Avis à lire par tous les lecteurs:

Les premiers articles du blog "Un médecin du sport vous informe" datent de 2013, mais la plupart sont mis à jour pour pouvoir coller aux progrè médicaux. Ce blog inter-actif répond à la demande de nombreux confrères, kinésithérapeutes, étudiants en médecine et en STAPS, patients et sportifs. Il est le reflet de connaissances acquises tout le long de ma vie professionnelle, auprès d'enseignants remarquables, connaissances sans cesse actualisées que je me suis efforcé de rendre accessibles au plus grand nombre par le biais d’images trouvées sur le Net, images qui sont devenues par la force des choses, la propriété intellectuelle de tous; si cela dérange, ces images seront retirées.

Certains articles peuvent apparaître un peu plus polémiques que d'autres et indisposer, mais il n'est pas question pour l'auteur de tergiverser ou de se taire, quand il s'agit de problèmes d'éthique, en particulier en matière de dopage et quand la santé des sportifs est en jeu, compte tenu du nombre élevé de blessures liées au surentraînement et à une pratique imbécile d'une certaine musculation, qui n'est plus au service de la vitesse et de la force explosive utile (et non de la force maximale brute), qui sont les deux qualités physiques reines, qui ne respecte pas les règles de la physiologie musculaire et qui, au lieu d'optimiser la performance, fait ressembler certains sportifs body-buildés à l'extrême, davantage à des bêtes de foire gavées aux anabolisants, qu’à des athlètes de haut niveau.

Ce blog majoritairement consacré à la traumatologie sportive, est dédié à mes maîtres les Prs Jacques Rodineau, Gérard Saillant et à tous les enseignants du DU de traumatologie du sport de Paris VI Pitié Salpétrière et en particulier aux docteurs Jean Baptiste Courroy, Mireille Peyre et Sylvie Besch. L'évaluation clinique y tient une grande place: "la clinique, rien que la clinique, mais toute la clinique" et s'il y a une chose à retenir de leur enseignement, c'est que dans l'établissement d'un diagnostic, l'examen clinique, qui vient à la suite d'un bon interrogatoire, reste l'élément incontournable de la démarche médicale. Toutefois dans le sport de haut niveau et guidé par la clinique, l'imagerie moderne est incontournable : radiographie conventionnelle, système EOS en trois dimensions pour les troubles de la statique rachidienne, échographie avec un appareillage moderne et des confrères bien formés, scanner incontournable dans tous les problèmes osseux et enfin IRM 3 Tesla, le Tesla étant l'unité de mesure qui définit le champ magnétique d'un aimant; plus le chiffre de Tesla est élevé et plus le champ magnétique est puissant ("à haut champ") et plus les détails des images sont fins et la qualité optimale.

Hommage aussi au Pr Robert Maigne et à son école de médecine manuelle de l'Hôtel Dieu de Paris ou j'ai fais mes classes et actuellement dirigée par son fils, le Dr Jean Yves Maigne. Je n'oublie pas non plus le GETM (groupe d'étude des thérapeutiques manuelles) fondé par le Dr Eric de Winter et ses enseignants, tous des passionnés; j'y ai peaufiné mes techniques et enseigné la médecine manuelle-ostéopathie pendant 10 années.

Dr Louis Pallure, médecin des hôpitaux, spécialiste en Médecine Physique et Réadaptation, médecin de médecine et traumatologie du sport et de médecine manuelle-ostéopathie, Pr de sport et musculation DE, ex médecin Athlé 66, comité départemental 66, ligue Occitanie et Fédération Française d’Athlétisme, médecin Etoile Oignies Athlétisme.

vendredi 26 juillet 2013

Prise en charge chirurgicale des tendinopathies de coiffe et de l'instabilité d'épaule et cas particulier des prothèses d'épaule.

