Avis à lire par tous les lecteurs:

Les premiers articles du blog "Un médecin du sport vous informe" datent de 2013, mais la plupart sont mis à jour pour pouvoir coller aux progrè médicaux. Ce blog inter-actif répond à la demande de nombreux confrères, kinésithérapeutes, étudiants en médecine et en STAPS, patients et sportifs. Il est le reflet de connaissances acquises tout le long de ma vie professionnelle, auprès d'enseignants remarquables, connaissances sans cesse actualisées que je me suis efforcé de rendre accessibles au plus grand nombre par le biais d’images trouvées sur le Net, images qui sont devenues par la force des choses, la propriété intellectuelle de tous; si cela dérange, ces images seront retirées.

Certains articles peuvent apparaître un peu plus polémiques que d'autres et indisposer, mais il n'est pas question pour l'auteur de tergiverser ou de se taire, quand il s'agit de problèmes d'éthique, en particulier en matière de dopage et quand la santé des sportifs est en jeu, compte tenu du nombre élevé de blessures liées au surentraînement et à une pratique imbécile d'une certaine musculation, qui n'est plus au service de la vitesse et de la force explosive utile (et non de la force maximale brute), qui sont les deux qualités physiques reines, qui ne respecte pas les règles de la physiologie musculaire et qui, au lieu d'optimiser la performance, fait ressembler certains sportifs body-buildés à l'extrême, davantage à des bêtes de foire gavées aux anabolisants, qu’à des athlètes de haut niveau.

Ce blog majoritairement consacré à la traumatologie sportive, est dédié à mes maîtres les Prs Jacques Rodineau, Gérard Saillant et à tous les enseignants du DU de traumatologie du sport de Paris VI Pitié Salpétrière et en particulier aux docteurs Jean Baptiste Courroy, Mireille Peyre et Sylvie Besch. L'évaluation clinique y tient une grande place: "la clinique, rien que la clinique, mais toute la clinique" et s'il y a une chose à retenir de leur enseignement, c'est que dans l'établissement d'un diagnostic, l'examen clinique, qui vient à la suite d'un bon interrogatoire, reste l'élément incontournable de la démarche médicale. Toutefois dans le sport de haut niveau et guidé par la clinique, l'imagerie moderne est incontournable : radiographie conventionnelle, système EOS en trois dimensions pour les troubles de la statique rachidienne, échographie avec un appareillage moderne et des confrères bien formés, scanner incontournable dans tous les problèmes osseux et enfin IRM 3 Tesla, le Tesla étant l'unité de mesure qui définit le champ magnétique d'un aimant; plus le chiffre de Tesla est élevé et plus le champ magnétique est puissant ("à haut champ") et plus les détails des images sont fins et la qualité optimale.

Hommage aussi au Pr Robert Maigne et à son école de médecine manuelle de l'Hôtel Dieu de Paris ou j'ai fais mes classes et actuellement dirigée par son fils, le Dr Jean Yves Maigne. Je n'oublie pas non plus le GETM (groupe d'étude des thérapeutiques manuelles) fondé par le Dr Eric de Winter et ses enseignants, tous des passionnés; j'y ai peaufiné mes techniques et enseigné la médecine manuelle-ostéopathie pendant 10 années.

Dr Louis Pallure, médecin des hôpitaux, spécialiste en Médecine Physique et Réadaptation, médecin de médecine et traumatologie du sport et de médecine manuelle-ostéopathie, Pr de sport et musculation DE, ex médecin Athlé 66, comité départemental 66, ligue Occitanie et Fédération Française d’Athlétisme, médecin Etoile Oignies Athlétisme.

lundi 8 mai 2023

Approche biomécanique d'une lombalgie, notion de caisson abdominal profond et rôle du muscle transverse de l'abdomen, notion de poutre composite, prévention par le verrouillage volontaire en position intermédiaire

 Dans une lombalgie, l'approche biomécanique est intéressante dans la mesure où elle vise à ce que la charge supportée par le rachis lombaire n’excède pas la capacité de résistance de son système musculo-squelettique. En prévention, le verrouillage lombaire volontaire en position intermédiaire par co-contraction des spinaux et des abdominaux et l'utilisation de la mobilité des membres inférieurs est la solution à privilégier.

I- L'anatomie lombaire

Colonne lombaire de face, de profil et vue de dos, avec ses 5 vertèbres et ses rapports avec les racines nerveuses qui s'échappent de la moelle épinière contenue dans le canal vertébral, à travers le foramen.

Joint intervertébral de profil avec trépied mobile: disque en avant, articulations vertébrales en arrière


Détails d'un joint intervertébral: disque intervertébral entre deux corps vertébraux et ligaments longitudinaux, foramen au milieu par lequel vont s'échapper les racines nerveuses du nerf rachidien (nerf spinal) et en arrière le serment vertébral postérieur cloisonné par les ligaments jaunes et inter et sur -épineux

Coupe transversale d'une vertèbre lombaire avec son canal rachidien contenant la moelle épinière et le départ des nerfs rachidiens 

II- Les critères biomécamécaniques 
Dans l'approche d'une lombalgie, les critères biomémaniques sont essentiellement représentés par les forces de compression et de cisaillement que peuvent supporter les vertèbres lombaires. 
En position assise, le rachis lombaire est en position de flexion ou de délordose. Cette position en flexion, plus que les positions en torsion, est celle que l'on retrouve le plus souvent dans le mécanisme lésionnel du lumbago, et dans cette gestuelle mortifère pour le disque intervertébral, le Dr Troisier a défini trois facteurs de risque qui risquent de bloquer un dos: l'importance de la charge, son amplitude et sa vitesse d'éxécution. A noter qu'un lumbago en position d'extension est rarissime; son origine est alors articulaire postérieure. On peut souligner d'emblée qu'il y a un caractère commun entre une posture nocive et un geste nocif et ce caractère commun est l'antéflexion du tronc. 



En position debout, assise, en antéflexion du tronc et au soulèvement d'une charge sans utilisation des membres inférieurs

Alors que l'antéflexion du tronc est le geste toxique par excellence, la lordose lombaire et plus encore la posture hypercambrée sont diabolisés par une majorité d'individus lombalgiques et de thérapeutes qui luttent contre cette courbure lombaire naturelle et veulent un dos droit et un bassin en rétroversion, et donc un bas du dos en flexion. Or en général dans toute articulation, c'est la position neutre qui entraîne le moins de contraintes  et au niveau lombaire, la position neutre, n'est autre que la lordose physiologique.
Rappelons que l’enfant en gestation (ontogenèse) dans le ventre de sa mère et dans les premiers mois de sa vie terrestre, est en position de cyphose (flexion) de l’ensemble de sa colonne vertébrale. L'évolution dans le temps va amener l'enfant à se déplacer d’abord en lordosant ses cervicales, puis ses lombaires, en rapport direct avec la marche. L'ontogenèse résumant la phylogenèse.


Adaptation phylogénétique

Adaptation ontogénétique

Le Dr Duval- Beaupère dans son analyse biométrique du rachis lombaire, nous explique que l’incidence pelvienne est un paramètre anatomique propre à chacun et que la pente sacrée lui est corrélée, l’homme debout devant compenser ce paramètre par une lordose lombaire, s’il veut ramener la ligne de gravité de son tronc à la verticale de son bassin. Cette lordose lombaire est indispensable pour diminuer le bras de levier et les contraintes liées à la gravité s’exerçant sur cette zone. Toute diminution de la lordose lombaire se manifestera par une projection antérieure du tronc, suivie d'une augmentation des contraintes sur les paravertébraux avec contractures de ces derniers.

Equilibre sagittal du bassin suivant Beauval-Beaupère

III- Les différents déséquilibres observés chez un lombalgique
La perte de l'extension lombaire
Les lombalgiques ont en grande majorité une perte de l’extension lombaire, les amplitudes de flexion étant elles conservées. L'extension du tronc est donc déficitaire, ce déséquilibre entraîne les structures antérieures en position courte, et les structures postérieures en  position longue.
Sur un rachis lombaire équilibré, les contraintes d'étirement et de compression ne posent aucun problème. Si un déséquilibre est présent, les sollicitations répétitives vont se faire toujours dans le même sens, les contraintes de compressions prédomineront sur les éléments antérieurs discaux et les contraintes d'étirements sur les éléments vertébraux postérieurs. Au final, c'est une usure précoce des différentes entités anatomiques qui surviendra.
L' usure précoce antérieure du disque intervertébral et antéflexion du tronc


Le disque intervertébral 
Il est constitué d’un noyau gélatineux central le nucléus, et de fibres circulaires périphériques constitutives de l'annulus, qui emprisonnent le noyau, entre deux plateaux vertébraux adjacents. Sa composition est faite de tissu conjonctif déformable et sa fonction est de permettre la mobilité intervertébrale et d'absorber les contraintes. En antéflexion du tronc (position assise ou debout penché en avant), le disque est comprimé, le noyau repoussé vers l'arrière. Il va contraindre les fibres postérieures de l'annulus qui vont se déformer. 


En antéflexion du tronc, le noyau du disque intervertébral est projeté vers l'arrière avec risque d'entrer en conflit avec les éléments nerveux.

En extension du tronc, les éléments nerveux sont protégés d'une éventuelle migration d'un fragment du disque inter-vertébral.

