jeudi 8 juin 2023

 

Claquages des muscles ischio-jambiers de la face postérieure de la cuisse

Toutes disciplines sportives confondues et tout spécialement dans les activités de saut et de vitesse (athlétisme, football, rugby,mais aussi dans d'autres activités sportives comme la danse ou la gymnastique rythmique et sportive où des amplitudes articulaires importantes à haute vélocité et basse vélocité sont exigées), les claquages musculaires des muscles ischio-jambiers (IJ) de la face postérieure de la cuisse devancent largement ceux des muscles Adducteurs (face interne de cuisse) et du Droit fémoral du Quadriceps (face antérieure de cuisse), qui arrivent en deuxième et troisième position et ceux du muscle jumeau interne du mollet arrivant en quatrième position. 


En pourcentage: 37% IJ, 23% Add, 19% Droit fémoral du quadriceps, 13% Jumeau int, 

Soulignons d'emblée la gravité clinique (douleurs+++, encoche, ecchymose retardée), fonctionnelle (impotence+++) paraclinique (échographie et IRM) des lésions de désinsertion proximale des IJ qui relèvent d'une chirurgie d'urgence ou du moins d'une prise en charge chirurgicale spécialisée, rapide. 
Résumé
Les ischios-jambiers (IJ), groupe musculaire de la face postérieure de cuisse sont à l'exception du court biceps fémoral, des muscles bi-articulaires (hanche et genou). Leur mode de fonctionnement excentrique les rend vulnérables et le claquage (terme retenu parce qu'il est compris du plus grand nombre de sportifs et de non sportifs et qu'il correspond à l'inverse d'une élongation, à un traumatisme conséquent des IJ) est l'accident musculaire traumatique le plus fréquent en traumatologie sportive (athlétisme, football, rugby, hand, danse).
Le chef long biceps fémoral serait affecté à 94% dans les différents types de course (sprint-lésions), et le semi-membraneux trois fois sur quatre (74%), quand le mécanisme lésionnel est un mouvement d'étirement brusque (strech-lésions). Près de la moitié des claquages touchent deux sites musculaires à la fois (long biceps et semi-tendineux). 
La localisation lésionnelle la plus fréquente est la jonction myo-aponévrotique++, suivi de la jonction myo-tendineuse, plus rarement la lésion va siéger en plein corps musculaire. On les classe depuis Durey et Rodineau en 5 stades de gravité anatomo-clinique croissante, les stades 0, 1 et 2 évoluant favorablement entre 1 et 15 jours, tandis que les stades 3 et 4 ont des évolutions longues de 1 à 3 mois et plus.
Si le diagnostic d'un claquage est une évidence, l'important est de définir son degré de gravité à partir de cinq paramètres, quatre paramètres cliniques faciles à évaluer: l'intensité de la douleur, la localisation du pic douloureux par rapport à l'ischion (plus c'est haut situé et proche de l'ischion, plus c'est sévère), l'impotence fonctionnelle immédiate, la présence d'un SCTPM de Robert Maigne sur les métamères L5/S1 en rapport avec une dysfonction vertébrale lombaire basse, constamment retrouvé dans mon expérience, et un paramètre para - clinique: l'importance de l'oedème, par l'imagerie: échographie pour tout le monde et IRM dans le sport de haut niveau qui permet une approche lésionnelle extrêmement précise et pointue. Proximité du pic douloureux par rapport à l'ischion et importance de l'oedème sont corrélés à des délais plus longs de reprise sportive.


Sur le plan thérapeutique, le protocole RICE : Repos avec retrait immédiat de la compétition, Glace (Ice), Compression, Elévation est à appliquer immédiatement (le système Game Ready se distingue par la possibilité d'appliquer en même temps le froid et la compression), et si besoin la prévention du risque thrombo-embolique (exceptionnel mais gravissime s'il parvient à échapper à la vigilance du praticien) constituent le premier temps du traitement. 
Il sera suivi au mieux dans un deuxième temps par un protocole de réhabilitation kinésithérapique à base d'exercices de type excentrique sub-maximaux (E-protocole) suivant des modalités bien définies chez les sportifs. Le E protocole s'est avéré des plus efficients en terme de raccourcissement des délais de reprise sportive et de récidives. 
A noter que vers le 6ème jour, quand le claquage est profond et proche du fémur, certaines équipes médico-sportives préconisent un traitement par injections de PRP afin de raccourcir les délais de reprise sportive et éviter des complications à type de cicatrice fibreuse, d'hématome enkysté ou de myosite ossifiante.
Le dépistage, le traitement et le suivi dans le temps des dysfonctions inter-vertébrales L4/L5 et L5/S1 et de leurs conséquences tissulaires, le SCTPM de Robert Maigne, sont le facteur de risque le plus générateur d'accidents tendino-musculaires, constamment retrouvé quand il est systématiquement recherché, mais aussi trop souvent oublié de mes confrères spécialisés dans la traumatologie du sportif, est incontournable. 
Enfin le délai de reprise sportive est fortement corrélé au type de lésion (plus rapide dans une sprint-lésion que dans une strech-lésion) et au choix du protocole de rééducation. Dans l'étude sur des joueurs de football professionnels suédois, le délai moyen a été raccourci de 51 à 28 jours (45%) par substitution d’exercices de travail excentrique sub-maximaux (E-protocole) à un protocole plus classique d’étirements et de renforcement musculaire concentrique (C-protocole). 
Enfin la recherche d'un déséquilibre isocinétique IJ / Q < 0,8 en début de saison sportive et leur correction et la traque aux dysfonctions vertébrales lombaires basses générées par un dysentraînement (excés de charges lourdes dépassant les capacités de résistance des disques intervertébraux lombaires bas) et leur prise en charge constituent la meilleure des préventions possible.
Introduction
Les IJ interviennent de façon prépondérante dans les courses de vitesse et dans les sauts en athlétisme et ils le font payer très chèrement aux sprinters et aux sauteurs durant toute leur carrière. Soulignons d'emblée que cette propension des muscles ischio-jambiers à se blesser,  est liée à l'adaptation phylogénétique (syndrome de Lucy) à la station bipède de la musculature sous pelvienne qui s'est faite en deux temps: d'abord bipède intermittente avec une forte action antigravitaire des muscles de la cuisse, puis permanente avec obligation pour les IJ, qui travaillent le plus souvent en excentrique, de s'étirer à la marche et à la course et le moins que l'on puisse dire est que ces IJ prévus à l'origine pour une fonction statique de maintien de l'équilibre et de la station debout (et donc à vitesse de contraction lente), ne sont pas taillés au départ pour les courses de vitesse et de saut, ce qui explique leur extrême vulnérabilité dans les activités de ce type.
NB: Cette extrême vulnérabilité j'ai pu la constater tout récemment (11 et 12 février 2017) aux championnats de France indoor cadets et juniors d'athlétisme et le moins que l'on puisse dire c'est que le claquage des muscles ischio-jambiers de la cuisse (biceps fémoral +++) a été la lésion traumatique la plus fréquente recensée par le service médical de ces championnats et ce malgré une sensibilisation par la commission médicale de la FFA en direction des clubs et des efforts de prévention de la part des athlètes et de leurs coaches. Compte tenu de leur fréquence et du taux élevé de récidives, les IJ restent décidément toujours le groupe musculaire le plus à risque en Athlétisme. 