Une fois l'indication opératoire légitimement posée, la prise en charge chirurgicale d'un certain nombre de tendinopathies, d'épaules instables et d' omarthroses, ont fait l'objet d'une mise au point par la haute autorité de santé (HAS) sur la base d'un accord professionnel. 
I - Prise en charge chirurgicale des tendinopathies
En l’absence d’un niveau de preuve satisfaisant (séries de cas, comparaison de séries de cas, deux essais contrôlés réunis dans une méta-analyse), la haute autorité de santé (HAS) a émis en 2008 des recommandations fondées sur un accord professionnel à propos de la prise en charge chirurgicale des tendinopathies rompues de la coiffe des rotateurs de l’épaule chez l’adulte une fois l’indication opératoire posée. L’absence de gradation ne signifiant pas que les recommandations ne sont pas pertinentes et utiles.
Rappel anatomo-clinique
La coiffe des rotateurs de l’épaule est un élément musculaire stabilisateur dynamique de l’articulation gléno-humérale, comprenant d’avant en arrière à leur insertion humérale sur le tubercule mineur (trochin) et sur le tubercule majeur (trochiter): sous-scapulaire et sus-épineux, sous-épineux et petit rond. La rupture tendineuse de la coiffe des rotateurs est définie comme une solution de continuité d’un ou plusieurs tendons de la coiffe des rotateurs, survenant le plus souvent dans le cadre de l’évolution d’une tendinopathie chronique dégénérative, symptomatique ou non, les ruptures aiguës sur tendon antérieurement sain étant exceptionnelles.
Une rupture transfixiante est définie comme une solution de continuité intéressant la totalité de l’épaisseur du tendon.
Une rupture partielle n’affecte pas la totalité de l’épaisseur du tendon.
L’histoire naturelle 
L'historique des tendinopathies rompues de la coiffe des rotateurs n’est actuellement que partiellement connue. La prévalence et l’importance des ruptures dégénératives des tendons de la coiffe des rotateurs suggèrent une progression lésionnelle au cours du temps et ne sont pas toujours symptomatiques. Il n’y a pas de parallélisme anatomoclinique. Douleur et incapacité pouvant correspondre à un état inconstant ou transitoire dans l’histoire naturelle des tendinopathies rompues.
Le diagnostic pré-opératoire 
Il est est du ressort de l'imagerie.
La prise en charge chirurgicale
L'intervention chirurgicale est effectuée a ciel ouvert, ou le plus souvent par voie arthroscopique; les principales étiologies relevant de la chirurgie sont les suivantes:
- tendinopathies rompues: la prise en charge chirurgicale est conceptuellement logique dans un but de récupération fonctionnelle, en cas d’épaule douloureuse s'accompagnant de faiblesse ou de raideur incapacitante et après échec du traitement conservateur.
- tendinopathies calcifiantes subintrantes
- omarthroses
- épaules instables récidivantes.
Les techniques non chirurgicales: elles sont diverses et parmi elles les injections de PRP semblent promises à un bel avenir (voir l'article spécifique consacré aux PRP).
Les techniques chirurgicales 
1- la chirurgie « non réparatrice » ou débridement à visée antalgique porte sur la bourse sous-acromiale, le ligament coraco-acromial, la face inférieure de l’acromion, l’articulation acromio-claviculaire et le tendon du muscle long biceps brachial.
Elle comporte un ensemble d’actes dont les principaux sont : l’acromioplastie, la bursectomie sous-acromiale, la régularisation des lésions tendineuses, la résection du ligament acromio-coracoïdien, la ténotomie ou la ténodèse du long biceps et les gestes sur l’articulation acromio-claviculaire. Il est recommandé de réaliser cette chirurgie non réparatrice ou débridement par des techniques sous arthroscopie.

a- l'Acromioplastie isolée
Elle est rare; on peut y associer la résection de la clavicule externe; dans cette indication le conflit d'épaule est pur et il n'y a pas de tendinopathie associée; à l'imagerie, l'acromion est agressif et souvent crochu (stades de Bigliani), l'arthrose acromio -claviculaire souvent présente avec ostéophytose inférieure qui rétréci le défilé; l'objectif de l'intervention sera de redonner de l'espace en supprimant le conflit mécanique.



b- Acromioplastie le plus souvent associée à une réparation de coiffe et à une bursectomie sous-deltoïdienne




 et une bonne analgésie post-opératoire et une écharpe simple de soutien. La mobilisation passive doit être précoce jusqu'à la zéro-position de Saha. 


mobilisations passive jusqu'à la postion de Saha


Après 6 à 8 semaines, on peut commencer la mobilisation active; à 3 mois on récupère la gestuelle complexe; au 4ème mois on récupère la gestuelle professionnelle ou sportive. Les complication de l'acromioplastie  peuvent être prévenues: en cas de résection trop importante ou si la coiffe est trop dégénérative, les élévations actives seront difficiles à récupérer.
La chirurgie réparatrice de coiffe:

La réparation est le traitement spécifique des tendinopathies rompues de la coiffe des rotateurs. Elle est indiquée si les conditions anatomiques et le contexte général le permettent : réinsertions tendineuses, transferts tendineux, lambeaux musculaires, etc. 

- la réparation par suture simple (réparation directe) se définit par la remise en contact sans tension des 2 fragments macroscopiquement sains .

Cette définition conditionne la limite de la réparabilité ou pas des ruptures dégénératives. La suture simple peut se réaliser  lors d’une chirurgie à ciel ouvert par une voie d’abord delto-pectorale ou latérale ou supérieure, par une chirurgie assistée par arthroscopie (mini-open = mélange de chirurgie à ciel ouvert et arthroscopique) avec un temps arthroscopique exploratoire et thérapeutique gléno-huméral, puis sous-acromial, auquel succède une réparation tendineuse par un abord chirurgical réduit sans désinsertion du deltoïde.