Toute posture qui se maintient dans le temps ou la répétition de gestes toxiques en antéflexion vont pousser le noyau à se déformer et à faire chemin vers l’arrière en déchirant les fibres circulaires de l'annulus. Quand le noyau arrive au tiers externe du disque, celui-ci, commençant à être innervé commencera à être douloureux (lombalgie discale de type névralgie sympathique). Le disque étant hydrophile et se gonflant pendant la nuit, des douleurs matinales diffuses, en barre, avec notion de dérouillage matinal, pourront apparaître. Si les contraintes en antéflexion se poursuivent, le processus de migration du noyau vers l'arrière va se poursuivre et créer d'abord une protrusion discale simple, puis une hernie discale intra ligamentaire qualifiée de contenue, parce qu'anatomiquement le fragment hernié est solidaire du disque. Si le fragment discal hernié se désolidarise du disque, la HD est qualifiées de migrée ou exclue.

En prenant en compte l’anatomie d'un joint inter-vertébral et ses rapports avec la moelle épinière et les racines nerveuses, il est facile d'observer que l'anteflexion du tronc entraîne le noyau en arrière vers les éléments neurologiques, jusqu'au conflit disco-radiculaire d'abord chimique, puis mécanique et qu'en prévention l’origine de la douleur discale étant comprise par le lombalgique, elle sera suivie d'effets par des gestes à proscrire.
La métamérisation, c. à d. le rapport entre le disque en souffrance ou la racine comprimée et la douleur du membre inférieur: sciatalgies, sciatiques, cruralgies est alors facile à comprendre. Facile à comprendre aussi pour le lombalgique, comment ne pas menacer les éléments neurologiques en plaçant sa colonne en extension. 
L'usure postérieure des facettes articulaires et déséquilibre vertébral
On décrit anatomiquement les facettes articulaires postérieures comme des tuiles placées sur l’arc postérieur de la vertèbre. À une époque, on pensait que ces facettes articulaires se décoaptaient en flexion et se coaptaient en extension. Des études biomécaniques récentes ont démontrés qu’il n’en est rien, elles glissent les unes sur les autres, en avant pendant la flexion, en arrière pendant l’extension. En cas de déséquilibre, elles peuvent se bloquer en glissement antérieur et pour les débloquer, des manoeuvres orthopédiques en extension après testing préalables peuvent être tentées.
Quant à l'arthrose articulaire, le rôle des articulations postérieures étant d’absorber et de répartir les contraintes et le cartilage n’étant pas innervé, il n'est pas en cause dans la lombalgie articulaire postérieure. En cause, la diminution de la surface articulaire qui devient plus fine, limite l'absorption des contraintes qui se déplacent alors vers l'os sous chondral qui est lui innervé et cause des douleurs quand il est sollicité. Il est très important de comprendre que la sensation de blocage en extension n’est pas une impaction, mais un manque d’amplitude des structures capsulo-ligamentaires qu’il faudra récupérer petit à petit par de la kinésithérapie, sans forcer et à l’exemple d’un coude qui ne voudrait plus se tendre. 
L'usure des ligaments vertébraux

Les différents ligaments vertébraux limitent la mobilité rachidienne: longitudinal antérieur et postérieur de part et d'autre du disque et des corps vertébraux, le ligament jaune qui cloisonne les lames vertébrales, les ligaments inter et supra-épineux qui solidarisent les apophyses épineuse du segment vertébral postérieur. Pour les léser, il faut sortir de la position neutre et aller en amplitude maximale forcée.
Le déséquilibre de la sangle abdomino-lombaire
Il n'a jamais été prouvé que des personnes souples et musclées ont moins de  douleurs. 
C’est le déséquilibre abdomino/lombaires qui est toxique. 
Parmi les abdominaux, le muscle majeur à privilégier est le Transverse de l'abdomen qu'il faut absolument tonifier.



Le ratio sur le schéma ci dessous, montre que les sujets non lombalgiques ont des muscles spinaux efficaces alors que les lombalgiques ont des abdominaux prédominant. 


En plus d’un déséquilibre passif, les lombalgiques développent un déséquilibre actif. Ils n’ont plus assez de muscles spinaux par rapport aux abdominaux et si par le passé, on utilisait le renforcement abdominal chez ce type de patient, il devient évident que la solution se trouve plutôt dans le renforcement des spinaux, le travail passif, puis actif de récupération de l’extension lombaire rééquilibrant le système.
Le rôle de l'âge et du sexe 
La capacité de résister aux charges externes et internes dépend de l’âge, du poids et du sexe d’un individu, du niveau vertébral (lombaire, thoracique ou cervical) où s’exercent les forces, du type de chargement (compression ou cisaillement) et de la posture. L’âge et le sexe sont déterminants, la capacité des vertèbres diminuant généralement avec l’âge et les femmes ayant habituellement une capacité inférieure aux hommes.
Le seuil de la force en compression de NIOSCH
En raison du grand nombre de facteurs qui entrent en jeu dans la résistance des vertèbres, il est très difficile de fixer une limite de chargement ou un poids limite à manipuler. Actuellement, le seuil le mieux connu est celui de la force en compression du NIOSH, établi à 3,4 kilonewton (kN) (3 400 N ou 340 kgf1). Il protégerait la quasi-totalité des hommes (99 %) et les trois quarts des femmes (75 %). 

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Effet de l’âge et du sexe sur la résistance des vertèbres à supporter des charges en compression
Âge
Femme Charge (kN)
Homme Charge (kN)
20
4,4
6,0
30
3,8
5,0
40
3,2
4,0
50
2,6
3,0
60
2,0
2,0
Note : Valeur limite recommandée par NIOSH :3,4 kN (340 kgf) pour tous les âges et les deux sexes.

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Bien que l’unité de mesure de force est généralement le newton (N), on peut aussi rencontrer l’unité de kilogramme-force (1kg = 1kgf).

Ce seuil a été fréquemment contesté parce qu’il ne tient pas compte de l’âge, comme le souligne le tableau ci-dessus. Malgré tout, le seuil du NIOSH a l’avantage de protéger beaucoup plus, que moins. Quant au seuil acceptable en cisaillement, il y a consensus pour le situer autour de 1,0 kN (1 000 N ou 100 kgf), bien que peu d’études documentent cette question.
Critères acceptables : 3 400 N en compression 1 000 N en cisaillement

Les forces de cisaillement
Une force de cisaillement est une force appliquée de manière parallèle ou tangentielle à une face d'un matériau, par opposition aux forces de compression normales qui sont appliquées de manière perpendiculaire. Dans le cas d’une vertèbre, cette force agit en parallèle au plateau vertébral. Comme on peut le voir sur la figure ci- dessous, l’orientation des forces de compression et de cisaillement n’est pas identique le long de la colonne lombaire.