Fort des constations médicales que j'ai pu observer récemment et tout le long de ma carrière de médecin du sport, les problèmes posés par les IJ restent toujours préoccupants. Malgré des connaissances sur le sujet et les données de la littérature que sont pourtant diverses et variées en particulier dans le milieu du football, les avis divergent non pas tant sur le diagnostic clinique complété par l'imagerie de première intention représenté par l'échographie qu'il est préférable de faire après les premiers jours d'évolution et la prise en charge maintenant assez bien codifiée, mais plutôt sur: comment les prévenir. Et si en matière de prévention, un bilan isocinétique en début de saison semble de plus en plus incontournable (c'est ce que propose depuis peu la commission médicale de la FFA à tous les athlètes de haut niveau, avec le calcul pour chaque cuisse du ratio quadriceps en concentrique / IJ en excentrique à la recherche d'un déficit de force sur les IJ) et si le travail progressif en excentrique en curatif est bien établi, les IJ étant des muscles à forte charpente fibreuse interne et externe, caractéristique qui avec bien d'autres les rend structurellement raides, il s'avère que cette raideur protège les IJ d'un étirement maximal qu'ils ne peuvent pas physiologiquement assumer. 

Phylogénétiquement
Chez les primates et puis chez l'homme, la cuisse constitue le segment de membre propulseur le plus puissant et donc le plus exposé aux accidents musculaires, à la fonction essentielle de propulsion s'ajoutant chez les bipèdes la lutte anti-gravitaire correspondant à une série de contractions réflexes permanentes des muscles antérieurs et postérieurs (agonistes et antagonistes) de la cuisse, tandis que la seconde est en rapport avec les mouvements volontaires, et pour un sportif, très différents d'un athlète à l'autre en fonction de sa discipline. A ces deux contraintes s'ajoute une troisième contrainte, celle engendrée par l'allongement forcé des chaînes musculaires postérieures survenues lors du changement de mode de locomotion et rendues indispensable par le travail en extension de la jambe en position debout. Malgré cet étirement quasiment permanent de ces structures pendant la marche ou lors de mouvements réalisant des flexions antérieures du tronc, jambes tendues, les ischio-jambiers auront quand même tendance à se raccourcir par un processus très rapide et difficilement réversible lié au réflexe gamma. Leur stimulation excentrique lors de la course notamment va accentuer ce phénomène.
Les différences de caractéristiques mécaniques entre les muscles antérieurs et postérieurs sont à l'origine d'un déséquilibre très dangereux pour l'intégrité de ces structures qui devront perpétuellement être étirées. L'ensemble de ces modifications évolutives a été décrit sous le nom de "Syndrome de Lucy":  debout sur nos pattes de derrière, on s'est redressé très vite, trop vite pour nous, médecins du sport, au point que l'on a les muscles des cuisses trop courts. Du coup, le sprinter en Athlé est presque obligé de se mettre à 4 pattes pour replacer le muscle ischio-jambier en position de quadrupédie, moyennant quoi, il peut démarrer vite. Quant aux malheureux adeptes des sports collectifs (foot, rugby, hand) ils doivent se mettre en position anormale s'ils veulent courir très vite et dans un temps très court, ce qui entraîne souvent chez eux des problèmes de claquage notamment. Ce syndrome de Lucy va retentir sur le fonctionnement dynamique des articulations sus et sous-jacentes (genou, hanche, sacro-iliaque) et est à l'origine de très nombreuses pathologies macro ou micro-traumatiques du membre inférieur et en particulier des claquages musculaires.
Rappel anatomique 
Le groupe musculaire des IJ de la face postérieure de la cuisse est constitué de trois muscles: le biceps fémoral (le plus exposé aux blessures), avec deux chefs, long et court biceps en externe, et semi- membraneux (le plus profond) et semi-tendineux en interne. Long biceps et les deux semi sont bi- articulaires et soumis à de grandes variations de longueur; le court biceps est mono-articulaire. Ils sont composés à 55% de fibres de type II (anaérobie) à vitesse de contraction rapide et à potentiel de force importante mais d’une grande fatigabilité avec  risque élevé de lésions.


Leurs origines communes se fait sur la tubérosité ischiatique (excepté le court biceps). Le biceps fémoral et le semi tendineux s’insèrent par un tendon commun alors que le semi membraneux possède une insertion séparée et plus latérale sur la tubérosité ischiatique.  
Leurs terminaisons
Le biceps s'inserre en distal sur le versant postéro-latéral de la tête fibulaire. Le semi tendineux se fixe en distal au niveau de la partie médiale du tibia, quant au semi membraneux, il rejoint l’épiphyse supérieure du tibia et la partie supérieure de la coque condylienne latérale.
L'innervation
A noter que le biceps fémoral, le plus exposé aux blessures est innervé par deux branches différentes du nerf sciatique : le chef long biceps par la portion tibiale et le chef court par la portion fibulaire. Cette double innervation pourrait être une des multiples causes des lésions des IJ par incoordination des contractions musculaires entre les deux chefs en particulier si les deux derniers étages lombaires sont le siège de dérangements vertébraux (DIM de Robert Maigne) qu'il faut dépister, traiter et surveiller comme le fait si bien le médecin allemand le Dr Wolfhart - Müller. A ce propos dans la radiculalgie sciatique L5, le strasbourgeois Philippe Vautravers recommande de rechercher une modification du réflexe ostéo-tendineux fémoro-tibial interne, au niveau de la patte d'oie.
Ils présentent aussi des dispositions anatomiques particulières:
- le semi tendineux est fusiforme et fortement tendineux avec un tendon distal très long.
- le semi membraneux, plus médial et plus membaneux est très étalé en largeur, s’insère par un large tendon en proximal et par une insertion principale et deux secondaires en distal.
- le biceps fémoral est constitué comme déjà indiqué par deux chefs, le chef long est fusiforme, le chef court est semi-penniforme. 
La disposition semi-penniforme des fibres musculaires du chef court, positionnées latéralement par rapport au tendo, entre autre du court chef fémoral permet un ancrage très solide par rapport à une disposition plus fusiforme et favorise la force  et la puissance plutôt que l'élasticité.