Tous ces gestes d’exploration et de réparation sont de plus en plus réalisés exclusivement par technique arthroscopique.

- la réparation par avancements myo-tendineux et lambeaux à ciel ouvert:

l’avancement myo-tendineux en direction de la rupture, a été proposé pour les ruptures étendues du supra-épineux et de l’infra-épineux n’autorisant pas une réparation directe sans tension.

Les lambeaux sont proposés pour traiter les ruptures transfixiantes étendues et non

réparables par suture ou réinsertion transosseuse sans tension.

Le principe réside dans la réalisation d’une transposition tendino-musculaire afin de combler la rupture de manière active. Les principaux lambeaux utilisés sont transposés à partir du deltoïde, du grand dorsal et du grand pectoral.

Le choix entre avancement myo-tendineux ou lambeaux dépend de l’étendue de la rupture, de l’importance de la rétraction tendineuse et du degré d’infiltration graisseuse des muscles de la coiffe dont le tendon est rompu. 
Dans les ruptures partielles, les traitements chirurgicaux proposés sont le débridement et la réparation qui  peuvent être isolés ou associés, et il est recommandé de les pratiquer par technique arthroscopique exclusive.
Malgré l’absence de données comparatives prouvant la supériorité de la réparation par rapport au débridement, il est recommandé de réparer une rupture touchant plus de 50 % de l’épaisseur du tendon plutôt que de réaliser sa simple régularisation, recommandation ne faisant pas l’unanimité.
Dans les ruptures transfixiantes accessibles à la réparation directe, les procédés de réparation par chirurgie à ciel ouvert, mini open ou par arthroscopie ont des résultats comparables à travers des séries de cas. Les trois procédés sont acceptables actuellement. En conséquence, le choix de la voie d’abord (ciel ouvert, mini open ou par arthroscopie) dépend des habitudes du chirurgien et des possibilités techniques locales.
Les indications des réparations tendineuses des ruptures transfixiantes dégénératives sont les ruptures de coiffe symptomatiques, sur épaule souple, chez un patient actif etmotivé, avec un bon état musculaire ( peu d'infiltration graisseuse de la coiffe à la classification tomodensitométrique de la dégénérescence graisseuse des muscles de la coiffe des rotateurs de Goutallier).
Si les ruptures transfixiantes sont non accessibles à la réparation directe car non réductibles sans tension ou avec une dégénérescence graisseuse, le traitement envisageable dans cette indication est le débridement par arthroscopie.
simple déchirure curable par suture simple
rupture partielle avec perte de substance nécessitant une plastie
La technique sous arthroscopie est privilégiée s'il n'y a pas de lésion du sous-scapulaire qui n'est pas visible en arthroscopie, cette technique est moins traumatisante bien que les structures soient moins abordables; la technique à ciel ouvert par voie antérieure ou latérale, expose bien les différentes structures lésées mais est beaucoup plus délabrante et retarde la rééducation;  l'intervention est suivie de la mise en place d'un attelle post opératoire pour 1 mois; le temps de cicatrisation tendineuse est long: 50% de la solidité tendineuse se récupère entre 2 et 4 mois;  le travail actif n'est entrepris qu'après 6 à 8 semaines; dans un 1er temps on procède à la récupération des amplitudes passives jusqu'à la position de Saha ce qui permet un bon réveil musculaire du deltoïde, recentre la tête humérale et protège la coiffe; dans un 2ème temps on procède à un travail excentrique  de type Stanisch.


                    rupture totale tendon et muscle sain, fonctionnellement mobile, réparation par ancrage

II- Prise en charge chirurgicale d'une épaule instable:




Les étiologies d'une instabilité d'épaule:

- la primo-luxation gléno-humérale ( faire bilan de coiffe et bilan osseux : trochiter, glène)

luxation gléno-humérale

- les luxations récidivantes (encoche sur le cliché de face, profil de glène de Bernageau à la recherche d'une lésion osseuse antérieure de la glène)



EDI (épaule douloureuse et instable) du jeune.
Le diagnostic est clinique et para clinique (imagerie).
Le traitement chirurgical à ciel ouvert expose bien les lésions.
3 techniques dominent:
- l'intervention de Bankart, réinsère le labrum et le ligament gléno-huméral inférieur.

Bankart
- la capsulorraphie  remet en tension le sous-scapulaire; pas de rotation externe (RE) de 4 à 6 semaines y compris en balnéothérapie.