Comment déterminer une limite acceptable à une tâche
Pour déterminer si une tâche se situe dans des limites acceptables, on utilise des modèles biomécaniques. Par la suite, on vérifie les conditions dans lesquelles le chargement demeure dans une limite acceptable, par exemple 3 400 N en force de compression.
Les modèles biomécaniques variant en complexité, les calculs du chargement sur l’articulation L5/S1 est élevé si principalement la charge externe est grande et si les masses segmentaires, par exemple les bras, sont éloignées de L5/S1.
De nombreuses études qui ont évalué cette approche, confirment l’influence de ces facteurs sur le chargement au dos et on a observé que le chargement lombaire sur  L5/S1 augmentait avec un accroissement de la charge ou de la distance verticale et horizontale de la charge.
La stabilité de la colonne vertébrale
On présume qu’une grande partie des blessures au dos serait le résultat d’efforts excessifs, mais ce n’est pas toujours le cas. Par exemple, comment expliquer qu’une personne se blesse au dos en ramassant un crayon au sol ? Une nouvelle hypothèse de recherche pourrait élucider cette problématique en tenant compte de la stabilité de la colonne vertébrale. En soi, la colonne vertébrale est instable et s’affaisse facilement sans l’apport des muscles. Sa rigidité est donc assurée par la contraction des muscles qui l’entourent. On suppose qu’une blessure peut se produire lorsque le recrutement musculaire se fait incorrectement, perturbant la stabilité de la colonne et causant des déplacements vertébraux qui entraînent des lésions. Ainsi, une personne dont le temps de réponse réflexe musculaire serait plus lent qu’une autre pourrait être plus à risque de blessure au dos. Il n’existe pas encore de critères pratiques permettant de savoir si une personne est à risque d’être instable. Toutefois on peut logiquement penser qu’en état de fatigue, tout individu a plus de chance d’effecteur un geste moteur erroné qui mettra à risque la stabilité de sa colonne vertébrale. Une mesure de prévention possible consiste donc à respecter les critères décrits dans l’approche physiologique.  
Moyens de compensation des forces de compression et de cisaillement:  par des spinaux forts et une sangle abdominale tonique.
Avant d'envisager les moyens physiologiques de s'opposer aux différentes contraintes que subit la colonne lombaire, les notions de poutre composite et de caisson abdominal sont à expliciter, le principe du caisson hydropneumatique étant utilisé dans le but de protéger les disques intervertébraux lombaires et les articulations sacro-iliaques. En effet en complément des muscles spinaux, rôle majeur du caisson abdominal profond dans la protection du rachis lombaire et plus spécialement rôle essentiel à des titres divers du muscle transverse de l'abdomen dont les fibres transversales contournent les viscères, préservent entre autres d'une potentielle éventration et protègent efficacement l'orifice profond du canal inguinal dont la faiblesse est la cause première des pubalgies vraies (confer l'article du blog sur vraies et fausses pubalgies).
Rôle du caisson abdominal profond
Rappelons que le caisson abdominal, abdominal CORE
 (centre) des anglo-saxons, est un ensemble de muscles englobant le diaphragme et les différents muscles du tronc et du bassin. Il supporte la colonne lombaire, le bassin et la cage thoracique, participe à leurs mouvements et au maintien de la station debout. Il est fermé en haut par le muscle diaphragme, en bas par les muscles du plancher pelvien ou périnée, en arrière par la colonne vertébrale et les muscles spinaux qui sont des extenseurs du rachis et en avant par les muscles abdominaux composés à 95% de fibres dites toniques à activité essentiellement statique. Ces abdominaux sont disposés en deux plans:
- un plan superficiel avec les obliques qui sont des muscles attachés entre bassin et cage thoracique, assurant la rétroversion du bassinet la rotation du tronc et participant à sa flexion, leur contraction entrainant le rapprochement des basses cotes vers la ligne médiane du corps, les grands droits qui sont les muscles responsables de la flexion globale du tronc et de l'abaissement des cotes lorsqu'on plie le corps en avant. Ils sont antagonistes du muscle transverse et il va falloir s'en rappeler lorsqu'on travaille les abdominaux et opter définitivement pour un travail de type isométrique en lieu et place d'un travail de crunch en flexion (Bernadette de Gasquet). Ce plan superficiel lorsqu'il est activé, génère aussi une pression sur le caisson abdominal inférieur périnéal et en cas de problèmes de descente d'organes, de fuite urinaire ou en post accouchement, il sera primordial de ne pas le solliciter.
- un plan profond, le transverse de l'abdomen, qui forme la limite antérieure du caisson abdominal profond. Il constitue de par l'horizontalisation de ses fibres, la ceinture musculaire naturelle de l'abdomen et travaille en synergie avec les muscles du périnée. A l'expiration il se contracte légèrement, resserrant la taille sur elle même et permettant au diaphragme de remonter vers la cage thoracique. Les muscles du plan profond sont tous synergistes et leur travail provoque un effet caisson qui génère une pression autour de la colonne vertébrale et la protège. Cet effet caisson, comparable à un cylindre abdominal, assure la stabilité de la colonne vertébrale lombaire. 
Rôle de poutre composite de l'association rachis lombaire et muscles spinaux + muscle transverse de l'abdomen 
Ce muscle transverse de l'abdomen de par sa structure horizontale en association avec les muscles spinaux structurés longitudinalement et obliquement, joue également le rôle d'une poutre composite qui nous le rappelons est en biomécanique, l'association de 2 matériaux différents, unis solidairement et partageant les contraintes auxquelles ils sont soumis en fonction de leur élasticité propre. En clair, rachis lombaire, spinaux et transverse de l'abdomen à la manière d'une poutre composite, sont capables de mieux résister aux différentes contraintes professionnelles et sportives en offrant un maximum de résistance avec un minimum d'encombrement.

Besoin d'avoir des muscles spinaux forts, portion verticale de la poutre composite

Caisson abdominal profond (muscle transverse de l'abdomen+++) amortisseur des contraintes et portion horizontale de la poutre composite

Prévention par le verrouillage volontaire lombaire 
La technique du verrouillage lombaire vise à protéger le rachis dans les gestes du quotidien selon la définition donnée par Olivier Troisier. Cette définition est la seule qui réponde aux impératifs biomécaniques, à l’inverse de la définition en délordose avec rétroversion du bassin. Cette définition en délordose ne répondant qu’à une sédation partielle et temporaire de la douleur pour des patients ayant une lordose déficitaire. Il faut préciser que Troisier n’a jamais prôné un verrouillage continu mais uniquement dans les situations à risque, pour éviter la kinésiophobie. Ces situations sont le port de charge, amplitude extrême ou vitesse lors du mouvement. Pour expliquer cette notion, un exemple très simple de mal au coude aide à mieux comprendre. Serait-il logique de demander de contracter un coude douloureux toute la journée? Non, une telle action ne ferait qu’augmenter les contraintes mécaniques sur une articulation déjà en souffrance.
Le verrouillage lombaire utilise les principes suivants :
– immobilisation volontaire du rachis
– en position intermédiaire
– par la cocontraction des spinaux et des abdominaux
– utilisation de la mobilité des membres inférieurs.
L'exemple du bon verrouillage lombaire des haltérophiles
Le meilleur des exemples pour expliciter ce verrouillage se trouve chez les haltérophiles.
Les contraintes induites par la pratique de ce sport nécessitent une technique parfaite pour protéger les éléments constitutifs du rachis. Ils écartent les jambes, plient les genoux. La barre a un bras de levier minimum par rapport à eux. Juste avant de monter, ils se cambrent  et regardent devant eux pour sortir le sternum et utiliser les réflexes archaïques du cou en induisant une stimulation de la chaîne d’extension. Ainsi, ils positionnent toute leur colonne en extension, verrouillée par les spinaux et stabilisée par le travail de caisson hydropneumatique des abdominaux. 

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Exemple de verrouillage lombaire chez un haltérophile

L'implication du bassin et des membres inférieurs dans la lombalgie
Plus les membres inférieurs participent au mouvement, moins la colonne est sollicitée et le fait de plier les genoux au moment de soulever une charge quelconque est un geste salutaire. Dans bien des activité de la vie courante (ménage, cuisine, soins à la personne, etc.), l'impression est que bassin et membres inférieurs sont figés, comme si l'individu restait campé sur une plaque de marbre, le bassin et que rien ne bouge en dessous et que tous les déplacements du corps se font au niveau de la colonne vertébrale. Et si plier les genoux pour atteindre le sol est trop difficile, les patients plieront leur dos. 
En passif, si le bassin est fixé par les ischio-jambiers, chaque fois que l'on se penche en avant, le mouvement ne se fait pas dans les hanches mais directement au niveau des lombaires. 
Force et souplesse du bassin sont donc nécessaires pour que les membres inférieurs absorbent plus de contraintes dans la vie courante, la position des lombaires dépendant entièrement de celle du bassin. Une rétroversion complète entraîne une flexion lombaire complète, le bassin étant sous la dépendance des muscles droit fémoral et ischio-jambiers (IJ). Une astuce simple : tant que les pieds restent sous le bassin, la tension entre les deux groupes musculaires (quadriceps et IJ) reste neutre, le bassin restant dans une position neutre, les lombaires font de même. Dès lors que les pieds sont positionnés vers l' avant, les ischio- jambiers sont mis en tension par rapport au droit fémoral, le bassin est attiré en rétroversion, et les lombaires se retrouvent en flexion. 
Au final
Cet article a pour but de faire prendre conscience à tous les lombalgiques de renforcer leurs spinaux et leur caisson abdominal profond et d'apprendre quand le besoin s'en fait sentir avec leur kinésithérapeute ou dans une école du dos à travers un programme de restauration fonctionnelle du rachis, à verrouiller volontairement leur colonne lombaire en position intermédiaire selon Troisier et faire du rameur (excellent à la fois pour la condition physique générale et les muscles abdominaux grâce à un travail tonique en isométrie).
Bibliographie: Xavier DUFOUR, Patrick GHOSSOUB, Alexandre CÉRIANI, Gilles BARETTE, Institut de thérapie manuelle et École du dos de Paris

Un piège diagnostique, les lombalgies basses d'origine lombaire haute ou syndrome de la charnière dorso-lombaire de Robert Maigne


