samedi 2 décembre 2017

Fuites urinaires d'effort et activités sportives

L’incontinence urinaire d’effort (IUE) correspond à une perte involontaire d’urine engendrée par les exercices physiques qui viennent perturber chez une sportive le plancher pelvien, sorte de hamac fait de muscles (releveur de l'anus ou pubo-rectal++) et de ligaments supportant les organes du bassin : vessie, utérus et intestin par augmentation de la pression abdominale. Cette IUE affecte trois fois plus les sportives avec des pourcentages variables selon les études et compris entre 20 et 30%; sportives identifiées par l'HAS (Haute Autorité de Santé) comme personnes à risque par rapport aux non sportives. 
Soulignons d'emblée  que cette IUE est à différencier de l'incontinence urinaire classique (IU) que l'on rencontre chez les non sportives par faiblesse, rarement innée (tendance familiale) et presque toujours acquise du plancher pelvien et qui s'accompagne d'une descente d'organes et de bien d'autres désagrément. IU en rapport avec les grossesses qui se succèdent, l’obésité, la sédentarité, la constipation chronique, la toux chronique chez les fumeuses, une mauvaise condition physique, des troubles neurologiques, et les suites de la chirurgie abdomino-pelvienne, causes potentielles de l’affaiblissement du plancher pelvien.



Les sports les plus à risque
Ce sont les sports intensifs et de compétition, les sports collectifs, la gymnastique, le trampoline, l’aérobic, le badminton, la course à pied et les arts martiaux. Tennis et ski sont à risque modéré. La  randonnée pédestre semble l'activité physique la moins à risque. La natation du fait de la position à l'horizontale et l’équitation, sport à impacts répétés sur le périnée, entrainent beaucoup moins de fuites urinaires que les autres sports. 
Mécanisme lésionnel et physiopathologie de l'IUE
La grande fréquence des incontinences d’effort chez la sportive est en rapport avec l'hyperpression abdominale en position debout qui hypersollicite le hamac pelvien qui physiologiquement ne peut suivre et soutenir efficacement la vessie.
Notre consoeur le Dr Bernadette de Gasquet dans son ouvrage « Abdominaux, arrêtez le massacre » pointe du doigt l'effet délétère de la pratique des abdominaux en position de crunch, et il ne fait aucun doute que les recommandations de ma consoeur, si elles sont suivies par les sportives, vont faire évoluer favorablement les pratiques dans le renforcement musculaire abdomino-lombaire et diminuer l'incidence de l'IUE.
Ces fuites urinaires d'effort semblent se déclencher plutôt dans la seconde partie de l’entraînement ou de la compétition, la fatigue entraînant une perte des réflexes anticipateurs, la sportive n'étant plus capable de contracter ses muscles pelviens (muscle releveur de l'anus +++) qui  n’ont plus alors le tonus nécessaire pour s’opposer à l’hyperpression abdominale et donc aux fuites urinaires d'effort.
En 2008, une étude italienne chez 679 sportives de loisir, a révélé que plus de 10 % des sportives ont abandonné le sport du fait de la survenue de fuites urinaires à l’effort, que 20 % des sportives ont adapté leur pratique pour ne pas être victimes de fuites urinaires en utilisant des « petits moyens » préventifs comme les protections absorbantes. Et même 40% des sportives de 48-53 ans arrêtent le sport, du fait des fuites urinaires.  Plus grave lorsqu’on les interroge, 80% des femmes déclarent qu’il s’agit d’un sujet difficile à aborder et seulement 5% des femmes victimes d’incontinence se décident à en parler à leur médecin, par pudeur, honte ou manque d’information, médecins par ailleurs peu formés à la prise en charge de ce type de problème.
Prévention
C'est d'abord casser les tabous et aborder les problèmes de fuites urinaires déclenchées par le sport, et c'est ce que nous faisons avec nos confrères et consoeurs de la commission médicale de la FFAthlétisme pour nos athlètes féminimes avec un travail également d'information auprès des coachs sur l'effet délétère des crunchs, la nécessité d'une bonne hygiène de vie, la lutte contre la constipation et l'impérieuse obligation d'une bonne rééducation post natale après accouchement ou tout problème pelvien auprès d'un kinésithérapeute rompu à ce type de prise en charge avec apprentissage des contractions volontaires des muscles pelviens et du muscle transverse de l'abdomen.
Conclusion
En présence d'une fuite urinaire d'effort chez une sportive, la solution n'est bien sûr pas l'arrêt du sport mais bien une prise en charge en rééducation de la sangle musculo-ligamentaire pelvi-périnéale, une adaptation des techniques de préparation physique et d'entraînement qui n'entrainent pas d'hyper-pression abdominale comme par exemple le travail des muscles abdominaux en flexion directe ou croisée du tronc (crunchs) et une hygiène de vie (lutte contre la constipation chronique et les infections urinaires récurrentes par une bonne hydratation).