- la butée de Latarjet avec la coracoïde expose à une arthrose secondaire à long terme.
La rééducation passive doit être introduite rapidement; sa progression se guide sur les douleurs; pas de RE pendant 6 semaines y compris en balnéothérapie; le travail musculaire progressif est introduit prudemment : celui des abaisseurs longs, celui des RE et RI et celui des stabilisateurs de la scapula (grand dentelé); propioception en chaîne fermée d'abord; réapprentissage de la gestuelle en ergothérapie.



Les instabilités par slap-lésions de stade 3 et 4, les instabilités neurologiques par atteinte nerveuse des nerfs sus scapulaire ou grand dentelé (EMG++), l'instabilité du long biceps dans sa gouttière peuvent faire l'objet de prises en charge chirurgicale spécifiques déjà envisagées.
Choix thérapeutique: le score ISIS et ses 6 facteurs de risque.
Le score ISIS est une aide précieuse pour choisir entre l'intervention de Bankart et la butée de Latarjet.
BALG et BOILEAU, ont codifié le Score ISIS ( Instability Severity Index Score) qui permet grâce à des facteurs pronostiques pré-opératoires d’orienter l’indication thérapeutique en faveur de l’une ou de l’autre technique; la présence de ces facteurs peut favoriser la récurrence de l’instabilité en cas d’intervention de BANKART sous arthroscopie, particulièrement s’ils sont associés:
- L’âge < 20 ans.
- Le niveau de la pratique sportive (compétition, loisir ou pas de sport)
- Le type de sport pratiqué : contact, armée-contré ou sport « calme ».
- L’hyperlaxité de l’épaule atteinte : hyperlaxité antérieure avec une rotation externe coude au corps >85° ou une hyperlaxité inférieure avec un test d’hyperabduction >20° de différentiel entre les 2 épaules.
- Une lésion osseuse de Hill-Sachs (encoche sur la tête humérale) sur la radiographie de l’épaule de face en rotation externe.
- Une lésion osseuse du rebord glénoïdien sur la Radiographie de Face (rebord fracturé ou émoussé).
Le score ISIS intègre ces six facteurs de risque en leur attribuant à chacun un nombre de points déterminé en fonction de leur gravité.
Plus le nombre de points sera haut moins l’indication de BANKART arthroscopique sera retenue et inversement.
Nous avons donc le tableau ci-dessous indicatif du nombre de points attribués :





Si le Score ISIS > 6 POINTS : Indication de Butée vissée type LATARJET.
Si le Score ISIS < 3 POINTS : Indication de BANKART arthroscopique


Si : 3 < Score ISIS < 6 POINTS : Risque de récidive du BANKART ARTHROSCOPIQUE > 10 %, nécessité de faire une butée vissée ou de réaliser un geste complémentaire avec la technique arthroscopique.Le score ISIS est de réalisation rapide avec des critères reproductibles en consultation pré-opératoire. C’est une aide précieuse pour dicter avec le patient l’indication opératoire. Toutefois, les règles qu’il applique ne permettent de façon absolu d’éradiquer tous les risques de récidive post-opératoire. D’autres critères sont importants avec notamment les traumatismes post-opératoires récurrents ainsi que le niveau de reprise des activités sportives.

III- Cas particulier des prothèses d'épaule
Deux types de prothèse sont utilisables : prothèse humérale (simple ou à cupule mobile) et prothèse totale inversée (cupule humérale concave et sphère glénoïdienne).
Cette chirurgie est exclusivement pratiquée à ciel ouvert.
La fragilité des données sur la longévité prothétique à 10 ans incite à ne pas proposer
l’arthroplastie trop tôt dans l’histoire du patient et à tenir compte de son espérance de vie
lorsque ce traitement est envisagé.Les indications sont ciblées et ne sont retenues qu'après épuisement des autres options thérapeutiques:
- pour rétablir l'indolence quand tout a échoué
- si la raideur d'épaule est incapacitante: épaules pseudoparalytiques par rupture massive de la coiffe des rotateurs
- si la rééducation bien conduite a échoué.
Chez le jeune:
- cals vicieux de la tête humérale (TH)
- ostéonécrose de la TH
Chez la personne âgée:
- omarthrose décompensée
- fractures complexes de l'extrémité supérieure de l'humérus
- coiffe dégénérative et incapacitante.
Le médecin de rééducation doit toujours disposer du compte rendu opératoire (CRO) et des consignes écrites du chirurgien+++.
1- la prothèse totale anatomique:

La prothèse totale anatomique est mobile, peu stable avec risque de descellement secondaire et nécessite un bon environnement musculo-tendineux apprécié sur l'IRM.
Une écharpe est portée en post -opératoire, pendant 3 semaines; le coussin d'abduction est porté 6 semaines en cas de suture de coiffe associée ou après fracture de l'extrémité supérieure de l'humérus complexe.
2- la prothèse inversée d'épaule