Ce type de lombalgie basse d'origine lombaire haute décrit par Robert Maigne est également connu sous le terme de syndrome de la charnière dorso-lombaire. Il mérite d'être développé car sa méconnaissance est à l'origine de bien des retards diagnostiques et de la plupart des échecs thérapeutiques. L'origine de cette lombalgie est habituellement recherchée au niveau du rachis lombaire bas (L4/L5 ou L5/S1) alors qu'en réalité elle est plus haut située sur le rachis lombaire, généralement au niveau de l'étage thoraco-lombaire T12/L1. Ces douleurs sont donc un piège diagnostique car ressenties le plus souvent dans le bas du dos, mais aussi parfois dans le région abdominale basse, pouvant en imposer pour un problème gynécologique chez la femme ou uro-génital chez l'homme. Les douleurs peuvent également se projeter au niveau de la hanche homo-latérale et plus précisément au niveau du pli inguinal et quelquefois même au niveau de la face externe de la hanche en regard du grand trochanter du col fémoral. Ce type de douleur ressentie à distance correspond à une douleur projetée (voir l'explication physio-pathologique de ces douleurs projetées dans l'article du blog consacré aux formes cliniques de la douleur). La plupart du temps le traitement du syndrome de la charnière dorso-lombaire par les thérapeutiques manuelles et en particulier par les manipulations vertébrales s'avère très efficace. En cas de résistance au traitement manuel, il ne faut pas hésiter à faire une ou plusieurs infiltrations des articulations vertébrales postérieures du côté de la douleur quand cette dernière est secondaire à l'irritation de la branche postérieure de T12. Si la symptomatologie est antérieure dans le pli de l'aine, c'est la branche antérieure du nerf rachidien qu'il faut infiltrer dans le foramen. Ces infiltrations doivent de préférence se faire de manière scanno - guidées, à moins que le praticien ait une grande expérience de ce type d'infiltration. 
Généralités
Le syndrome de la charnière dorso-lombaire de Robert Maigne est la conséquence de l’irritation des nerfs rachidiens D12 ou L1, beaucoup plus rarement de D11 ou de L2. Il s'agit d'une irritation qui porte aussi bien sur la branche postérieure du nerf rachidien dont la zone de projection cutanée se situe au niveau de la peau de la crête iliaque, que sur la branche antérieure dont la zone de projection cutanée se situe dans le pli de l'aine ou sur son rameau latéral, dont la zone de projection cutanée se situe sur la face externe de la hanche, en regard du grand trochanter du col fémoral. On n'insistera pas dans cette description sur la très rare névralgie aiguë du grand nerf abdomino-génital avec sa douleur très vive lombo-abdominale dont le diagnostic est surtout étiologique.
Il faut insister sur la très grande fréquence des manifestations douloureuses dont est responsable cette charnière dorsolombaire, en l’absence de toute lésion radiologiquement objectivable. 
Ces manifestations sont extrêmement trompeuses, car il s'agit :
- de lombalgies chroniques ou aiguës par irritation de la branche postérieure des nerfs, manifestation la plus fréquente, se projetant au niveau du bas du dos.
- de douleurs se projetant en antérieur: pseudo-intestinales, pseudo-gynécologiques ou pseudo-urologiques, par irritation de la branche antérieure de ces nerfs D12 ou L1.
- de douleurs se projetant en latéral: fausses douleurs de hanche par irritation d’un rameau perforant latéral issu du 12ème nerf dorsal (D12).
Un dérangement intervertébral mineur (DIM) D11-D12 ou D12-L1 est une cause fréquente de douleur lombaires basses communes : plus de la moitié des lombalgies dites communes (image de gauche).
Ce même dérangement peut être cause de douleurs pseudo-viscérales ressenties comme profondes, dans la région abdominale basse, irradiant parfois aux testicules chez l'homme ou aux grandes lèvres chez la femme (image centrale).
Il peut enfin être la cause d'une fausse douleur de hanche.
Bref rappel du tableau clinique et des signes d'examen de  la « Lombalgie de Maigne ». 
Elle représente environ 60 p. 100 des lombalgies mécaniques chroniques, la lombalgie d'origine L4-L5 ou L5-S1 n'en représentant que 20 p. 100, les autres 20 p. 100 étant des formes mixtes.
La douleur dans les cas aigus comme dans les cas chroniques est toujours perçue dans la région sacro-iliaque, lombaire basse ou fessière. Parfois, elle irradie même vers la cuisse latéralement ou postérieurement. Elle n’est jamais ressentie à son niveau d'origine D12 ou L1. Elle est généralement unilatérale. Elle est parfois bilatérale. La douleur peut être aigu, comme celle d’un lumbago aigu, après effort ou. fausse manœuvre. Le rachis est raide et douloureux, mais il n'y a jamais d'attitude antalgique en baïonnette comme dans les lumbagos discaux L4-L5 ou L5-S1 typiques.
Elle est le plus souvent chronique et rien ne la différencie de la lombalgie chronique lombo-sacrée avec laquelle elle est toujours confondue.
Examen du patient
L'examen est fait d'abord sur le patient couché à plat ventre en travers de la table. On cherche à mettre en évidence la particulière sensibilité d'un des segments de la charnière dorso-lombaire par des manœuvres de pression directes sur la vertèbre.
Si cet examen est positif et si les signes cliniques, biologiques, radiologiques amènent à poser le diagnostic de souffrance mécanique, on dira que ce segment vertébral présente un dérangement intervertébral mineur.
1 : Pression latérale sur les épineuses faite lentement de D10 à L2 à droite puis à gauche. Cette manœuvre va provoquer une douleur sur la vertèbre responsable et généralement dans un seul sens (droite-gauche ou gauche-droite). 
2 : La recherche du point articulaire postérieur. 
Le doigt du médecin glisse en appuyant sur les régions paraépineuses de haut en bas de D10 à L2, avec des petits mouvements de friction profonde. Il va ainsi mettre en évidence la sensibilité exquise du massif articulaire postérieur responsable, toujours situé du même côté que le "point de crête". C'est au niveau de ce point articulaire postérieur que se fera l'infiltration de procaïne ou de cortisone. 
3 : Recherche du point de crête. 
L'index du médecin parcourt la crête iliaque en la frottant avec des petits mouvements de va et vient verticaux et horizontaux. Lorsqu'il comprimera contre l'os le rameau nerveux sensible, il réveillera une vive douleur en un point précis, le "point de crête" dont la pression reproduit fréquemment la douleur habituelle du patient. 
4 : Le "pincé-roulé" des plans cutanés de la fesse. 
Cette manœuvre mettra en évidence une plaque plus ou moins étendue, adjacente au "point de crête" où le pli cutané est infiltré, épaissi et douloureux au pincé-roulé (à comparer avec les zones voisines et le côté opposé où cette même manœuvre est indolore). Il faut pincer un pli de peau, le tirer et tout en le maintenant tiré, le rouler entre pouce et index.
Au niveau de la crête iliaque
L'index du médecin parcourt la crête iliaque de dedans en dehors, en la frottant au travers de la peau par des petits mouvements de va et vient transversaux et verticaux. En un point très précis, le plus souvent de 8 à 10 cm de la ligne médiane, il réveille un point très douloureux qui rappelle souvent au patient sa douleur habituelle. Ce point correspond à la compression du rameau cutané irrité provenant de D11, D12 ou L1. C’est le « point de crête » (Maigne).
Au niveau des plans cutanés de la fesse
Attenant à ce point, les plans cutanés de la fesse ou de la région lombaire sont le plus souvent infiltrés de cellulalgie sur une zone plus ou moins étendue. Il faut pour la mettre en évidence pincer entre pouce et index un gros pli de peau, le tirer, et tout en le tirant, le rouler en le pinçant modérément. Un plan cutané normal est insensible à cette manœuvre. Un plan cutané infiltré de cellulalgie est parfois épaissi, grumeleux et toujours très douloureux.
Pseudo douleurs abdominales ou gynécologiques d'origine D12
Le deuxième aspect de ce syndrome est 1'existence de douleurs abdominales ou pelviennes, pseudo-viscérales trompeuses. Elles peuvent être associées à la lombalgie, les poussées pouvant survenir en même temps ou non.
Le plus souvent, elles ne paraissent pas liées et l’une emporte en intensité sur l’autre qui passe ainsi au deuxième plan. Nombreux sont les patients qui, d'une part, sont traités pour leur lombalgie par les méthodes usuelles avec plus ou moins d'efficacité et qui sont suivies par ailleurs pour une « colite » traînante plus ou moins douloureuse, ou traités par un gynécologue pour des douleurs pelviennes épisodiques ou rebelles qui conduisent parfois à des interventions inutiles, et chez qui 1'examen gynécologique négatif déçoit le médecin et le malade qui souffre.
Ces douleurs peuvent irradier ou même être localisées au pubis ou aux grandes 1évres ou au scrotum. Elles attirent ainsi souvent l’attention sur l’appareil urinaire qui en l’occurrence n’est pas en cause, mais l’urologue est consulté.
La manœuvre du pincé-roulé doit être systématique devant toute douleur abdominale qui ne fait pas sa preuve et dans tous les cas où une lombalgie présente les signes d'une lombalgie d'origine dorsolombaire. Il faut explorer aussi la partie supérieure de la face interne de la cuisse qui appartient au même dermatome. La pression friction sur l'hémi-pubis du même côté est souvent douloureuse.
Les fausses douleurs de hanche et les fausses pubalgies d'origine D12 / L1
Le troisième aspect du syndrome de charnière dorso-lombaire apporte des ennuis de moindre gravité si le diagnostic n’est pas correctement posé: le patient se plaint d'une douleur de hanche à la face externe de la cuisse et ou parfois sur la région des adducteurs si c'est L1 qui est irrité; la douleur peut même prendre une vague allure sciatique. L'examen met souvent en évidence une zone de cellulalgie  de la face interne de la cuisse (L1) et ou un point très douloureux sur le trochanter avec une zone de cellulalgie rameau perforant latéral de la racine T12) et on évoque alors le diagnostic de périarthrite de hanche ou de tendinite du moyen fessier, mais les infiltrations anesthésiques ou cortisonées sur le grand trochanter ne soulagent pas. S’il n'y a pas à l'examen clinique de signes de hanche ou de tendinopathie trochantérienne du moyen fessier ou des adducteurs, il faut penser alors à la souffrance du 12ème nerf rachidien qui innerve le pli de l'aine et la face externe trochantérienne de la fesse par son rameau perforant latéral. Là encore devant ces douleurs projetées (à distance de leur origines) il faut rechercher sur un patient couché à plat ventre en travers de la table, des signes de souffrance segmentaire T12-L1 ou sur les segments vertébraux adjacents et un point de crête très souvent associé.
Résumé
Le syndrome de Robert Maigne trouve son origine au niveau de la charnière dorso-lombaire; il est très fréquent et se traduit:
1) par des lombalgies basses (dont l'origine est lombaire haute).
2) par des douleurs pseudo-viscérales.
3) par des fausses douleurs de hanche ou une fausse pubalgie.
La souffrance mécanique d'un des segments de cette charnière (dérangement intervertébral mineur de D11-D12 ou de D12-L1) en est responsable. 
Cette souffrance peut provoquer :
1) l'irritation de la branche postérieure du nerf rachidien correspondant et cela provoque des lombalgies basses, perçues dans la région lombo-fessière. Ces lombalgies constituant pour l’auteur 60 p. 100 des lombalgies communes, plus fréquentes pour Robert Maigne que l’origine L4-L5 ou L5-S1 classiquement invoquée.
Il en décrit les signes particuliers et le traitement.
2) l’irritation chronique de la branche antérieure du 12ème nerf rachidien dorsal ou du 1er nerf lombaire se traduit par des douleurs trompeuses pseudo-gynécologiques, pseudo-urologiques ou pseudo-digestives. Le seul témoin de l’irritation du nerf étant une zone de cellulalgie dans son dermatome (région abdominale inférieure, aine, pubis) que met en évidence la manœuvre du pincé-roulé correctement faite.
3) l'irritation du 12ème nerf dorsal peut aussi par son rameau perforant latéral se traduire par une douleur de la face externe de la hanche, donnant un tableau de fausse douleur de hanche rebelle.
Il n'y a le plus souvent aucun signe radiologique particulier au niveau de 1'étage dorso-lombaire responsable et le diagnostic est donc strictement clinique, c'est la mise en évidence d’un dérangement intervertébral mineur D11-D12, ou D12-L1 sur les signes décrits par l’auteur.
Si c'est la branche antérieure de L1 qui est irritée, le tableau est celui d'une fausse pubalgie.
Le traitement consiste en manipulations si elles sont possibles ou en infiltrations de l’articulation inter-apophysaire et de la branche postérieure responsable en cas de lombalgie ou de la branche antérieure en cas de douleurs antérieures.
La physiothérapie, le massage, le traitement local des zones infiltrées de cellulalgie sont des moyens complémentaires utiles.
Ces manifestations peuvent être isolées ou associées. Leur fréquence et les erreurs de diagnostic auxquelles elles peuvent donner lieu font l’intérêt de ce syndrome de charnière dorso-lombaire D12-L1.
Bibliographie: ouvrages de Robert et de Jean Yves Maigne dont je recommande vivement la lecture attentive; ils sont la référence absolue pour les médecins de médecine manuelle et orthopédique. 