Histologiquement
Les fibres musculaires des IJ sont cloisonnées par un important squelette fibreux composé de fascias de soutien rigides et contraignants (épimysium, périmysium, endomysium) où cheminent les vaisseaux et les nerfs. Par l'importance de leurs tendons, les IJ sont très denses en fibres de collagène et cet aspect combiné avec leur caractère de fibres pennées leur confère une raideur passive, gage d'économie d’énergie, mais réduisant nettement le potentiel d’extensibilité (seulement de 8%), ce qui les rends moins compliants que la moyenne. Cette raideur passive naturelle des ischio jambiers serait  pour certains auteurs protectrice, en accordant une marge de manoeuvre entre l’apparition des douleurs liées à la mise en tension et le seuil de rupture des fibres musculaires et permet de garder à une certaine distance le seuil lésionnel, ce qui relativiserait un peu l'intérêt préventif des étirements.
Anatomo-pathologie
Les lésions des ischio-jambiers sont très hétérogènes avec des localisations et des tailles diverses qui rendent le pronostic de guérison difficile à établir et un taux de récidives encore conséquent: 
- désinsertions proximales du tendon commun
- lésions myo-tendineuses distales
- lésions du corps musculaire (parenchyme musculaire) représentant la minorité de la totalité des atteintes
- décollements myo-aponévrotiques de l’aponévrose péri-musculaire ou d’une cloison centro-musculaire (l’IRM est l’élément diagnostique de ce type d’atteinte).
Physiologie (Actions des IJ sur la hanche et le genou)
Les IJ ont une action simultanée d’extension de la hanche et de flexion du genou. Leur action sur le genou dépend de la position de la hanche. Plus la hanche est fléchie, plus les IJ sont étirés et sous tension. Au-delà de 90° de flexion de hanche, l'allongement des IJ est tel qu’il est très difficile d’avoir une extension du genou. Semi-membrabeux et tendineux ont une action dynamique de flexion et de rotation médiale du genou.  
- sur la hanche ils sont principalement extenseurs et secondairement rotateurs.
- sur le genou ils sont fléchisseurs en chaîne cinétique ouverte, et extenseurs et agonistes du quadriceps en chaîne cinétique fermée. Ils ont également un rôle essentiel dans la stabilisation rotatoire du genou, à l’image de rênes directrices qui ont un rôle directionnel mais aussi protecteur des composants articulaires du genou (ménisques, ligaments), grâce à leur richesse en récepteurs proprioceptifs (rôle amputé en cas de ligamentoplastie aux IJ).
Ils sont aussi sollicités dans les efforts de propulsions et d’accélérations avec risque de voir une partie de leur capital en fibre musculaire se rompre brutalement.
Ils fonctionnent principalement sur le mode excentrique (et source de DOMS ou courbatures), iatrogène quant il est excessif à cause du ratio quadriceps/ischio-jambiers qui leur est défavorable (valeurs normatives mesurées sur machine isocinétique de 0,60 à vitesse lente (60°/s) et de 0,70 à vitesse rapide (240°/s).
Retentissement à distance
Les ischio-jambiers ont également un rôle indirect sur le rachis, la cheville et le pied, et de ce fait, peuvent être en cause par leur raideur excessive dans certaines lombalgies chroniques et des pathologies pôdales. 
Mécanismes lésionnels
Des muscles poly-articulaires comme les IJ, à dominante phasique, sont potentiellement plus sujets aux lésions que des muscles mono-articulaires, toniques,  les différentes activités  sportives ne les sollicitant pas de la même manière, certaines demandant des efforts d’explosivitét très contraignants pour les systèmes musculo-tendineux.
Une lésion musculaire des ischio jambiers survient:
- lors d’un dépassement des possibilités d’extensibilité du muscle (au football lors d’un contrôle en porte manteau, sur une glissade incontrôlée, ou dans les derniers degrés d’un mouvement de shoot).
 - ou lors d’une contraction intense et brutale du muscle en position d’étirement comme sur une accélération.
- lors d'une phase active d’un mouvement pliométrique (impulsions, accélérations).
Des études suédoises dans le football pro ont mis en évidence que 72% des lésions myo-aponévrotiques surviennent sur une course de vitesse ou une accélération (sprint-type) et que 28% sont des lésions d’over-stretching survenant sur un pied levé, un tacle ou une position de fente (stretching-type).


Contrôle en porte manteau en football qui sollicite les IJ


Athlétisme, Football, Rugby, Hand = sports à risque de claquage des I.J.

Localisation des lésions (étude suédoise)+++
 - 69% des lésions primaires sont situées dans le chef long du biceps fémoral avec présence quasi une fois sur deux d'une lésion secondaire dans le semi-tendineux.
- 21% des lésions primaires sont situées dans le semi-membraneux avec dans 44% des cas, une lésion secondaire.
Dans cette étude portant sur des joueurs de football pro, il apparaît aussi qu'une majorité des lésions primaires de type « sprint lésion » sont situées dans la longue portion du biceps fémoral (94%) alors que le semi-membraneux (74%) est plus touché par un mécanisme lésionnel en étirement (strech lésion). 
Facteurs de risque classiquement évoqués
-  diététique inadaptée : hydratation insuffisante, alimentation hypercarnée, acide.
-  défaut ou l'absence d’échauffement.
- défaut de préparation athlétique: mauvaise planification des entrainements, entrainements inadaptés aux conditions de match, préparation abusive
- prise d’anabolisants ou de corticoïdes  
-  stress 
- conditions climatiques : froid et humidité 
Mieux vaut respecter ces facteurs de risques qui entrent dans le cadre d'une bonne hygiène de vie.
Facteurs de risque évoqués dans Kinésport (rapporté par Arnaud Douville de Franssu, à propos de la prédominance des claquages sur le biceps fémoral):
Les raisons d’une telle prédominance du biceps fémoral comparativement au semi-membraneux ou semi-tendineux n’est pas clairement établi aujourd’hui. Des pistes ont été suivies par certains chercheurs mais sans arriver à un constat clair, immuable:
- la double innervation du biceps fémoral
- des angles articulaires de flexion de genou et de hanche différents par rapport aux ischio-jambiers médiaux
- des variations de longueur influencées par des considérations posturales
- une quantité de fibres de type II plus importante 
- biomécaniquement le biceps fémoral (BF) présente une plus petite architecture fasciculaire que le ST. Dans les courses à haute vitesse, le semi-tendineux (ST) ne peut plus assumer son rôle prédominant dans la résistance et la production de force lors de charges excentriques intenses, dès lors le biceps fémoral compense ce déficit fonctionnel, mais possédant la plus petite longueur fasciculaire, il s'avère moins capable de résister et d’emmagasiner la grande quantité d’énergie produite lors de la phase finale excentrique du cycle de course. Par voie de conséquence, même le plus petit déficit fonctionnel chez le semi-tendineux que ce soit au niveau de la force ou de la coordination causera au sein de la synergie du couple ST-BF un déséquilibre important qui amènera un ou les deux muscles à la lésion, probablement parce que le biceps fémoral n’est pas fait pour emmagasiner une force importante à la fin du cycle oscillatoire et que le ST, davantage sujet à une acidification prématurée et à une apparition de la fatigue précoce, ne joue plus son rôle final de freinateur. Ce constat architectural de petite longueur fasciculaire du biceps fémoral rejoint les conclusions d’une étude de 2005 qui au travers d’une modélisation expérimentale d’un sprint réalisé sur tapis roulant, avait démontré que le changement de longueur du biceps fémoral était plus important que celui des autres ischios. Cela étant dû probablement à l’insertion plus latérale du biceps fémoral. Une étude plus récente soulignait également que le biceps fémoral est plus enclin à s’étirer (étirement définit comme le ratio du changement de longueur par rapport à la position de repos) que les ischio-jambiers médiaux, mais ce changement reste indépendant de la vitesse de course. Cela corrobore les conclusions de travaux qui montrent que bien les forces excentriques augmentent fortement lors d’une accélération et sont à leur apogée lors de la plus grande vitesse de course, l’étirement des ischio-jambiers est quant à lui jamais maximal. Cette difficulté qu’a le biceps fémoral à résister à de grandes forces excentriques constitue encore ici un argument pouvant expliquer sa faiblesse évidente. 
- la fatigue musculaire peut jouer un rôle non-négligeable avec risque significatif et prédominance des blessures musculaires à la fin de chaque mi-temps de sports collectifs.
En conclusion: Pour toutes les raisons évoquées précédemment (double innervation, petite longueur fasciculaire, fatigue métabolique du semi-tendineux, asynchronisme musculaire…), nous avons bien compris que le biceps fémoral est en première ligne de la lésion myo-aponévrotique des ischio-jambiers de par sa difficulté à résister à un pic excentrique plus important lors de la phase oscillatoire du cycle de course. 
Prévention: Causé en partie par sa problématique à devoir exercer plus de force excentrique afin de s’étirer convenablement dans le même délai temporel que les autres ischio-jambiers, on ne peut qu’encourager une nouvelle fois un travail assidu de prévention par un renforcement spécifique localisé tant du biceps fémoral que des autres muscles. Ce travail sera réalisé par une position segmentaire corporelle différente selon les muscles ischio-jambiers visés. 
Facteurs de risque majeur: 
1- le déséquilibre IJ en excentrique à 30°/ Q en concentriques 240° < 0,8 est le facteur de risque le plus élevé de claquage des IJ pour mes confrères du CERS de Capbreton, les IJ n'étant pas assez forts pour freiner le mouvement généré par le Quadriceps. Tout sportif de vitesse et de saut présentant un ratio < 0,8 est à considérer comme un sujet à risque, sous réserve de l'absence de toute amyotrophie.
2- la présence d'un SCTPM en rapport avec une dysfonction vertébrale lombaire basse L4-L5 ou L5-S1. La présence d'un syndrome cellulo-téno-périosto-myalgique (SCTPM) sur les métamères L5 et S1 (pour les profanes: métamère = territoire précis correspondant à une racine nerveuse en provenance de la moelle épinière et contenue dans la colonne vertébrale) de Robert Maigne, conséquences tissulaires  d'une dysfonction vertébrale lombaire basse.  Constamment retrouvés quand ils sont systématiquement recherchés, leur dépistage, traitement et suivi dans le temps, est incontournable. Quel que soit le niveau de gravité du claquage des IJ, la traque de ce facteur déclanchant d'origine vertébrale vers la 3ème semaine  est facile si l'athlète est lombalgique ou lombo-sciatalgique L5 ou S1; c'est moins évident en leur absence: rechercher alors des signes de DIM: dérangement intervertébral de Robert Maigne lombaires bas et les points métamériques L5 et S1 de Lesage et demander un bilan radiologique lombo-sacré simple qui sera le plus souvent vierge de toutes discopathie. 
(Je recommande vivement la lecture de cet autre article du blog: bases médicales des blessures en Athlétisme ou ces notions sont bien explicitées). 
Approche clinique basée sur la douleur et sur l'impotence fonctionnelle immédiate (retentissement  sur la marche) 
La meilleure façon de ne pas se couper des patients en utilisant des mots trop abscons pour un sportif ou le simple profane, c'est de classer les accidents musculaires en fonction de leur gravité clinique, à partir de deux paramètres d'interrogatoire très simples: la douleur et le retentissement immédiat sur la marche. Cela permet à la fois de se faire bien comprendre et en dehors du sport d'élite de se passer souvent d'une imagerie, pas toujours nécessaire et fonction de l'impotence fonctionnelle et de l'importance de l'hématome supposé. Ensuite il s'agira, en différé de quelques jours, de prévenir une complication potentielle redoutable, la thrombo-phlébite du membre inférieur et enfin après 3 semaines d'évolution de faire le lien à priori avec la colonne vertébrale, comme recommandé par les Drs Robert Maigne et Müller-Wolhfart.