 C'est une invention géniale qui redonne au deltoïde toute son importance dans la mobilité de l'épaule bien que sidéré au début et pouvant en imposer pour une pseudo-luxation; ne pas travailler la RE si le sous scapulaire a été réparé. La bonne évolution de la mise en place d'une prothèse, se mesure sur la récupération rapide de l'indolence, une bonne mobilité passive et une coiffe efficiente. En cas d'évolution mitigée avec persistance de la raideur, il ne faut pas hésiter à poursuivre la réhabilitation passive et une stratégie de suppléances fonctionnelles. Si les douleurs persistent, il faut envisager une AND (clinique, imagerie dont scintigraphie), un sepsis (signes généraux, locaux et biologiques, un descellement (radiographies), une rupture de coiffe (imagerie), une instabilité par usure de la glène.
Les objectifs sont de retrouver surtout de l' indolence et beaucoup moins de la mobilité: au moins 90° et maximum 130° d'élévation antérieure, une RE de 20-30°, une RI en main-lombes.
IV- Rééducation d'une épaule opérée
La rééducation est recommandée pour tous les patients ayant bénéficié d’une chirurgie de rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule ou d’une arthroplastie, quelle que soit la technique chirurgicale proposée (recommandations HAS).
Particularités d'une épaule opérée:
1- les principes généraux sont les mêmes que pour une épaule non opérée: la douleur est à traiter et à respecter en utilisant au maximum la cryothérapie que l'on complète par des antalgiques en fonction de l'EVA; une séance de rééducation ne doit jamais se solder par une exacerbation des douleurs le lendemain de la séance de kinésithérapie, car ce peut être le début d'une AND qui est la complication à redouter; la récupération des mobilités passives d'abord en position de décubitus puis assis, constitue toujours le 1 er temps de la réhabilitation; il s'accompagne classiquement de massages décontracturants cervico-scapulaires de balnéothérapie en eau chaude++++, d'électro-stimulation du deltoïde, de mobilisations omo-thoraciques, de travail pendulaire et de décoaptation gléno -humérale douce; entre les séances , l'attelle d'abduction ou coude au corps est remise en place; à compter de la 6ème ou de la 8ème semaine et en tout cas pas avant d'avoir atteint la position de Saha, les mobilisations actives peuvent être introduites et d'abord en actif aidé; on y associe le travail de recentrage de la tête humérale par l'intermédiaire des muscles abaisseurs longs et courts, un travail de resynchronisation des rotateurs externes et internes, une rééducation globale du geste puis une adaptation du geste ou un réentrainement à la gestuelle sportive; ne pas oublier de respecter les interdits et toujours bien se donner des objectifs et des limites fonctionnelles en fonction de la profession du patient opéré ou du sport pratiqué.
2- particularités de la chirurgie de coiffe: si résection + suture du sous scapulaire par voie chirurgicale antérieure, la rotation externe passive ne doit pas être introduite avant la 6ème semaine.
3- après chirurgie de coiffe il faut théoriquement bannir tout travail actif au delà de l'horizontale chez les travailleurs et interdire le lavage de carreaux pour les ménagères.
4- la contention thoraco-brachiale: l'attelle doit être gardée nuit et jour pendant les 1ers 45 jours post-opératoires; on ne l'enlève que pour la rééducation passive en position allongée le 1er mois et en position assise après le 1er mois et elle est replacée sitôt la séance de kinésithérapie terminée; ne pas oublier de mobiliser le coude, le poignet , la main et les doigts; le sevrage de la contention s'effectue sur 2 semaines avec retour progressif coude au corps si attelle d'abduction.
Résumé de la rééducation d'une rupture transfixante de coiffe
Les ruptures transfixiantes symptomatiques des tendons de la coiffe des rotateurs sont fréquentes, puisqu'elles touchent de 4 % à 32 % de la population générale et leur incidence augmente avec l'âge. À la suite d'une rupture transfixiante de la coiffe des rotateurs, un traitement conservateur est initialement recommandé. Dans le cas d'un échec du traitement conservateur, une réparation chirurgicale est envisagée. La réparation chirurgicale consiste à lier les tissus tendineux rompus au moyen de sutures et, dans la situation où le ou les tendons sont détachés de leur point d'insertion sur la tête humérale, de rattacher les tendons à l'os. À la suite de la chirurgie, les patients prennent part à un programme de rééducation postopératoire. Les principaux objectifs de la rééducation postopératoire sont d'améliorer le niveau fonctionnel, l'amplitude articulaire et la force musculaire de l'épaule, tout en minimisant les symptômes et les risques de récidive. 
Le protocole est basé sur des données probantes directes et indirectes, mais également sur l'expérience clinique et l'opinion d'experts puisque les données probantes sont actuellement insuffisantes pour justifier toutes les étapes de la rééducation. Ce protocole de rééducation suit une progression en quatre phases. La première phase, la phase de repos, a pour but de protéger la réparation chirurgicale. La deuxième phase, la phase passive, a comme objectif la récupération des amplitudes articulaires passives de l'épaule. Durant la troisième phase, la phase active, l'objectif est la récupération des amplitudes articulaires actives et du contrôle neuro-musculaire de l'épaule. Finalement, le but de la quatrième phase, la phase de renforcement, est l'augmentation graduelle des forces produites par la coiffe des rotateurs et la reprise des activités professionnelles, sportives ou de loisir.