 

Introduction à la pathologie des Lancers en Athlétisme (un peu d'histoire, quelques anciens et plus jeunes lanceurs et lanceuses de l'EDF, un peu de physiologie et de neurophysiologie de l'exercice musculaire, à côté de l'explosivité qui est le relation entre la force utile de Didier Poppé et la vitesse , importance de la coordination et de l'adresse prônées par Jacques Pelgas et les objectifs et moyens pour lancer loin)

 Introduction à la Pathologie des Lancers en Athlétisme 

Un Lanceur de Haut Niveau est par définition un athlète avec une intelligence motrice hors du commun, cette dernière se définissant comme une adaptation optimale aux diverses situations avec résolution de tous les problèmes moteurs rencontrés. Intelligence motrice que les professeurs d'EPS se doivent de développer chez tout enfant scolarisé et que les coachs de Lancers doivent amener à leur quintessence. Le socle de cette intelligence motrice est la sensori-motricité du mouvement à partir de laquelle elle se met en place par étapes successives de construction et de stabilisation avec participation active de la mémoire et de l’expérience qui sont essentielles afin de différencier ce qui permet la réussite de ce qui provoque l’échec, puis intégration du fruit de cette différenciation par exploration des extrêmes et ajustement progressif des réponses (A. Piron).
Si lancer loin est l'apanage d'un tout petit nombre, c'est avant tout lancer bien, l'acquisition du geste technique juste, étroitement lié aux qualités de force/vitesse, de coordination et d'adresse est fondamental et loin d'être un long fleuve tranquille. Avoir un gabarit hors nombre est un plus indéniable, mais sans un travail acharné de force/vitesse des membres supérieurs et inférieurs, cet avantage naturel disparaît.
Les contraintes articulaires et rachidiennes pour acquérir l'indispensable force explosive allant au delà des seuils de résistance physiologique, la blessure est omniprésente à très haut niveau, d'où l'impérieuse nécessité d'un encadrement médical de proximité de qualité que l'on ne saurait trouver sous les sabots d'un cheval. Feindre d'ignorer cette évidence, c'est faire prendre un risque inconsidéré à nos meilleurs Lanceuses et Lanceurs.


Dr Louis Pallure

Les Lancers en Athlétisme sont au nombre de 4 : poids, disque, javelot et marteau. L'objectif pour tout Lanceur est d'envoyer ces différents mobiles le plus loin possible, avec une vitesse d’envol maximale. Chacun des 4 Lancers se caractérise par une phase de lancement dont le temps essentiel est une accélération progressive à l'intérieur de l'aire de lancer et une phase de vol dont la hauteur par rapport au sol et la distance seront fonction de la morphologie du lanceur, de ses qualités musculaires, de son niveau technique et de l'angle d'envol par rapport au sol  : autour de 42° pour le poids, 35° pour le disque, 34° pour le javelot et 44° pour le marteau (Bartonietz 1993), mais aussi des conditions climatiques dans les 3 lancers longs (javelot, disque, marteau). 
Un peu d'histoire
Le Lancer de poids 
Il est connu depuis l’Antiquité. Celui mesuré à Olympie avec la pierre de Bybon n’a que très peu de rapport avec la pratique contemporaine. A partir du XIIème siècle il fait son apparition dans l’éducation des jeunes princes britanniques et ce n’est qu'au XIXème siècle que le poids a pris la forme sphérique que nous lui connaissons et que sa masse a été officialisée à 7,260 kg pour les hommes, en référence au poids du boulet de canon utilisé dans l’artillerie de cette époque, et celle des femmes à 4 kg. Le Lanceur lance d'une seule main, poids au contact avec le cou tout au long du déplacement à l’intérieur d’un cercle de 2,135 m de diamètre et selon deux techniques de lancer : la  technique en translation de O' Brien utilisée encore par un grand nombre de Lanceurs et Lanceuses (dont Jessica Cérival) et celle en rotation de Barichnikov, proche de la technique du Lancer de disque, technique dominante chez les meilleurs lanceurs Hexagonaux (Frédéric Dagée, Antoine Duponchel, Jordan Guehaseim) et Mondiaux comme on a pu le voir au tout récent championnat du monde à Doha. Compte tenu du déplacement plus grand de l’engin et d'une phase d’accélération plus importante, la rotation est d'un niveau technique supérieur à la translation.
Le Lancer de disque
A ses origines dans la Haute Antiquité le disque était en pierre; de nos jours l’engin est en bois ou en métal et entouré d’une jante métallique. Sa masse est de 2 kg pour les hommes et 1 de kg pour les femmes. Dans le cercle, le lanceur tourne le dos à l’aire de réception, le disque posé dans la main dominante repose sur la dernière phalange. La phase de préparation débute lorsque le bras tendu dans l’axe des épaules se met en mouvement; s’ensuit ensuite une volte d’un tour et demi avec augmentation progressive de la vitesse. Pendant la phase d’éjection l’action coordonnée des membres inférieurs, du tronc et du membre supérieur permet d’augmenter la vitesse du disque jusqu'à son éjection à une vitesse de 25 m.s-1, pour une durée totale du mouvement inférieure à 1,5 s. 
Le Lancer de marteau 
C’est au Moyen Age en Irlande et de nos jours au cours de jeux traditionnels dans les pays Celtes que le lancer de marteau, alors simple marteau de forgeron, est apparu pour répondre aux exigences de l’éducation des princes. Actuellement il est composé d'une tête métallique, d'un câble et d'une poignée et l’ensemble a une masse de 7,260 kg pour les hommes et de 4 kg pour les femmes. Le lancer de marteau diffère des lancers de poids et de disque en ce sens qu’il est réalisé  les deux membres supérieurs tendus, que la phase d’éjection n’implique pas une extension des membres supérieurs (la puissance est essentiellement produite par les membres inférieurs), que le déplacement au sein de l’aire de lancer est plus important et qu'une part non négligeable de la force produite par les membres supérieurs sert à résister à la force centrifuge exercée sur le lanceur par le marteau. Techniquement, au départ le lanceur fait tourner le marteau autour de lui pour lui donner de la vitesse et lorsque le marteau a suffisamment d’élan, l’athlète se déplace sur 4 tours avant éjection. A chaque tour, la vitesse du marteau est augmentée de façon significative grâce à l’action synchrone des membres inférieurs, du tronc et des membres supérieurs. Au moment de l’éjection finale, la vitesse du marteau est d’au moins 29 m.s-1 et par rapport au lancer de poids, en raison du déplacement plus important dans l’aire de lancer, malgré une masse équivalente, la vitesse d’éjection du marteau est presque deux fois supérieure à celle observée pour le poids et la durée totale du mouvement à compter du début du premier tour est de l'ordre de 2 à 2,5 s. Il faut noter que la longueur des membres supérieurs influence le rayon de giration et donc la vitesse horizontale du marteau.
Le Lancer de Javelot
C'est le plus ancien et le plus naturel des Lancers. Nos lointains ancêtres se le sont approprié à la fois pour se nourrir et se défendre. Introduit, tout comme le lancer de disque, dans la Grèce antique aux Jeux Olympiques de 708 av J-C, il va constituer l'une des cinq épreuves du pentathlon et jusqu'à l'effondrement du monde grec il est resté l'une des activités les plus pratiquées dans tout le bassin méditerranéen. En 1908 c'est tout naturellement qu'il a été réintroduit aux Jeux Olympiques modernes. Sa masse est de 800 g chez les Hommes et de 600 g chez les femmes. C'est un lancer extrêmement technique et traumatisant. Contrairement aux 3 autres lancers, sa course d'élan est longue (30m) et dans le premier temps, c'est une course classique, javelot placé sur le côté; dans un deuxième temps dit de préparation, le lanceur placé de profil se déplace en pas croisé (Hop), javelot placé au niveau de la tempe et bras lanceur en position d'armé; dans la dernière phase avant lancer, la course est arrêtée violemment sur un double appui et toute la vitesse de déplacement est transmise dans l'épaule, laquelle va se détendre comme une fronde pour propulser le javelot.
Quelques anciens et plus jeunes Lanceurs et Lanceuses de l'équipe de France d'Athlétisme 
Quatre d'entre eux ont participé aux championnat du monde d'Athlétisme à Doha : Alexandra Tavernier et Quentin Bigot au marteau (médaille d'argent), l'inoxydable Mélina Robert Michon (toujours présente à haut niveau) au disque et la grande espoir du javelot Alexie Alaïs (sur le retour après  blessure).