Le sportif qui se claque
Il s'agit généralement d'un pratiquant de l'athlétisme (sprint, haies, sauts) ou de sports collectifs (football, rugby, hand surtout) ou individuel comme le tennis ou la danse, il s'agit pendant une période d'entraînement ou pendant une compétition, d'un accident qui survient en pleine course (sprint-lésions) ou lors d'un étirement (strech-lésions), d'intensité variable (de la simple pointe sur un groupe musculaire, jusqu'au coup de poignard avec douleur syncopale et chute) sur le groupe musculaire ischio-jambiers de la loge postérieure de la cuisse.
Le signe majeur est l'intensité de la douleur qui va sur une échelle EVA de 4 à plus de 10 (grave à partir de 6) et la distance entre le pic douloureux à la palpation et l'ischion qui sont fortement corrélés à l'impotence fonctionnelle immédiate qui peut être partielle ou totale et porte sur la marche.
Pour le médecin
Il va s'agir, comme nous l'avons dit en préambule, de se faire comprendre du sportif de manière à communiquer avec lui sur la gravité potentielle de la lésion et quoi de plus simple que la douleur et l'impotence fonctionnelle.
- EVA à 6 et plus (correspond à un stade 3 de Rodineau) 
Il s'agit d'un accident musculaire grave, proche de l'ischion, qui s'accompagne d'une forte répercussion immédiate sur la marche, impossible ou presque et qui va persister dans les jours qui suivent et retentir sur la vie quotidienne (montée d'escaliers, enfiler son pantalon, mettre ses chaussettes, etc). 
La conduite à tenir ne doit souffrir d'aucune hésitation ou retard quelconque: 
- arrêt immédiat de l'activité sportive avec au besoin évacuation sur une civière
- application du protocole Grec ou Rice (repos strict sans appui avec béquilles, glaçage de la cuisse postérieure d'au moins 5 jours qui va réduire l'hématome interne (la lésion musculaire correspondant à une cassure du muscle, saigne) et compression par un large bandage d'abord, avec éventuellement relai par un bas de contention de classe 2 ou 3; équivalent = système Game Ready qui glace et comprime à la fois.
game ready pack basic
Le Système Game Ready glace et comprime à la fois la lésion musculaire

- sur-élévation du membre la nuit, au moins 15 jours. 
- prise d'antalgiques de préférence de niveau 1 type paracétamol 1g x 4, le recours au niveau 2A: la codéine, 2 B: le Tramadol ou 3: les morphiniques per os , sont à éviter car susceptibles d'interférer en cas de contrôle anti-dopage.
- en léger différé vers le 4ème jour, et compte tenu de l'impotence fonctionnelle, introduction que je recommande, d'un traitement préventif d'une phlébo-thrombose (dont il faut avoir la hantise et donc les conséquences peuvent être dramatiques) par HFPM de type Lovenox à dose préventive: 2000 U ou 4000 U, avec en parallèle, mesure biologique de la numération plaquettaire et du taux de Créatinine dans le sang.
Suivant le niveau sportif, le recours à l'imagerie de type échographie au 4ème jour permet d'évaluer l'importance de l'hématome intra et péri-musculaire au niveau des IJ (IRM pour le haut niveau et beaucoup plus précis). Cette imagerie, qui détermine l'importance de l'oedème (critère de gravité para-clinique) est recommandé par mes confrères médecins du sport, et permet si nécessaire, une éventuelle ponction écho-guidée. 
Une interruption de l'activité sportive de 6 à 8 semaines au moins est le meilleur moyen de réduire les récidives (qui ne manqueront pas de ce produire en cas de non respect du temps de cicatrisation avec doublement du temps d'indisponibilité sportive).
- EVA < à 6
Ici, la gravité clinique est moindre et le retentissement sur la marche plus modéré. Il faut quand même glacer les trois premiers jours, comprimer par une bande au moins 8 jours, alléger les appuis les premiers temps par du béquillage et se mettre en position déclive la nuit, une bonne semaine. Excepté pour le Haut niveau, l'imagerie n'est pas indispensable et le temps d'interruption de l'activité sportive de 4 semaines va réduire le risque de récidives quasi à néant.

