Proposition d’un protocole de prévention des blessures en Gymnastique
Préalables
La Gymnastique est avec l’Athlétisme un des 2 sports dits de base, parce qu’ils sollicitent l’ensemble des qualités physiques de vitesse, force, adresse, souplesse et coordination. Mais si la pratique de ces deux activités sportives reines effectuées de manière régulière et modérée est garant d’une bonne santé, il en en autrement lorsqu'elles sont pratiquées à haut niveau ou de manière intensive. Ils sont alors source d’une traumatologie susceptible d’affecter la totalité des structures liées au mouvement, aussi bien le squelette osseux, que les articulations et leur système d’amortissement ligamentaire et tendino-musculaire.
Tous sports confondus, il faut savoir que 50% des blessures observées chez les sportifs sont des blessures de surcharge, liées à une évolution de la pratique sportive chez les jeunes:
- spécialisation précoce
- saisons de plus en plus longues
- absence de coupure entre les saisons
- engagement dans plusieurs équipes
- pression de l’entourage
A coté des traumatismes sportifs par mécanisme lésionnel unique et violent et signes cliniques immédiats, il existe de plus en plus des lésions plus sournoises de sur-utilisation comme les tendinopathies, les fractures de fatigue et les ostéochondroses chez les plus jeunes.
Une enquête épidémiologique nationale sur plus de 7000 dossiers sur la traumatologie liée à la pratique sportive a mis en évidence que les lésions traumatiques, les plus fréquentes sont :
- les entorses : 25%
- les lésions musculaires (contusions, contractures, élongations, déchirures) : 23%
- les tendinopathies : 22%
- les fractures 5%
- les luxations sont peu fréquentes et restent des « urgences chirurgicales » avec dégâts capsulo-ligamentaires importants et complications vasculo-nerveuses potentielles.
En ce qui concerne l’étiopathogénie des traumatismes sportifs, les principales causes sont :
- une technique gestuelle imparfaite
- la surcharge de travail
- les surfaces de jeu
- le matériel inadapté
- un échauffement mal conduit
- des erreurs grossières dans la préparation physique.
La lésion la plus fréquente est l’entorse de cheville (favorisée par une hyperlaxité globale) et à ce propos, un consensus médical a permis d’édicter un certain nombre de règles: les règles d’Ottawa, qui, si elles sont appliquées, évitent la prescription de radiographies, parfaitement inutiles sur des lésions le plus souvent bénignes (simple foulure).
Pour une lésion donnée, il existe un médecin adéquat et bien formé et cela va des médecins généralistes, dont un certain nombre, sportifs eux mêmes, se sont bien formés aux spécificités de la traumatologie du sport, bien secondés par les kinésithérapeute de proximité, jusqu'aux spécialistes hospitaliers de haut niveau.
Si, en Athlétisme on dispose de données épidémiologiques relativement précises sur les blessures, il n'en est pas de même en Gym, ou il semblerait qu'une majorité des blessures soient des lésions d’hyper-utilisation par répétition d’une gestuelle exécutée de manière intense sur des structures qui n’arrivent plus à s’adapter.
Cela peut se traduire de manière aigüe :
- par des entorses (cheville++ et règles d’Ottawa, genou et lésions du pivot central, poignet et entorses intrinsèques scapho ou pyramido-lunaires, coude et ligament collatéral interne)
- des accidents musculaires de gravité variable (élongations, déchirures, claquages, ruptures)
- des arrachements osseux apophysaires chez les plus jeunes (les apophyses n’étant pas encore soudées au bassin constituent un point faible dans la chaîne muscle-tendon-os).
Mais plus souvent que des lésions aigües, il va y avoir des lésions chroniques de surcharge comme
- les ostéochondroses chez les plus jeunes (les ostéochondroses sont des troubles de l'ossification de l'enfant liées aux activités physiques par souffrance du cartilage de croissance. Ce trouble de l'ossification affecte soit: les épiphyses articulaires = ostéochondrose articulaire, en particulier sur les zones d'appui (condyles++); avec risque de retard d'ossification, de déformation par vice architectural ( hanches++), de pseudarthroses, de nécroses avec évolution vers une ostéochondrite avec géodes et séquestre.