Un peu de physiologie de l'exercice musculaire
Les ressources métaboliques 
L'exécution du geste dans les lancers de poids, disque et marteau étant inférieur à 3 secondes, il correspond à un exercice d’intensité maximale et de durée brève, anaérobie alactique (voie du phosphagène), de type force explosive et il en est de même pour le javelot malgré une course d'élan plus longue. Dans la mesure où en compétition chaque essai est entrecoupé de plusieurs minutes de repos, on peut conclure que les ressources (stock) en phosphagène se reconstituent entre les essais et ne seront donc pas un facteur limitant de la performance dans les 4 disciplines. 
1- L'ATP 
En biologie cellulaire, l'ATP (adénosine tri phosphate) a une importance fondamentale dans le domaine des échanges d'énergie. C
'est une molécule chimique riche en énergie qui en se combinant aux 2 protéines contractiles musculaires d'Actine et de Myosine va libérer de l'énergie. Il intervient pour transporter l'énergie à l'intérieur de chaque cellule humaine depuis la graisse ou le sucre apporté par la circulation dans les cellules jusqu'à l'usine qu'est la Mitochondrie où vont se produire les réactions chimiques successives nécessaires à la contraction musculaire. La réserve d'énergie sous forme d'ATP dont dispose l'organisme pour accomplir un travail musculaire est faible et ne permet qu'un exercice physique de quelques secondes. Seul le renouvellement constant des molécules d'ATP va permettre à la contraction musculaire de se poursuivre.


2- L'OXYGENE (O2). L'oxygène est une molécule chimique déterminante dans l'activité musculaire. Sa présence ou son absence dans la cellule musculaire au moment de l'activité physique va conditionner le déroulement de la réaction chimique productrice d'énergie.
- en présence d'O2 (en aérobiose) le bilan énergétique provenant de la dégradation d'une molécule gramme de glucose (soit 180 grammes), carburant de toute cellule animale ou végétale et mis en réserve dans le foie et les muscles chez l'homme est de 39 ATP, soit 400 000 calories.
- en absence d'O2 (en anaéorobiose) le bilan énergétique provenant de la dégradation d'une molécule gramme de glucose est de 2 ATP. En anaérobiose la cellule musculaire a donc besoin de 19 fois plus de glucose pour produire la même quantité d'énergie et le même travail musculaire (rendement en anaérobiose 19 fois inférieur).
Cet oxygène prélevé au niveau atmosphérique est acheminé jusqu'au muscle par une chaîne dîte "de transport de l'oxygène"; le renouvellement de l'ATP au sein de la cellule musculaire va dépendre de la présence ou non de cet oxygène. 
3- LES FILIERES DE RENOUVELLEMENT DE L'ATP


Trois filières vont intervenir dans le renouvellement des molécules d'ATP:
- la 1ère filière est la filière Aérobie qui ne produit pas ou peu de déchets.
- les 2 autres sont des filières Anaérobies, dont l'une produit des déchets lactiques.
a- La filière aérobie
La filière aérobie correspond au processus de régénération de l’ATP à partir de la dégradation complète des glucides (cycle de Krebs), des lipides (béta oxydation des acides gras) et même des Acides Aminés pour les performances de longue durée > 3 heures.
Cette filière O2 qui utilise majoritairement comme carburant les sucres et les graisses (glycogène et acides gras) est inépuisable quand elle utilise comme carburant les graisses.
Elle permet une production constante et élevée d'ATP. Dans un effort de longue durée cette filière permet la reconstitution du stock d'ATP sous forme de Phosphagène, très vite épuisé et l'élimination de l'Acide lactique, déchet d'une des 2 filières anaérobies. Ce dernier mécanisme d'élimination des déchets lactiques est encore appelé "paiement de la dette d'oxygène. Championne toute catégorie de la production d'énergie cette filière Aérobie a toutefois un inconvénient, sa grande inertie, le débit maximal n'étant obtenu qu'après plusieurs minutes d'effort.
b- La filière du Phosphagène ou filière ATP-PC anaérobie alactique
C'est la 1ère filière Anaérobie conduisant au renouvellement de l'ATP ou filière du Phospagène qui représente l'ensemble des réserves d'ATP et de Créatine phosphate (PC) présentes au niveau des muscles. C'est une source d'énergie précieuse intervenant dans les efforts brefs et de grande intensité de quelques secondes en puissance (pic de puissance à 6 secondes), qualité naturelle peu améliorable et correspondant au débit du robinet, jusqu'à 20-25 secondes en capacité (qualité acquise grâce à un entraînement spécifique dit de capacité de vitesse et correspondant au réservoir). Cette filière ne produit pas de déchet (filière alactique).
c- Conception classique de la filière LACTIQUE (AL). 
C'est la 2ème filière Anaérobie de production d'ATP. Elle utilise comme carburant le glucose. Ce glucose utilisé en anaérobiose aboutit à la production d'Acide lactique, poison musculaire qui s'accompagne de douleurs et de contractures musculaires locales caractéristiques et d'une fatigue réelle. Cette filière lactique capable de fournir de l'énergie pendant 30 secondes à une mn en puissance (robinet) et jusqu'à 3 minutes en capacité (réservoir) n'atteint son débit maximal qu'après quelques secondes; elle intervient dans les efforts supra-maximaux (400 m en athlétisme, 100 m en natation).
d- Conception moderne de la filière lactique. 
Pour résumer la conception moderne de la filière lactique, les lactates ne sont plus le méchant de la classe et la toxicité des lactates est un mythe que G Tavaillant résume par la formule suivante: " il est à présent incontestable que le lactate ne peut plus être considéré comme l'ennemi du sportif. Au contraire, tout indique que de nombreux aspects de la production de lactate sont bénéfiques pour les performances athlétiques." 
4- LA CONTINUITE ENERGETIQUE. 
L'ATP est la forme immédiate d'énergie renouvelable par 3 filières: une Aérobie, les deux autres Anaérobies. La capacité de chaque filière à fournir de l'ATP va dépendre du type d'activité exercé. A une extrémité il y a les activités brèves et intenses inférieures à 20 secondes: lancers, sprint, accélérations, dans lesquelles la presque totalité de l'ATP provient de la filière du Phosphagène. A l'autre extrémité l'énergie nécessaire aux activités de longue durée (de 15 mn jusqu'à l'infini) est du ressort presque exclusif de la filière O2 . Entre les deux se situe la filière lactique. Pour progresser dans une activité physique donnée il s'agira pour le sportif d'améliorer sa vitesse dans sa filière dominante.

  

A côté de l'explosivité qui est la relation entre la force utile et la vitesse, importance de la coordination et de l'adresse dans les Lancers
La coordination est une qualité physique de base (avec la force/vitesse et l'adresse)) dans la gestuelle des Lancers. On peut la définir comme la capacité optimale à maîtriser et gérer de manière sûre et économique les différentes tâches motrices prévisibles et imprévisibles constitutives du geste technique juste, à la base de toutes les performances du système sensori-moteur. Tout mouvement de Lancer quel qu’il soit est d’abord une performance coordinative du système sensori-moteur, performance par ailleurs impossible sans la force, la vitesse n'étant qu'une performance de force chapeautée par la coordination et l'adresse.
La sensori-motricité
On peut la définir sur le plan neuro-physiologique comme l'inter-action entre les fonctions musculaires et nerveuses avec :
- d'un côté, le sensoriel qui correspond à la prise d'informations et leur acheminement vers le système nerveux central (cerveau et moelle épinière) 
- de l'autre, la motricité qui correspond à la contraction musculaire.
La prise d’information va se faire via des récepteurs qui sont des capteurs qui vont informer le cerveau en permanence  : 
- récepteurs visuels et du système vestibulaire de l'oreille interne, ces derniers donnant des renseignements sur la position et les mouvements de la tête dans l’espace
- proprio-récepteurs des muscles, des tendons et des articulations de la tête, du rachis cervical et de la zone du pied, renseignant sur la position et les mouvements des différents segments corporels et sur le tonus musculaire.
A noter que la sensori-motricité précède l'intelligence motrice. Cette intelligence motrice  construit les savoirs et les connaissances propres aux différents domaines de la motricité, cette motricité étant l'activité du corps qui inclue la conscience et les sensations (A. Piron), comme peut l'être la pensée, qui est l'activité de l'esprit.
Les  voies nerveuses
Les voies nerveuses afférentes sont constituées par les nerfs sensitifs et les voies efférentes, par les nerfs moteurs et leurs circuits neuronaux spinaux et supraspinaux qui vont commander les différents muscles effecteurs intervenant dans la gestuelle des Lancers (grands fessiers pour la hanche, quadriceps et triceps sural pour le genou, rhomboïdes, fixateurs de l’omoplate, adducteurs d’épaule : grand pectoral et deltoïde antérieur, triceps brachial extenseur du coude.