Claquage des ischio-jambiers: claquage sévère avec douleurs > 6 à l'EVA et marche impossible; ecchymose retardée.
L'imagerie
Le diagnostic et la détermination du niveau de gravité d’une lésion musculaire des IJ est nous l'avons vu clinique et para clinique (importance de l'oedème+++). 
L’échographie au 4ème jour mettra en évidence l'hématome et son importance et guidera une éventuelle évacuation à l'aiguille.
L’IRM est à réserver au sportif d'élite. C'est incontestablement l'imagerie la plus performante. Elle  permet de bien préciser la localisation lésionnelle: enthèse, lésions profondes proches du fut fémoral, jonction myo-aponévrotique +++ ou myo-tendineuse.
Le traitement 
Dans un premier temps, le protocole Rice ou Grec comme détaillé plus haut dans l'article est à mettre en place dans les meilleurs délais, sans oublier la prévention d'une possible complication thrombo-embolique qui doit rester la pré-occupation majeure du praticien en cas de marche impossible.
Dans un deuxième temps, la prise en charge kinésithérapique a pour objectifs, d’optimiser la cicatrisation et de redonner au tissu musculaire ses propriétés biomécaniques et physiologiques  initiales, garantes d'un geste sportif efficient. 
Un protocole d'exercices de type excentrique sub-maximaux semble nettement supérieur au protocole classique avec étirements progressifs et renforcement musculaire concentrique en terme de délai de reprise sportive et de moindre récidive dans l'année qui suit le traumatisme.
Une étude prospective randomisée récente d’Asking (rapportée par Arnaud Douville de Franssu et Arnaud BRUCHARD) publiée dans le BJSM a comparé 2 protocoles de rééducation de lésions myo-aponévrotiques des ischio-jambiers chez des footballeurs professionnels suédois:
Un total de 75 joueurs (femmes/hommes) ayant eu avec une lésion musculaire aigue confirmée par IRM, ont été affectés au hasard à l’un des deux protocoles de rééducation suivant : 
- 37 joueurs ont été affectés à un protocole mettant l’accent sur des exercices d’allongement excentrique sub-maximaux (L-protocole) 
- 38 joueurs à un protocole comportant des exercices conventionnels de renforcement musculaire des ischio-jambiers (C-protocole). 
L’objectif principal de cette étude était de comparer l’efficacité de ces deux protocoles de réadaptation. Les autres objectifs étaient d’étudier les corrélations possibles entre les types de blessures, l’emplacement, la taille, la douleur à la palpation et le délai de retour sur le terrain.
Les résultats mesurés étaient le nombre de jours nécessaires pour revenir à 100% dans l’équipe et rejouer les matchs. Les récidives musculaires éventuelles ont été enregistrées au cours d’une période de 12 mois après le retour sur le terrain. 
Chaque protocole de réhabilitation comportait trois exercices différents (vidéos démonstratives dans l’article du BJSM) : l’exercice 1 était principalement destiné à accroître la souplesse, l’exercice 2 était un exercice combiné pour la stabilisation et la force du tronc/bassin et l’exercice 3 était plus un exercice de musculation spécifique. Tous les exercices ont été effectués dans le plan sagittal. L’intensité et le volume de travail des séances ont été faits aussi égale que possible entre les deux protocoles. Les séances ont été supervisées, au moins une fois par semaine, pendant toute la période de réadaptation, et la vitesse et la charge ont été augmentés au fil du temps. Le critère de non douleur devait être respecté sur toutes les séances. 
Rappelons aussi que:
- les massages intempestifs du foyer lésionnel sont totalement contre indiqués en phase aiguë car ils peuvent entraîner une calcification secondaire, une cicatrisation anarchique, des complications veineuses.
- Les AINS n’ont pas leur place (au moins la 1ère semaine, leurs effets minorant la phase cellulaire de l’inflammation seraient complètement contre productif.
Enfin une épine irritative d'origine vertébrale est à systématiquement à rechercher vers la 3ème semaine, à traiter manuellement et à surveiller périodiquement.
La reprise sportive
Dans une lésion myo-aponévrotique des ischio-jambiers, la reprise sportive est fortement corrélée au type de lésion (plus rapide dans un sprint-lésion que dans un strech-lésion) et au choix du protocole de rééducation. Dans l'étude sur des joueurs de football professionnels suédois, le délai moyen a été raccourci de 51 à 28 jours (45%) par substitution d’exercices de travail excentrique sub-maximal (L-protocole) à un protocole plus classique d’étirement et de renforcement musculaire concentrique (C-protocole).
Les complications possibles
- cicatrice fibreuse (elle peut être longitudinale, nodulaire, anarchique avec adhérences)
- hématome enkysté 
- myosite ossifiante
- les récidives du fait des 3 complications précédentes.
Ces complications sont responsables de douleurs résiduelles pouvant altérer le niveau sportif ou même empêcher la pratique sportive. Le risque de séquelles est d’autant plus élevé que la lésion est grave, et la fibrose cicatricielle guette tout claquage des ischio-jambiers.


Influence de l'âge
Il n'y a pas de causes autres que des dérangements intervertébraux à ces accidents musculaires et en particulier il n’existe pas de facteur alimentaire, une quelconque méforme, de mauvais entraînements, et le fractionné, ne sont en rien une cause de claquage musculaire. C'est uniquement l'activité sportive en soi qui est la cause d’une lésion musculaire et un seul élément est vrai: le sportif qui a déjà fait un claquage des IJ est plus à risque de faire un autre claquage et constitue un sujet à risque. Une mauvaise hygiène de vie, une dette de sommeil, des troubles bucco-dentaires doivent quand même être évités.
L'âge est un bon facteur causal: on fait davantage de lésions musculaires avec les années qui passent et la blessure musculaire type du sportif de plus de 45 ans n'est plus le claquage des IJ (ou celui du droit fémoral du quadriceps ou des adducteurs de cuisse, mais le tennis - leg (désinsertion musculo-aponévrotique du muscle jumeau interne qui fait l'objet d'un article à part).
Prévention
Les étirements musculaires sont recommandés. Les déséquilibres musculaires relatif doivent faire l'objet de programmes de musculations spécifiques destinés à renforcer les masses musculaires les plus faibles, cette musculation orientée intervenant toujours après une phase d'étirements des structures musculaires. Malgré tout ces étirements ne seront nullement une garantie de non récidive. Le port de cuissard de compression ne diminuera pas non plus le risque de faire une autre lésion.
La réparation
Elle débute dès la première heure post-traumatique et correspond à une phase de dégénérescence non inflammatoire. Arrive ensuite une phase de dégénérescence extrinsèque, qui elle est inflammatoire et va se traduire par un envahissement du site lésionnel par des macrophages qui vont phagocyter les fibres musculaires nécrotiques. Un oedème péri-lésionnel va limiter l’extension territoriale de l’inflammation.
La régénérescence musculaire sera possible ensuite, grâce à l’activation des cellules satellites (cellules de Mauro) présentes entre la membrane basale et le sarcolemme. Ces cellules vont subir plusieurs transformations jusqu’à devenir des myoblastes. Ces derniers vont proliférer et s’aligner sur la face interne de la membrane basale pour constituer une chaîne cellulaire. Ces myoblastes vont ensuite fusionner pour former une grande cellule polynucléée : le myotube, qui évoluera ensuite vers une fibre musculaire. L’intégrité de la membrane basale servant de charpente est capitale dans le processus de régénérescence.
On n’obtient pas toujours une restitution ad integrum du tissu musculaire, la qualité de la réparation dépendant de plusieurs facteurs :
- intégrité de la membrane basale, fonction de l’importance du traumatisme 
- vascularisation et apport en oxygène nécessaire à la prolifération cellulaire 
- innervation nécessaire à la maturation et à l’orientation métabolique des fibres (I, IIa, IIb) 
- mise en tension des fibres pour guider l’orientation spatiale de ces néofibres (intérêt de la kinésithérapie et de la marche) 
- l’âge : les muscles jeunes ont un meilleur potentiel cicatriciel que les muscles âgés et le vieillissement est indiscutablement un facteur de fragilisation du tissu musculaire.
Conclusion
Les lésions musculaires intrinsèques en général et tout particulièrement celles des IJ, sont un fléau qui intéressent au plus haut point les médecins de l'Athlé mais aussi plus généralement les confrères du rugby, football et de la danse. Si bien que la 33 ème journée de traumatologie du sport de la Pitié-Salpétrière, organisée en novembre 2015 par notre maître à tous, le Dr Jacques Rodineau (qui a formé avec le Pr Saillant, l'élite des médecins de traumatologie du sport de l'hexagone et d'ailleurs) et notre éminente consoeur Sylvie Besch, a porté sur les lésions musculaires en pratique sportive et a tout naturellement traité du problème de la reprise sportive après lésions des IJ.
D'abord le site préférentiel est le Biceps Fémoral, muscle poly-articulaire comme nous le savons tous. Les lésions des IJ sont classées en deux catégories: celles survenant à haute vélocité de course et en lien avec un changement de longueur du muscle, de meilleur pronostic, et celles survenant à basse vélocité, de type étirement par gestuelle d'amplitude extrême, hanche fléchie et genou tendu de mauvais pronostic. Le taux de récurrence (récidives) est en effet très élevé et peut aller jusqu'à 31% dans les 12 mois après la blessure initiale. Les causes de ces récidives: une fatigue persistante par faiblesse excentrique, un manque d'élasticité de la cicatrice fibreuse, une modification de la biomécanique de course, une atrophie persistante du muscle lésé et dans mon expérience, une non prise en compte du SCTPM de Robert Maigne sur les métamères L5 ou S1 en rapport avec uns dysfonction vertébrale L4-L5 ou L5/S1. De façon surprenante, la gravité de la lésion musculaire initiale n'est pas un facteur péjoratif.