mardi 16 juillet 2013

Prise en charge en rééducation des épaules douloureuses, des épaules instables et de l'omarthrose.

Quelle que soit l'étiologie d'un problème d' épaule, qu'il soit post-traumatique ou micro-traumatique: épaule conflictuelle, neurologique, instable, ou sur omarthrose, l'objectif de la rééducation sera de retrouver une épaule mobile, stable et surtout non douloureuse.
I- Rappel anatomo-physiologique 
Au sens large du terme, l'épaule est composée de 3 articulations vraies: la gléno-humérale, l'acromio-claviculaire et la sterno- claviculaire



 et de 2 espaces de glissement: la sous deltoïdienne




et sa bourse séreuse de glissement




et l'omo-thoracique 


et de 2 entités fonctionnelles bien distinctes qui se complètent: la scapulo-huméraleavec son espace sous-acromial et la scapulo-thoracique et ses plans musculaires.
L'espace sous-acromial
La cavité articulaire de cet espace sous-acromial y est pratiquement aussi large que celle du genou et sur son plancher se situe la coiffe des rotateurs et le TLB, tandis que
la voûte est représentée par l’arche acromio-coracoïdienne:bord antéro-inférieur de l’acromion,ligament coraco-acromial et face inférieure de l’articulation acromio-claviculaire. C’est dans cet espace particulièrement sollicité en élévation et rotations que la pathologie dégénérative de la coiffe des rotateurs va se développer.





La scapulo-thoracique et ses plans musculaires

1.Sous-scapulaire ; 2. Serratus antérieur (grand dentelé) ; 3. Grand pectoral ; 4. Petit pectoral ; 5. Tête du tendon du long biceps





Les structures péri-articulaires et articulaires impliquées sont représentées essentiellement par les tendons de la coiffe des rotateurs,


 les ligaments gléno-huméraux,





acromio-coracoïdien, acromio-claviculaires; mais aussi par la capsule gléno-humérale vaste et lache, le bourrelet glénoïdien ou labrum, les 2 tubérosités de la tête humérale (trochiter et trochin), l'apophyse coracoïde.




Les structures nerveuses impliquées sont les racines nerveuse C4 se projetant en scapulo-thoracique antérieur et postérieur et C5 à l'origine de douleurs référées de l'épaule;  les nerfs sus scapulaires et grand dentelé de Charles Bell. 
II- Bilan lésionnel et fonctionnel de l'épaule

Il est proposé, au-delà des classifications anatomiques, de faire un bilan de la situation qui

va s’attacher à recueillir des éléments cliniques (mobilité, stabilité, douleur, force); des éléments généraux (notamment âge, tabac, contexte socioprofessionnel) et des éléments morphologiques tendino-musculaires et ostéo-articulaires, fournis par l’examen clinique , le score algo-fonctionnel de Constant et les examens d’imagerie médicale:
- la douleur: elle est évaluée par l'échelle visuelle analogique EVA; c'est un signe fonctionnel à contrôler régulièrement; elle peut représenter le 1er signe d'une algo-dystrophie et dans tous les cas si la douleur est la conséquence d'une kinésithérapie un peu trop musclée, la douleur ne doit pas perdurer le lendemain de la séance.
La douleur quelle soit d'origine gléno-humérale (moignon de l'épaule et irradiation descendante) ou scapulo-thoracique (cervico-trapézienne et sans irradiation descendante) doit être contrôlée par les antalgiques de classe I ou II, les AINS, la physiothérapie, les massages.