Les afférences sensorielles de la proprioception: les Fuseaux Neuro- musculaires et le système Gamma pour le reflexe myotatique

Les fuseaux neuro-musculaires 


Ils sont situés à l'intérieur du muscle. Ce sont des mécanorécepteurs, sensibles aux états et aux variations de longueur du muscle. 
Ces fuseaux ont plusieurs rôles :
- ils informent sur l'état d'allongement des fibres musculaires :
- leur degré d'excitation augmente en cas d'allongement lors de la réalisation d'un étirement et diminue en cas de raccourcissement lors de la contraction musculaire.
- ils informent sur la vitesse de l'étirement ou du raccourcissement des fibres intrafusoriales.
- ils règlent le niveau de tonus musculaire involontaire (état de tension permanent du fuseau).
- ils interviennent dans le réflexe myotatique (réflexe d'étirement)
- ils facilitent la contraction musculaire en provoquant un feedback positif : l'étirement brusque du muscle provoque sa contraction réflexe. 
Rappelons qu'un réflexe est une réponse musculaire involontaire, stéréotypée et très rapide à une stimulation sans qu'il y ait intervention du cortex cérébral ou de la volonté et la voie neurologique qu'il emprunte est un circuit court, monosynaptique. 
Le système vestibulaire des Labyrinthes: canaux semi-circulaires, succules, utricules, nerf vestibulaire, intervient dans l'équilibre, la coordination  et l'adresse    
                                          
                                   

Les voies visuelles interviennent dans la coordination et l'adresse


Les voies Somesthésiques cutanées et articulaires de la propioception interviennent dans le contrôle du regard, de l'équilibre tête tronc, de l'équilibre global.


La sensori-motricité peut être entraînée  par des exercices de force, d'adresse et de coordination entre les différents muscles intervenant dans la gestuelle des Lancers (coordination inter-musculaire) et à l'intérieur des muscles (coordination intra-musculaire); la finalité étant d'optimiser le déroulement des différents processus moteurs conduisant au geste technique efficient.
L'Adresse dans les Lancers
On vient de voir l'importance de la Coordination dans les Lancers. Une autre qualité physique de première importance, c'est l'Adresse. Coordination et Adresse sont des activités sensori-motrices qui font intervenir les récepteurs extéroceptifs visuels et cutanés et proprioceptifs (oreille interne, muscles, articulations, tendons, ligaments) et le cortex cérébral hémisphérique et limbique (programmation centrale et circuit de la mémoire) et  partagent la même problématique d'acquisition et de maîtrise  du geste
L'adresse enrichit le bagage technique du sportif en coordonnant les actions motrices simultanées et la précision dans l'espace, dans le temps et dans les rythmes et elle est facteur d' économie dans l'effort  (V. M. Zatsiorski). Elle devrait être introduite très tôt (Baby Athlé) dans les activités de Lancer, les enfants étant capables d'assimiler parfaitement une gestuelle complexe sans avoir à passer par la case gestuelle élémentaire (analytique).
A propos de la gestuelle des Lancers, elle est de type stéréotypée, comme en gymnastique, courses de haies et sauts en athlétisme et son apprentissage sera plus simple que pour les activités sportives à gestuelle non stéréotypée comme celle des sports de combat ou collectifs ou le slalom en ski, dans lesquelles l''apprentissage doit passer par l'acquisition, puis la maîtrise de situations motrices nouvelles et variées, la réponse adaptative à une situation mouvante étant déterminante. A noter toutefois qu'en Athlétisme, l'Adresse n'est spécifique que d'une seule discipline athlétique et ne s'étend pas aux autres spécialités athlétiques. 
Objectif et moyens pour lancer loin
Lancer loin nécessite des qualités de coordination, d'adresse et de force/vitesse des membres inférieurs et supérieurs qu'il est possible de mesurer pour cette dernière, par des tests de laboratoire sur ergocycle (Sargeant et Wingate) et des tests de terrain : demi-squat  pour tester la force des membres inférieurs et développé-couché pour tester celle des membres supérieurs (Bosco, Rahmani, Izquierdo, Cronin). Peu d'études, en dehors de celles de Bouhlel en 2007 sur le javelot et d'Olivier Rambaud en 2008 pour les autres lancers, ont corrélé force et vitesse des membres avec la performance dans les 4 disciplines de Lancers. 
Les ressources mécaniques 
La performance en Lancer est fonction de la vitesse d'envol. Pour imprimer à l’engin une vitesse d’envol maximale, le lanceur doit produire un niveau de force élevé sur un temps très court, le déplacement du système lanceur-engin étant limité par la taille de l’aire de lancer, cela renvoie au concept de puissance qui dépend de l’aptitude des muscles impliqués à développer des niveaux de puissance élevés, avec corrélation significative entre la performance en lancer et la force musculaire des membres inférieurs et supérieurs, appréciée par la détermination du 1 RM (une répétition à charge maximale) en demi-squat et en développé couché. Bouhlel et coll. (2007) a démontré une relation significative entre la puissance maximale des membres  (déterminée sur ergocycle) et la performance en javelot.
La production de puissance maximale (PMax)
 est fonction :
1- de la longueur du muscle avec une relation tension-longueur optimale correspondant à un maximum de ponts d’union entre les filaments musculaires d’actine et de myosine (schéma ci-dessous).


2 -  de la vitesse de contraction des fibres musculaires de type II à contraction rapide développent une puissance maximale cinq à dix fois supérieure à celle des fibres de type I à contraction lente et atteignent cette valeur pour une vitesse optimale. 