Etablir, non pas le diagnostic positif de lésion musculaire en règle facile à faire, mais plus précisément la gravité de la lésion, est primordial, afin d'informer le blessé et le staff technique sur la durée de l'indisponibilité sportive, en se basant sur les 4 éléments cliniques évoqués plus haut: 
- importance de la douleur à l'EVA
- proximité du pic douloureux par rapport à l'insertion haute (proximale) ischiatique des IJ
- impotence fonctionnelle immédiate
- présence d'une dysfonction lombaire basse avec SCTPM de Robert Maigne sur les métamères L5 ou S1 et 1 élément para- clinique: l'importance de l'oedème à l'imagerie et en premier à l'échographie pour sa grande disponibilité, son faible coût et son caractère dynamique, à condition d'avoir à la fois un appareil d'échographie performant et un opérateur entraîné pour éviter de nombreuses erreurs susceptibles de le discréditer, alors que cette technique présente l'immense avantage de permettre le diagnostic et l'évacuation à l'aiguille d'un hématome collecté, mais aussi d'assurer le suivi évolutif en montrant l'aspect morphologique des remaniements et grâce à l'effet Doppler, de permettre mieux que l'IRM d'affirmer plus facilement qu'une cicatrisation est acquise. Enfin à un stade chronique et grâce aux épreuves dynamiques, elle permet de dépister les troubles de mobilité, les limitations de glissement entre les différents muscles et les phénomènes d'attraction très souvent responsables de douleurs séquellaires. Pour des raisons finalement plus stratégiques que médicales, on réserve l'IRM au sportif de haut niveau et aux lésions potentiellement chirurgicales représentées par les atteintes proximales des IJ. On rappelle que l'IRM n'apporte aucun élément prédictif de reprise sportive possible ou de récidive. Malgré tout c'est encore une fois la clinique qui est essentielle, non seulement pour établir le premier bilan, suffisant pour la mise en route d'un traitement ciblé et pour la prescription du calendrier de l'imagerie la plus adéquate, mais aussi pour le suivi répété de la blessure musculaire (à mobiliser très précocement) pendant la phase de rééducation et de reprise progressive, avec un impératif qui est celui de préserver la condition physique par des programmes d'entretien physique du blessé, afin de ne pas rallonger la phase d'indisponibilité sportive pendant la réparation tissulaire en lui rajoutant une phase de retour à un niveau de forme antérieur. En conclusion, on ne peut pas se baser entièrement sur l'imagerie, pour décider de la reprise sportive. 
A souligner l'importance d'une mobilisation précoce de la blessure, d'un entretien de la condition physique générale et d'un bon programme de rééducation auprès de kinésithérapeutes expérimentés, sans pouvoir conclure sur la supériorité d'un type de programme sur un autre, et finalement dans l'état actuel de nos connaissances, les récidives au niveau des IJ ont encore de beaux jours devant elles tant que nous médecins  de traumatologie du sport n'auront pas à disposition des techniques d'imagerie capables de mesurer les capacités structurelles et mécaniques des fibres musculaires lésées. 
La recherche d'un déséquilibre isocinétique IJ / Q < 0,8 et leur correction et la traque aux dysfonctions vertébrales lombaires basses générées par un dysentraînement (excés de charges lourdes dépassant les capacités de résistance des disques intervertébraux lombaires bas) et leur prise en charge sont la meilleure des préventions possible.

Les épicondylites et autres douleurs du coude

Dans la vie professionnelle les épicondylites font partie des troubles musculo-squelettiques (TMS). Ces TMS sont considérés par l'Assurance Maladie comme un véritable problème de santé publique et pris en charge au titre des maladies  professionnelles N° 57B. 
Dans la pratique sportive les  troubles musculo-squelettiques du coude touchent préférentiellement les sportifs de raquette et de golf.


I/ QUELQUES MISES AU POINT
1- Au terme de tendinite il faut préférer celui de tendinopathie qui va de l'enthèse (insertion osseuse du tendon) jusqu'à la jonction tendino-musculaire et à celui d'épicondylite latérale ou médiale devenu trop limitatif, il faut préférer le terme d'épicondylalgies du fait de la quadruple participation étiologique potentielle.
2- Longtemps, une douleur chronique du coude latérale ou médiale d'origine microtraumatique se résumait à une atteinte d'un tendon le plus souvent épicondylien latéral et à un seul signe clinique, une douleur à la palpation.
3- Actuellement on ne peux parler de tendinopathie qu'en présence de la triade clinique classique:
- douleur provoquée à la contraction isométrique résistée
- douleur à l'étirement
- douleur à la palpation du tendon lésé.
4- Des études anatomiques sur cadavre ont permis d'individualiser que l'insertion tendineuse des muscles épicondyliens latéraux se fait en feuillet de livre avec une lame aponévrotique superficielle englobant le tendon commun au 2ème radial et à l'extenseur commun des doigts et une lame profonde épaisse englobant en particulier le chef superficiel du court supinateur, ce qui  justifie quand une indication chirurgicale est posée de recourir à une double aponévrotomie, le chirurgien se guidant  la fois sur le testing tendineux clinique et sur les examens complémentaires.

       

5-Triade clinique symptomatique d'une épicondylite du coude:
1- Douleur à la palpation du tendon épicondylien latéral ou médial lésé.
2 - Douleur à la manoeuvre spécifique de contraction isométrique contre résistance du tendon lésé  (résistance à l'extension du poignet pour le 2è Radial et à l'extension des doigts pour l'Extenseur Commun : très précisément sur P1 des 3ème et 4ème doigts qui n'ont pas d'extenseur propre etc) .
3- Douleur à la manoeuvre spécifique d'étirement du tendon lésé (manoeuvre de Mills pour l'épicondylite latérale).
6- Les 4 Stades fonctionnels de Blazina d'une tendinopathie:
- Stade 1: douleur du tendon hyper-sollicité ressentie après l'effort et cédant complètement.
- Stade 2: douleur en début d'effort puis qui disparaît et peut réapparaître à la fatigue si l'effort se prolonge dans le temps.
- Stade 3: douleur permanente (et donc d'allure pseudo inflammatoire) qui constitue une atypie clinique.
Stade 4 : rupture du tendon avec impotence totale et signes cliniques spécifiques de perte de continuité tendineuse.

       
                                                             Stade 4 de BLAZINA à l'IRM

II/ EPIDÉMIOLOGIE
Les populations exposées sont celles qui ont une gestuelle répétitive du poignet et de la main liée à: 
1- Une pratique sportive: population  jeune; sports de raquette (tennis++), golf; lésion unilatérale sur le bras dominant; responsablité du matériel (technopathie); sur le plan étiologique la tendinopathie est prédominante; sur le plan anatomique elle prédomine sur le feuillet superficiel et sur le plan histologique elle est d'origine dégénérative (contrairement aux lésions de la coiffe des rotateurs de l'épaule qui sont plutôt de nature inflammatoire).
Préférer sur le plan thérapeutique, les antalgiques aux AINS, mais les infiltrations de dérivés cortisonés restent efficaces au moins dans les stades précoces 1 et 2 de Blazina.