Principales localisations épiphysaires:
- ostéochondrose vertébrale = maladie de Scheuermann
- ostéochondrose du scaphoïde tarsien = maladie de Koler- Mouchet
- ostéochondrose du 2ème Métatarsien= maladie de Freiberg.
Les ostéochondroses peuvent également affecter les zones extra articulaires métaphysaires intermédiaires ou le plus souvent les zones apophysaires ++ avec risque de noyaux d'ossification dans les tendons d'insertion ou de non soudure des apophyses ou décollements apophysaires.
Principales localisations apophysaires :
- ostéochondrose de l'apophyse postérieure du Calcanéum = maladie de Sever,
- ostéochondrose de la tubérosité tibiale antérieure du tibia = maladie d'Osgood-Schlatter,
- ostéochondrose de la pointe de la rotule = maladie de Sinding-Larsen-Johanson .
- les tendinopathies bien prise en charge par le protocole excentrique de Stanish qui comporte durant six à douze semaines, des séances quotidiennes d’exercices de freinage du tendon concerné.
Au début, ils sont initiés par un kinésithérapeute qui apprend au malade à les réaliser correctement.
Cette méthode excentrique est la seule qui stimule la synthèse du collagène et permet la réorganisation du tissu tendineux. De nombreux travaux scientifiques publiés dans les plus grandes revues médicales ont confirmé l’excellence des résultats chez des malades réellement motivés.
Dans les tendinopathies rebelles, un traitement par PRP peut être indiqué. Ce sont des substances présentes dans les plaquettes sanguines agissant comme activateurs de la cicatrisation de différents tissus. Le procédé consiste à prélever du sang du malade puis à le centrifuger afin d’obtenir un plasma contenant une forte concentration en plaquettes (sans globules rouges ni globules blancs). Ce plasma concentré en plaquettes est ensuite injecté dans et autour du tendon.
Le protocole comporte une à trois injections à une semaine d’écart. Les nombreuses études internationales rapportent de bons résultats à long terme, mais dans des proportions très variables. Cette méthode connaît un fort essor afin de tenter de favoriser une reprise rapide des activités mais doit être encore mieux évaluée.
- les fractures de fatigue comme la spondylolyse avec spondylolisthésis. Cette spondylolyse de l’isthme vertébral de L5 surtout, ou de L4, affecte 7% de la population générale en particulier masculine et s’accompagne d’un glissement vers l’avant du corps vertébral et de l’arc vertébral postérieur (spondylolisthésis) dont la traduction clinique variable va de rien du tout à une lombalgie voire une névralgie sciatique. Ce pourcentage passe de 7 à 20% dans les sports dits «lordosants» comme la gymnastique.
Enquête épidémiologique spécifique Gym
Un des rôles de la commission médicale de la FFGym est aussi d’essayer de prévenir les blessures spécifiques et si l’on veut être pertinent, il est nécessaire (en se calquant sur ce qui est fait en Athlétisme avec le décathlon de la prévention des blessures), de connaître au préalable de manière très précise, l’ensemble des blessures. Pour ce faire la commission médicale nationale propose que chaque entraîneur d'un pôle Gym en collaboration avec son staff médical liste de manière exhaustive et documentée toutes les blessures et ensuite les fasse remonter à la commission.
Proposition d’un protocole de prévention des blessures spécifiques Gym
A partir de ces données épidémiologiques ciblées, la commission collaborera avec un entraîneur expert à la réalisation d'un vidéo clip de 10 exercices de prévention spécifique Gym avec possibilité de variantes, à intégrer dans la préparation de tous les gymnastes et plus spécialement en début d’échauffement et à répéter lors de tous les échauffements (aux entraînements comme en compétitions). Ce protocole de 10 exercices sur vidéoclip aura une durée de 1mn 30 et les explications des exercices qui vont avec feront l'objet d' un second vidéo-clip de 12 minutes.
Les 2 vidéo-clips seront adressés à tous les pôles Gym de manière à ce que les gymnastes y trouvent leur intérêt, l’idéal étant d’incorporer en début d’échauffement tous les exercices préconisés.
Ensuite il s’agira de déterminer si l’application du protocole de prévention impacte de manière significative le nombre et la gravité des blessures et si oui, les vidéo-clips pourraient être diffusés alors à tous les clubs.