3 - des éléments passifs aponévrotiques possédant des propriétés élastiques vont s’ajouter à la force produite par la composante musculaire contractile (les filaments musculaires d'Actine et de Myosine). 
Muscles mis en jeu dans les Lancers
Au niveau des membres inférieurs, l'extension du genou et de la hanche sollicite les muscles grands fessiers pour la hanche, quadriceps et triceps sural pour le genou; muscles également sollicités au cours du demi-squat. 
Au niveau des membres supérieurs interviennent : 
- les muscles rhomboïdes, fixateurs de l’omoplate; ils maintiennent la posture des membres supérieurs et travaillent en isométrie, dans les disciplines de poids, marteau et disque
- les muscles adducteurs d’épaule : grand pectoral et deltoïde antérieur travaillent en dynamique au cours des mouvements de lancer du poids et du disque et en isométrie au  lancer de marteau
- le muscle triceps brachial lors du mouvement d'extension du coude, travaille en dynamique au cours de l’éjection au lancer de poids et en isométrique au lancer de marteau. 
Ces muscles adducteurs d’épaule et extenseurs du coude sont également sollicités au cours du mouvement de développé couché. 
La raideur musculo-tendineuse 
Tout comme en sprint sur courte distance (40m), il a été démontré une relation significative entre la performance en Lancer et la raideur R, déterminée lors d’un exercice de rebonds maximaux des membres inférieurs. Relation en rapport pour le sprint, avec l’aptitude à accélérer sur la première partie d’un 100 m et dans les Lancers avec une relation significative entre la puissance lors d’un mouvement concentrique et la raideur des membres, un niveau de raideur musculo-tendineuse élevé permettant de maintenir dans des conditions optimales de longueur et de tension, les éléments contractiles d'Actine et de Myosine de la fibre musculaire, ce qui améliore la capacité de production de force. Enfin cette qualité de raideur permettrait une meilleure transmission de la force produite aux éléments du squelette dans la phase initiale du mouvement, permettant aux Lanceurs de développer et de transmettre rapidement des niveaux de force élevés, ce qui va se traduire par une forte accélération en début de mouvement. 
Mesure de la PMax des membres sup et inf 
Les premières études de mesure de la force musculaire ont été réalisées par Hislop et Perrine en 1967 sur des dynamomètres isocinétiques. Ce sont des appareils de mesure de la force musculaire dont la résistance s’adapte à un effort réalisé à vitesse constante. Ils mesurent de la manière la plus sécuritaire possible, le quotient de force entre agonistes et antagonistes. Ils constituent, en médecine de rééducation, un excellent moyen de bilan de la force musculaire après un traumatisme conséquent des membres et de suivi post traumatique de la récupération de cette force musculaire. Très adaptés au milieu médical, ces dynamomètres isocinétiques manquent malgré tout de pertinence quand il s'agira de mesurer la force musculaires des membres chez les sportifs de haut niveau et en particulier chez les Lanceurs, les mouvements humains en général et dans la pratique sportive étant caractérisés par des phases successives d’accélération et de décélération d’une masse constante (conditions iso-inertielles), cette force musculaire maximale ne peut être analysée qu'en laboratoire sur des plateformes de force, gold standard en matière de qualité de mesure de la force musculaire iso-inertielle, mais inadaptées en pratique chez des sportifs de force comme les Lanceurs. Une des bonnes solutions de remplacement sera alors d’étudier la force musculaire à partir de mouvements utilisant les mêmes groupes musculaires que ceux impliqués dans un exercice iso-inertiel : le demi-squat pour les membres inférieurs et le développé couché pour les membres supérieurs, mouvements se rapprochant à la fois des conditions d’exercice et de performance et très utilisés dans le cadre de l'entraînement de force/vitesse et donc très appropriés à l'évaluation des Lanceurs. 
Rôle de la vitesse d'envol
Une revue de la littérature démontre l’influence majeure de la vitesse d’envol de l’engin sur la performance en Lancer, vitesse d’envol maximale qui ne peut être atteinte que si le lanceur est apte à produire un niveau de force élevé sur un temps inférieur à 3 secondes.
Analyse par discipline
Les qualités musculaires des membres inférieurs des lanceurs de chaque discipline sont comparables lorsque Pmax est rapportée à la masse corporelle et il n’existe pas de différence significative entre les trois disciplines de poids, disque et marteau (seuls les Lanceurs de poids ont une Pmax significativement plus élevée de 20%, uniquement parce que leur poids de corps est plus élevé). Il est intéressant aussi de noter que les lanceurs de marteau ont des valeurs de Pmax des membres supérieurs très inférieures à celles des lanceurs de poids et de disque, en accord avec la spécificité du lancer de marteau, les bras restant tendus tout au long du mouvement (travail en isométrie), leur rôle étant de résister à la force centrifuge de l’engin tout en maintenant un rayon de giration optimale. En conséquence, ayant besoin de moins de force la part d’entraînement des membres supérieurs des lanceurs de marteau est très inférieure à celle des lanceurs de poids et de disque.
Relation entre force musculaire et performance
Il existe une relation significative entre la puissance maximale déterminée au cours des tests de demi-squat et mieux de squat complet et de développé couché et la performance réalisée en compétition dans les 3 disciplines de poids, disque et marteau, mais aussi au javelot. Relation en accord avec l’étude de Bouhlel et coll. (2007) qui montre l’influence significative de la puissance maximale des membres supérieurs et inférieurs, déterminée au cours d’un exercice sur bicyclette, avec la performance dans une population de lanceurs de javelots de niveau national. A noter que l’action des membres inférieurs permet de déclencher le mouvement, puis d’accélérer le système lanceur engin dans l’aire de lancer grâce à un mouvement de translation pour les lanceurs de poids et un mouvement de rotation pour les lanceurs de disque et les lanceurs de marteau. L’accélération finale de l’engin avant son éjection dépend ensuite de l’action des groupes musculaires du tronc et principalement des membres supérieurs. 
Pmax est corrélée avec MP (meilleure performance), surtout pour les lanceurs de poids avec relation significative entre la valeur de 1-RM déterminée lors d’un exercice de squat et la performance en lancer de poids dans une population de lanceurs confirmés.  
Il existe également une relation significative entre Pmax et MP dans chaque discipline. Les qualités de force et de vitesse des membres supérieurs sont également déterminantes dans la performance en lancer. Cette importance des qualités de vitesse est en accord avec l’analyse technique des différentes disciplines : les membres inférieurs permettent d’accélérer le système lanceur-engin, mais l’accélération finale de l’engin avant son éjection résulte de l’action du tronc et des membres supérieurs : grâce à l’action des membres inférieurs le lanceur et son engin atteignent des vitesses comprises entre 2,5 et 7 m.s-1 pour le lancer de poids et de disque respectivement. L’action du tronc et des membres supérieurs permet d’augmenter la vitesse de l’engin de 12,5 m.s-1 pour le lancer de poids et 18 m.s-1 pour le lancer de disque. L’atteinte de ces niveaux de vitesse est possible car la charge liée à la masse des engins respectifs est faible (7 kg environ pour le poids et 2 kg pour le disque). En accord avec la relation Force-Vitesse, les niveaux de vitesse atteints par chacun des engins sont en rapport direct avec leur masse respective. 
Applications dans le cadre de l’évaluation et de l’entraînement des lanceurs.
1- Ce sont les qualités de force explosive qui déterminent la puissance maximale et la performance en lancer et elles sont parfaitement déterminées par les exercices de demi-squat et de développé-couché. Une mesure de la raideur neuro-musculaire lors d’un exercice de rebonds est également conseillée. Pour les lanceurs de marteau, la mesure de 1-RM est certes très pertinente, mais la mesure de la force maximale isométrique sous barre guidée pour évaluer les membres supérieurs chez les lanceurs de marteau l'est également. 
2- Alors que l’analyse de l’aptitude aérobie par un test maximal est réalisée régulièrement dans les disciplines d'endurance afin de s’assurer du bon fonctionnement du système cardiovasculaire, à laquelle on peut associer la détermination de la cinétique lactique pour fournir des données utiles au contrôle de l’intensité des séances d’entraînement (fréquence cardiaque maximale et seuil lactique), dans les Lancers les qualités d'explosivité (relation Force-Vitesse) pourraient bénéficier en sus des tests de force maximale de terrain, d'un test de force-vitesse sur bicyclette ergométrique (test de Wingate ou variante plus courte jusqu'à la puissance Pic) .
Le Test de laboratoire Wingate (Ayalon et coll 1974).
Ce test explore le métabolisme anaérobie alactique et lactique. Le sportif effectue un effort violent sur bicyclette ergométrique de 30 secondes dont la résistance est fonction du poids corporel et de la cadence de pédalage. La capacité anaérobie lactique est difficile à distinguer de celle du métabolisme anaérobie alactique en raison de l’intervention physiologiquement quasi immédiate de la glycolyse anaérobie avec production de lactates dès les premières secondes de l’exercice. Elle prend en compte la P max (puissance maximale) observée dans les 5-8 premières secondes (en prenant en compte l'inertie de l'ergocycle) et la capacité lactique (puissance moyenne sur les 30 secondes).Trois indices peuvent être retenus pour ce test:
- Puissance pic (des 5-8 première secondes). Le pic de puissance correspond à la puissance maximale alactique.
- Puissance moyenne sur toute la durée du test de 30 secondes = puissance métabolisme anaérobie lactique + alactique (après avoir atteint le pic de puissance maximale, on observe ensuite une baisse continue de puissance).
- Endurance anaérobie lactique = faculté de soutenir un fort pourcentage de la Puissance pic (Ppic/Pfin test).
Résultats du test: ce test est intéressant dans les sports de haut niveau à forte capacité anaérobie comme le cyclisme sur piste, le patinage de vitesse, le hockey sur glace, etc.
Il peut être aussi utilisé pour le contrôle du développement musculaire après blessure ou pour suivre les effets d'un entraînement spécifique. Dans les Lancers en Athlétisme, la détermination du Pic de Puissance est nécessaire et suffisante.
L’ergomètre cyclus 2 (de type électronique et isocinétique) est parfait dans sa conception pour le test anaérobie de Wingate, les paramètres du test pouvant être réglés facilement dans le masque de saisie.
L’effort demandé sera fonction du poids du sujet et de la force de pédalage (il est possible d'effectuer le réglage comme il est courant de le faire sur un ergomètre Monark, kilogramme par kilogramme de poids du corps).
Le sujet roule graduellement pour obtenir la fréquence de pédalage de début de test, puis accélère à fond après l’avoir atteint.
En fin d'effort, les résultats d’évaluation sont indiqués sur l’écran de contrôle et peuvent être recueillis sur une imprimante connectée au cyclus 2.
Les tests d’évaluation constituent une appréciation portée sur une activité sportive et sur le pratiquant, selon des critères préalablement définis. Elle éclaire la décision de l'éducateur sportif dans de nombreux domaines : orientation sportive du débutant, détection du talent sportif, sélection du compétiteur, organisation et suivi de l'entraînement, etc.
Quels que soient les tests utilisés, ceux ci montrent que les valeurs de puissance maximale anaérobie sont supérieures chez les athlètes pratiquant des sports de puissance et de vitesse et lorsque les épreuves sont proches des exercices réalisés à l’entraînement ou en compétition.
Conclusion 
Il existe une corrélation entre la PMax des membres inférieurs et supérieurs testés sur 1 RM en demi-squat, squat complet et développé-couché et la performance dans les  Lancer de poids, disque et marteau et aussi au javelotDifférentes études ont également souligné l’importance d’un niveau de raideur élevé pour être performant lors d’un exercice explosif, avec relation significative entre la raideur des membres supérieurs et la force maximale isométrique ainsi que le travail réalisé pendant la phase concentrique d’un mouvement de développé couché. Les athlètes avec un niveau de raideur des membres supérieurs élevé ont un niveau de puissance maximale et une vitesse de montée en puissance supérieurs lors d’un exercice de développé couché en mode concentriqueL'exploration force-vitesse sur ergocycle (test de Wingate jusqu'au Pic de Puissance) peut être intéressante pour déterminer les qualités musculaires spécifiques propres à chaque Lancer. Cette analyse semble en accord avec les contraintes techniques de chaque discipline de lancer. 
Bibliographie 
Bouhel, 2007 relation force-vitesse chez les Lanceurs de Javelot.
O. Rambaud, 2008 : Facteurs musculaires associés à la performance en lancer. Exploration par l’analyse des relations Force-Vitesse et Puissance-Vitesse.
Les cahiers EPS, n°34 : construction-évolution de l'intelligence motrice