2- Une pratique professionnelle dont les mécanismes lésionnels sont les mouvements de préhension-extension-flexion et de pro-supination (Tableau No 57 B des maladies professionnelles) et à une pratique ménagère et de loisirs comme le jardinage et le bricolage.
Ce sont les cas les plus nombreux; la population est plus âgée; les lésions sont souvent sur les 2 feuillets aponévrotiques; elles sont bilatérales; la participation de l'articulation huméro-radiale est constante; les atypies cliniques sont nombreuses.


           Epicondylite professionnelle Tableau 57B des Maladies Professionnelles

III/ PHYSIOPATHOLOGIE
1-  L' épicondyle latéral est une apophyse de traction qui subit à l'effort des contraintes importantes de la part des insertions des muscles épicondyliens par un tendon commun composé de 2 lames aponévrotiques, une superficielle et une profonde.
La contrainte mécanique apophysaire se complète par une contrainte associée des articulations adjacentes huméro- radiale et radio- ulnaire supérieure et une compression dynamique lors de la pro-supination du nerf interosseux postérieur dans le tunnel radial ou au niveau de l'arcade superficielle du muscle court supinateur souvent épaissie (arcade de Fhröse).

          


2- Les épicondylalgies médiales sont 10 fois moins nombreuses que les latérales, les contraintes musculo-tendineuses des épitrochléens étant bio-mécaniquement mieux réparties (à la fois sur l'apophyse mais aussi sur le cubitus).
La proximité anatomique du nerf Ulnaire dans la gouttière épitrochléo-olécranienne et contre l'arcade du muscle Cubital Antérieur rend compte toutefois de l'implication fréquente de ce nerf dans les atteintes lésionnelles médiales.

                

IV/ ORIGINALITÉ
Elle tient à la simplicité du diagnostic et de traitement, en particulier chez les sportifs: 80% de guérison dans un temps inférieur à 4 mois ( Génety 1975 et GEEC 2002).
Par contre, dans la population tout venant (plus âgée), le diagnostic et le traitement s'avère plus difficile du fait de pathologies potentiellement intriquées (vertébrale cervicale, huméro-radiale et syndrome canalaire).
L'existence de diagnostics différentiels :
- post entorse des ligaments latéraux du coude
- syndrome du défilé thoraco-brachial
- ostéome ostéoïde du col du radius
- syndrome des loges de l'avant bras
- autres syndromes canalaires du Médian (nerf interosseux antérieur); du nerf Musculo Cutané et du nerf Brachial Cutané interne.
- ostéodystrophies de croissance du coude de l'enfant (maladie de Panner) et de l'adolescent  sportif (ostéochondrite disséquante) des jeunes lanceurs de javelot, des jeunes gymnastes.
- pathologie inflammatoire ou arthrosique articulaire du coude à démembrer par la clinique et des examens complémentaires simples.
V/ LES EPICONDYLALGIES D'ORIGINE VERTEBRALE CERVICALE
Rappel anatomique
Le membre supérieur est entièrement innervé par les branches du plexus brachial issues des branches antérieures des nerfs rachidiens de C5 à T1:
1- Les branches postérieures du Nerf Rachidien sont à l'origine :
- de contractures para-vertébrales d'origine inter-segmentaire  C5 à T1
- d'un trouble du mouvement intervertébral localisé accessible à l'examen clinique du rachis cervical
- de la cellulalgie inter-scapulaire à rechercher par le palpé roulé en dedans des omoplates.
2 - Les branches antérieures du Nerf rachidien sont à l'origine:
- des névralgies cervico-brachiales C5 à T1
- ou de leur forme atténuée la cervicobrachialgie avec Lasègue cervical
- ou très souvent de la forme projetée le syndrome cellulo-téno-périosto-myalgique de Maigne (SCTPM) sur un même métamère (douleur référée).
Expression des SCTPM au niveau du coude
Le SCTPM s'exprime par une tendinalgie et une cellulalgie de localisation différente suivant la racine impliquée:
- racine  C5: tendinalgie bicipitale et cellulalgie sus épicondylienne latérale
- racine C6: épicondylalgie latérale et cellulalgie latérale sous épicondylienne latérale
-  racine C7: cellulalgie et tendinalgie de l'olécrâne
- racine C8 et T1: épicondylalgie et cellulalgie médiale sous et sus épitrochléenne
Autres syndromes s'exprimant au niveau du coude
1- Les syndromes lésionnels des 3 troncs primaires du plexus brachial
 ( macrotraumatiques: accident de moto très souvent).
2- Le syndrome thoraco-brachial ou du défilé des scalènes avec intrication de signes vasculaires.
3- Les syndromes canalaires potentiellement intriqués dans les épicondylalgies:
 - essentiellement du nerf interosseux postérieur (NIP) du radial
- du nerf ulnaire (cubital ): douleur du bord interne de l'avant bras et signe de Froment de la pince pouce - index
-  plus accessoirement du nerf interosseux antérieur (NIA) du médian des 3 muscles sous épitrochléens. Le NIA étant un nerf moteur pur avec signe de la pince carrée pouce - index en cas d'atteinte lésionnelle.
VI/ EVALUATION CLINIQUE
L'interrogatoire est d'une importance capitale pour rechercher :
- les stades de Blazina
- les atypies cliniques : 
1- en particulier le Blazina 3 et sa douleur permanente pseudo inflammatoire.
2- les signes articulaires (souris articulaire, craquements, pseudos blocages fugaces ) en général plus aigus, sans irradiation, majorés par les mouvements du coude. 
3- les signes canalaires : maladresse et faiblesse du geste, douleur nocturne, douleur irradiée vers le haut et surtout sur le bord externe de l'avant bras avec hypoesthésie du dos du carpe très précoce (le NIP n'est pas uniquement un nerf moteur et il ne pas faut pas attendre les signes de déficit moteur qui sont tardifs).
L'examen 
après le temps de
- l'inspection
- de l'étude de la mobilité et de la stabilité du coude,
- il est indispensable de pratiquer un testing analytique isométrique des différents tendons contre résistance et d'élargir le testing en cas de syndrome canalaire aux autres muscles non épicondyliens innervés soit par le NIP, soit par le nerf Ulnaire, voire par le NIA du Médian.