- les mobilités passives et actives analytiques: EA, EL, RP, RI et RE, les mouvements complexes main-nuque et main-dos, les tests de conflit: antéro-supérieur, antéro-interne et postéro-supérieur de Walsch; les tests de tendinopathies, d'instabilité et de laxité.
- la palpation soigneuse de toutes les structures
- le score fonctionnel de Constant et l'évaluation isocinétique
En cas de  raideur articulaire: c'est la mobilité passive qu'il faudra récupérer en 1er, celle des 3 articulations et celle des 2 surfaces de glissement.
III- Quelques définitions
1- le plan de la scapula: c'est le plan de mobilité physiologique de l'omoplate compris entre 20 et 40° d'antépulsion. 
Plans de glissement de l’omoplate: le grand dentelé est séparé de la cage thoracique et du sous-scapulaire par des plans cellulo-graisseux. Ceux-ci sont indispensables au bon glissement de l’omoplate sur le thorax et sont considérés comme faisant partie du complexe articulaire de l’épaule.
2- le Zéro-position de Saha correspond à l'angle d'élévation de 150° à atteindre passivement dans le plan de l'omoplate, à 20 - 40° d'antépulsion, avant d'attaquer les mobilisations actives; c'est une position qui permet un bon réveil musculaire du deltoïde, tout en protégeant la coiffe des rotateurs et avec un bon centrage de la tête humérale.




3 - la voie de passage de Sohier dans le conflit antéro-supérieur de coiffe; c'est un trajet en s qui évite le conflit trochiter-voûte sous- acromiale, sans provoquer de conflit mécanique.
IV- Travail passif de l'épaule
Bases techniques
- patient relâché; balnéothérapie en eau chaude à 35°



- massages décontracturants cervico-scapulaires

- mobilisations omo/thoraciques (techniques GETM et Lesage) avec jeu corporel


mobilisation O/T
- décoaptation gléno-humérale (techniques Lesage)


décoaptation G/H
- travail pendulaire de l'épaule = aspirine de l'épaule.


travail pendulaire à 2 mains
- auto-rééducation auto-passive et active aidée avec bâton.
V-Nécessité d'une scapula mobile et stable
- la  récupération des amplitudes actives intervient toujours secondairement après un travail strictement passif jusqu'à  la position de Saha et en respectant la douleur; elle intervient après un délai de 3 semaines dans les prothèses d'épaule,  si pas de suture de la coiffe; après 4 à 6 semaines si acromioplastie seule; après 6 à 8 semaines si suture de la coiffe associée (pas de travail de la RE si réfection du sous-scapulaire y compris en balnéothérapie avant 4 à 6 semaines; travail d'abord en actif aidé puis en actif sans résistance et sans la pesanteur puis contre pesanteur puis contre résistance
 (isocinétisme +++).
- travail de recentrage de la tête humérale: des abaisseurs et stabilisateurs longs (grand dorsal, grand pectoral, grand rond) et courts (coiffe des rotateurs)
- resynchronisation agonistes-antagonistes RE/RI
- travail proprioceptif en chaîne fermée puis ouverte.
- renforcement musculaire progressif: électro-stimulation du deltoïde, actif aidé par la balnéothérapie, sur dynamomètre iso-cinétique
- travail global du geste puis réadaptation du geste professionnel ou sportif en ergothérapie et en activités physique adaptées et éventuellement relatéralisation si besoin.
Les interdits
- non respect de la douleur
- renforcement musculaire sur épaule enraidie
- renforcement musculaire en abduction pure qui aggrave le déséquilibre deltoïde/coiffe
- travail en position d'instabilité ou de conflit
- musculation inadéquate
Bilan final: 
il fixe les limites de l'utilisation fonctionnelle professionnelle ou sportive en particulier en cas de raideur résiduelle.
Apport de l'isocinétisme




P. Codine et collaborateurs, à partir d'une revue de la littérature, ont précisé l'apport de l'isocinétisme dans l'évaluation et la rééducation de l'épaule.
Ils ont conclu que l'isocinétisme constituait une méthode de référence en matière d'évaluation de la force musculaire, permettant de détecter les déficits portant sur certains groupes et plus encore les perturbations de la balance agonistes-antagonistes constatées lors de certaines pathologies d'épaule. Il constitue une aide précieuse à la rééducation en orientant la prise en charge préférentiellement sur les groupes déficitaires, en complétant les techniques de renforcement classiques et en permettant un suivi précis des progrès accomplis. La validité de l'évaluation isocinétique de l'épaule est bonne et la reproductibilité, bien qu'inférieure à celle du genou, est satisfaisante sous réserve d'une méthodologie de test rigoureuse. Les valeurs normales, pour les rotateurs, les abducteurs-adducteurs et extenseurs-fléchisseurs sont dépendantes de divers paramètres tels que l'âge, le sexe, la corpulence, l'activité physique pratiquée. Le calcul des ratios agonistes-antagonistes est surtout intéressant en pathologie.
Dans le conflit sous-acromial et l'instabilité de l'épaule sont constamment observés une modification du ratio des rotateurs, qui apparaît plus comme un agent causal que comme une conséquence de l'affection. Cette modification perdure habituellement après traitement chirurgical de ces atteintes et la normalisation des ratios doit constituer un des éléments de la rééducation postopératoire.
En effet il existe un déséquilibre important entre les muscles stabilisateurs antérieurs et rotateurs internes très puissants : sous-scapulaire et grand pectoral, grand rond et grand dorsal et les muscles stabilisateurs postérieurs et rotateurs externes: le sous épineux qui assure à lui seul 90 % de la force de rotation externe, mouvement essentiel dans le fonctionnement de l’épaule et le petit rond.

