans trait visible. 
Les localisations préférentielles sont le péroné et le cubitus, avec habituellement fracture complète de l'os adjacent dont la réductibilité peut être limitée par l'incurvation.
 Ces incurvations traumatiques peuvent s'observer sur la clavicule ou le fémur. 
En cas de doute diagnostique, la scintigraphie montre une hyperfixation diffuse.
- La fracture en cheveu (fig 1-c) 
Il s'agit d'une fracture spiroïde incomplète, avec trait fin, sans déplacement. Elle est difficile à voir. Le site préférentiel est la moitié inférieure du tibia, lors de l'apprentissage de la marche.
Dans ces 2 derniers types de fractures, la lésion osseuse peut passer inaperçue sur les incidences classiques, des obliques doivent être effectués si la clinique est évocatrice d'une lésion traumatique. Si elles sont méconnues sur le bilan initial, les clichés ultérieurs montreront des appositions périostées ou un épaississement cortical et une meilleure visualisation du trait.


                                     1a-bois vert             1b-incurvation traumatique               1c-cheveu

Les fractures métaphysaires
La métaphyse est la région intermédiaires de l'os située entre la diaphyse et l'épiphyse. Cette zone correspond à une lame de cartilage (cartilage de conjugaison) qui assure la croissance de l'os en longueur qui va disparaitre à l'âge adulte.

                                                                 motte de beurre


a- en motte de beurre  répond à un tassement vertical de la diaphyse, au voisinage de la métaphyse, avec trait transversal peu ou pas visible. 

La corticale rompue bombe de chaque côté dans les formes les plus évidentes. 
La moindre irrégularité ou saillie de la corticale, habituellement parfaitement continue et régulière, doit faire évoquer le diagnostic.
Le  tassement parfaitement stable se traite par manchette plâtrée.
b- complètes: les 2 corticales sont rompues avec instabilité majeure; traitement: plâtre moulé et surveillance hebdomadaire à J7, J14, J21. 
Les fractures épiphysaires
L’épiphyse est l'extrémité d'un os long; elle se  se développe séparément de l'os durant la croissance, pour s'y souder à l'âge adulte
Salter et Harris ont proposé chez l'enfant, une classification des fractures épiphysaires, simple, incomplète, mais pratique et recouvrant la majorité des cas rencontrés. Elle permet un diagnostic radiographique du type de fracture par rapport à la plaque chondrale et à l'épiphyse.


Type I : 
 Il s'agit d'un décollement épiphysaire pur, sans lésion épiphysaire ou métaphysaire. 
Ce type représente 6% à 8% de l'ensemble des lésions. 
Il s'observe plus fréquemment chez le nouveau né et le nourrisson ou bien au niveau des phalanges. 
Le diagnostic est difficile en cas de déplacement peu important, il faut s'aider alors des signes indirects.
 Le pronostic est globalement bon après traitement.
Type II :
Il s'agit d'un décollement épiphysaire associé à un fracture d'un fragment métaphysaire, avec ou sans déplacement. 
L'épiphyse est intacte. La taille du fragment métaphysaire est variable, des clichés en oblique peuvent être nécessaires pour mettre en évidence des petits fragments.
Ce type est le plus fréquent de l'ensemble des fractures épiphyso-métaphysaires, 73% à 75%, il est largement prédominant au delà de l'âge de 4 ans. 
L'extrémité inférieure du radius est particulièrement exposée à ce type de fracture, prés du tiers ou de la moitié de l'ensemble des fractures de type 2. 
L'extrémité inférieure du tibia et du péroné (fibula) et les phalanges sont les autres sites les plus exposés.
 Les complications à long terme par épiphysiodèse partielle ou totale sont très rares mais  le cartilage de croissance doit être respecté, sinon épiphysiodèse totale avec pont osseux et raccourcissement et in fine inégalité de longueur; si épiphysiodèse partielle : déviation axiale.
Type III : 
Il s'agit d'une fracture épiphysaire avec décollement épiphysaire du noyau fracturé. 
La métaphyse est normale. Le déplacement est habituellement peu important. 
Sa fréquence est faible (6,5% à 8%). Les sites les plus exposés sont l'extrémité distale du tibia et des phalanges, plus rarement celle du fémur.
Elle survient en fin de maturation osseuse, peu avant la fusion du cartilage.
Type IV:
Il s'agit d'une fracture orientée verticalement, traversant la ligne de cartilage et détachant un fragment métaphysaire solidaire d'un fragment épiphysaire. 
Sa fréquence est évaluée à 10% à 12% de l'ensemble des lésions épiphyso-métaphysaires. Elle s'observe surtout au niveau du condyle huméral et de l'extrémité distale du tibia.
Le risque d'épiphysiodèse est important dans ce type de fracture.
Dans les Salter 3 et 4 si le déplacement est non ou mal réduit, cela induit une marche d'escalier = cal vicieux et arthrose secondaire.
Type V:
Il correspond à une impaction du noyau épiphysaire dans la métaphyse avec écrasement du cartilage de croissance. 
Cette lésion est très rare (1%) et son diagnostic n'est évoqué que rétrospectivement devant le développement d'une épiphysiodèse dans les suites d'un traumatisme pour lequel les clichés paraissaient normaux. 
Le site d'élection est le genou.
NB: Cette classification est associée à une notion pronostique: la gravité est croissante du type I au type V
Dans les 3 premiers types, les troubles de développement du cartilage de croissance sont rares.
 Ils sont par contre fréquents dans le type IV et constants dans le type V. 
Il s'agit d'épiphysiodèses partielles ou totales sur fractures ou décollement épiphysaire qui correspondent à la disparition du cartilage de croissance, remplacé par des ponts osseux  qui aboutissent à un raccourcissement de l'os ou à une désaxation du membre lors de la croissance.