               
                             Testing isométrique contre résistance du Rond Pronateur

- Terminer par la palpation et la percussion soigneuse des différentes structures anatomiques du coude.
Enfin, un examen du rachis cervical qui peut être même inaugural tellement l'étiologie vertébrale est quasiment constamment présente avec recherche d'un signe de Lasègue cervical, de cellulalgies et de tendinalgies métamériques.
VII/ EN CONCLUSION : 6 IDÉES FORTES À RETENIR
1- Une douleur projetée dans le coude d'origine vertébrale cervicale le plus souvent C5/C6 (syndrome cellulo-téno-périosto-myalgique de Robert Maigne: SCTPM) ou un dérangement fonctionnel huméro-radial ou radio-ulnaire proximal peut précéder de plusieurs mois ou années l'épicondylalgie, en faire le lit et pérenniser la pathologie, en particulier dans les formes professionnelles.
2- Une épicondylalgie latérale ou médiale du coude est une urgence médico-chirurgicale: médicale à ses débuts et pour ne pas perdre de temps, strictement du ressort d'un médecin capable de bien maîtriser le traitement des étiologies potentielles (en particulier manipulations vertébrales cervicales très efficace avec respect des règles de sécurité bien codifiées par Maigne et Vautravers; infiltration de l'enthèse et ou articulaire du coude; traitement par acide hyaluronique, toxine botulinique ou par injection de PRP) après bilan initial simple par radiographies et échographie.
3- L'évolution d'une épicondylalgie doit être rapidement favorable dans des délais inférieurs à 2-3 mois.
4- Toute atypie clinique ou toute résistance à un traitement médical bien conduit doit vite conduire à un avis, puis à un geste chirurgical spécialisé, après bilan complémentaire du seul choix du chirurgien ( IRM, EMG, etc ) guidé par la clinique.
La double aponévrotomie chirurgicale, souvent justifiée, lève la traction sur l'apophyse et décomprime en parallèle l'articulation huméro- radiale et le tunnel radial et cela peut s'avérer suffisant s'il n'y a pas eu de perte de temps.
5- Tout retard expose à l'extension de la lésion tendino- périostée à l'os sous- jacent, à une souffrance huméro-radiale ou radio ulnaire organique, à des signes de déficit moteur du NIP radial dans les formes latérales ou du nerf ulnaire dans les formes médiales qui seront autant de facteurs péjoratifs qui compliquent le geste opératoire qui ne pourra entièrement régler la maladie régionale et qui peuvent conduire au reclassement professionnel ou à une baisse du niveau sportif ou simplement à l' impossibilité d'exercer des activités d'agrément.
6- Surveiller et traiter préventivement le rachis cervical et la dysfonction articulaire de voisinage (avec infiltration huméro- radiale si besoin précédée par le test à la xylocaine) des populations à risque.
Nouvelles approches thérapeutiques médicales de la tendinopathie des épicondyliens 
David Gasq du service d' Explorations Fonctionnelles Physiologiques au CHU Rangueil et Olivier  Ucay du service de Médecine Physique et Réadaptation, CHU Rangueil ont passé en revue les différentes thérapeutiques dans le traitement de la tendinopathie des épicondyliens:
1- La rééducation
Elle est largement utilisée dans la prise en charge de la tendinopathie épi- condylienne (TE). Les étirements des muscles épicondyliens, associés à des massages transverses profonds et à de la physiothérapie antalgique montre une efficacité modérée. Le travail musculaire excentrique a montré une efficacité à moyen terme (plus de 6 semaines) par rapport à une rééducation plus classique. Elle doit être associée à un arrêt des sollicita- tions tendineuses excessive pour apporter un bénéfice à la prise en charge. 
2- Les infiltrations de corticoïdes 
Elles sont efficaces à court terme (6 semaines). Leur indication est controversée en raison d’un fort pourcentage de récidive au delà de 3 mois, et d’un résultat à long terme inférieur aux étirements associés à un travail excentrique. Leur indication éventuelle reste limitée au début de la prise en charge afin de passer un cap douloureux, avant de pouvoir débuter la ré- éducation. 
3- La médecine manuelle-ostéopathie 
Les épicondylalgies latérales d’origine cervicale liées à un dysfonctionnement métamérique C5-C6 relèvent d'un traitement par manipulation vertébrale élective du segment cervical C5/C6, associées à des techniques manuelles articulaires locales sur le coude. 
4- Le Monoxyde d’azote 
L’application de patch de trinitrine en regard des épicondyliens permet un passage transcutané de métabolites se transformant en monoxyde d’azote ou NO au sein du tendon. Le NO entraine une activation des fibroblastes favorisant la synthèse de collagène. En parallèle d’une prise en charge ré- éducative (étirements et renforcement musculaire), l’application de patch de trinitrate de glycérine (1,25 mg/24 heures) durant 6 mois a montré une amélioration des douleurs dès la 2e semaine, avec une amélioration de la force musculaire à 3 mois. Un suivi à 5 ans montre que les patients présentent toujours des douleurs, mais très nettement diminuées par rapport à l’évaluation initiale. Ce traitement semble donc intéressant en association avec la rééducation pour potentialiser les effets à court et moyen terme, mais ne modifie pas l’évolution à long terme. 
5- Les ondes de choc (oDc) extra-corporelles
Ce sont des ondes acoustiques, focales ou radiales, appliquées en regard des structures à traiter. Leurs mécanismes d’action sont proches de ceux des massages transverses profonds : libération locale d’endorphines ou de substances inhibitrices de la douleur, inflammation locale avec accroissement de la vascularisation et des processus de réparation tissulaire. Les résultats de la littérature restent discordants. Ce traitement ne doit en tout cas jamais être proposé sans une prise en charge rééducative associée, et doit être appliqué dans des conditions optimales. Il s’agit probablement d’un traitement de dernier recours en l’absence de preuve suffisante d’efficacité. 
6- L’injection in situ de plasma riche en plaquettes (PRP) autologues 
L’injection in situ de plasma riche en plaquettes (PRP) autologues ou de sang total autologue se développe dans la prise en charge de la TE depuis une dizaine d’années. L’obtention du PRP s’effectue en centrifu- geant un prélèvement sanguin autologue. Il existe une libération de facteurs de croissance par les plaquettes, qui permettent de stimuler la prolifération cellulaire et de relancer les processus de cicatrisation. L’injection de sang autologue est plus simple en terme de procédure et repose sur le même concept. L’injection de PRP a montré une amélioration supérieure à une injection de corticoïdes, à court terme et jusqu’à 2 ans, en termes de diminution de la douleur et d’amélioration de la fonction, en présence de TE chroniques. L’injection de sang autologue a une efficacité supérieure à une injection de corticoïdes à 8 semaines pour certains, alors que d’autres montrent une absence d’efficacité par rapport à un placebo, entre 2 semaines et 6 mois. Au total, l’utilisation du PRP (et peut être du sang autologue) en association avec un programme rééducatif, semble intéressante en présence d’une TE résistante au traitement initial, avec des résultats encourageants à court, moyen et long terme. 
7- L’injection locale de gel d’acide hyaluronique 
C'est une nouvelle option thérapeutique dans la TE. Des études animales ont suggéré le rôle de l’acide hyaluronique sur l’amélioration de la cicatrisation tendineuse. Une étude randomisée et contrôlée a montré une amélioration significative de la douleur, de la force musculaire, de la fonction et des possibilités de reprise du sport très en faveur des injec- tions du gel d’acide hyaluronique, à 1 mois, 3mois et 1 an. L’utilisation des gels d’acide hya- luronique pourrait donc être une alternative thérapeutique intéressante étant donné des premiers résultats encourageants avec des effets secondaires limités. 


8- L’injection intramusculaire de toxine botulique A 

Ces injections dans les muscles extensor carpi radialis brevis (ECRB) et extensor digitorum communis (EDC) des 3e et 4e doigts essentiellement, se développe dans la prise en charge de la TE. La toxine botulique agit au niveau des plaques motrices en bloquant la libération d’acétylcholine, ce qui diminue les capacités contractiles du muscle, mais présente égale- ment des propriétés antalgiques propres. La parésie induite permettrait une décharge rela- tive du tendon des épicondyliens, suivi d’une remise en charge progressive au fur et a me- sure de la diminution des effets de la toxine. Le principal effet secondaire de ce traitement est la perte de force de serrage et la difficul- té d’extension des 3ème et 4ème doigts que présentent certains patients. L’injection de toxine botulique (30 à 40 unités Botox dans l’ECRB) semble aussi efficace qu’une prise en charge chirurgicale en cas de TE chronique résistante aux traitements médicaux, avec environ 30 % d’amélioration à 3 mois, 60 % à 6 mois, 80 % à 1 et 2 ans. L’injection de toxine botulique semble être un traitement efficace de la TE chronique résistante aux autres approches médicales, qui peut être proposée en alternative à la chirurgie.