Le sous épineux est véritablement le muscle clé de la fonction de l’épaule assurant la presque totalité de la rotation externe et le centrage de la tête humérale en élévation.

Evaluer le déséquilibre entre rotateurs externes et rotateurs internes par le biais de l'isocinétisme est la clef du programme de rééducation des épaules douloureuses et des épaules instables.
VI - Prise en charge par un traitement conservateur des épaules douloureuses et stables: 
Le principe d’un traitement médical conservateur (médication orale, infiltration, kinésithérapie) de première intention peut donc être retenu, conformément aux recommandations d’avril 2005 concernant les modalités de prise en charge d’une épaule douloureuse chronique non instable chez l’adulte.
1- Les épaules conflictuelles  avec plus ou moins tendinopathie associée rompue ou non rompue: 
Les 3 formes cliniques: le conflit antéro-supérieur trochiter- voûte sous- acromiale; le conflit antéro-interne coracoïde-petite tubérosité; le conflit postéro-supérieur de Walsch en armé du bras avec déséquilibre RI/RE en faveur des RI et rééducation isocinétique en excentrique des RE.

les 3 conflits 

Rééducation:
- récupération d'abord des amplitudes passives+++
- décoaptation G/H et mobilisations O/T
- travail pendulaire
- recentrage de la tête H par un travail des abaisseurs longs et courts
- voies de passage de Sohier
2 - La tendinopathie calcifiante
- aigue: AINS, corticothérapie, infiltration sous- acromiale et ou intra-articulaire, glace+++, immobilisation de 48 heures.
- chronique: infiltration sous- acromiale et ou intra-articulaire; trituration chirurgicale; arthroscopie de nettoyage.
3 - La tendinopathie rompue: 
clinique d'épaule douloureuse simple ou pseudo-paralytique; imagerie= rupture partielle ou totale. Beaucoup de patients ayant une rupture dégénérative des tendons de la coiffe des rotateurs s’améliorent de façon acceptable avec le traitement conservateur à moyen et long terme, et ce d’autant que leur prise en charge a été précoce. Dans les cas de rupture partielle avec des muscles de la coiffe non dégénératifs (IRM): réparation chirurgicale. En cas de rupture totale, la conduite à tenir sera fonction de l'opérabilité (terrain et qualité IRM des muscles de la coiffe); si non opérable: lutte contre la douleur et stratégies de compensation en ergothérapie.


VII- Prise en charge d'une omarthrose
Une omarthrose est rarement primitive; elle se présente cliniquement comme une épaule douloureuse et très enraidie avec limitation de la RE; les clichés de face en RE mettent en évidence une usure de la partie postérieure de la glène; l'omarthrose peut être centrée ou non centrée et accompagnée d'une rupture de la coiffe; le traitement est conservateur si les douleurs peuvent être contenues; si les douleurs sont persistantes et la raideur importante, c'est l'indication de la mise en place d'une prothèse; s'il s'agit d'une forme peu algique et enraidissante, la rééducation est conseillée: il ne faut pas attendre de récupérer la position zéro de Saha pour commencer le travail actif et jouer sur la mobilité de l'omo-thoracique et les massages cervico scapulaires pour gagner en amplitude.



VIII- Prise en charge de l'épaule micro-traumatique du lanceur
Les sportifs de lancer (armé du bras, accélération du geste, fin du geste en adduction/rotation interne) présentent un conflit postéro-supérieur qu'a bien décrit le Lyonnais Walsch. avec déséquilibre dans le ratio des rotateurs d'épaule en défaveur des RE; la rééducation sera au mieux de type isocinétique avec renforcement excentrique des RE+++.
IX- Rappel des systèmes d'immobilisation du membre supérieur:
1- jersey ou plâtre
2- écharpe simple, coude libre, simple mise au repos.


écharpe simple

Mayo -clinic = écharpe de maintien coude au corps avec mise au repos supérieure à celle d'une écharpe simple.

Dujarrier = maintien plus strict, bloque aussi la scapulo-thoracique.


Dujarrier



Attelle d'abduction.


Attelle d'abduction