Avis à lire par tous les lecteurs:

Les premiers articles du blog "Un médecin du sport vous informe" datent de 2013, mais la plupart sont mis à jour pour pouvoir coller aux progrè médicaux. Ce blog inter-actif répond à la demande de nombreux confrères, kinésithérapeutes, étudiants en médecine et en STAPS, patients et sportifs. Il est le reflet de connaissances acquises tout le long de ma vie professionnelle, auprès d'enseignants remarquables, connaissances sans cesse actualisées que je me suis efforcé de rendre accessibles au plus grand nombre par le biais d’images trouvées sur le Net, images qui sont devenues par la force des choses, la propriété intellectuelle de tous; si cela dérange, ces images seront retirées.

Certains articles peuvent apparaître un peu plus polémiques que d'autres et indisposer, mais il n'est pas question pour l'auteur de tergiverser ou de se taire, quand il s'agit de problèmes d'éthique, en particulier en matière de dopage et quand la santé des sportifs est en jeu, compte tenu du nombre élevé de blessures liées au surentraînement et à une pratique imbécile d'une certaine musculation, qui n'est plus au service de la vitesse et de la force explosive utile (et non de la force maximale brute), qui sont les deux qualités physiques reines, qui ne respecte pas les règles de la physiologie musculaire et qui, au lieu d'optimiser la performance, fait ressembler certains sportifs body-buildés à l'extrême, davantage à des bêtes de foire gavées aux anabolisants, qu’à des athlètes de haut niveau.

Ce blog majoritairement consacré à la traumatologie sportive, est dédié à mes maîtres les Prs Jacques Rodineau, Gérard Saillant et à tous les enseignants du DU de traumatologie du sport de Paris VI Pitié Salpétrière et en particulier aux docteurs Jean Baptiste Courroy, Mireille Peyre et Sylvie Besch. L'évaluation clinique y tient une grande place: "la clinique, rien que la clinique, mais toute la clinique" et s'il y a une chose à retenir de leur enseignement, c'est que dans l'établissement d'un diagnostic, l'examen clinique, qui vient à la suite d'un bon interrogatoire, reste l'élément incontournable de la démarche médicale. Toutefois dans le sport de haut niveau et guidé par la clinique, l'imagerie moderne est incontournable : radiographie conventionnelle, système EOS en trois dimensions pour les troubles de la statique rachidienne, échographie avec un appareillage moderne et des confrères bien formés, scanner incontournable dans tous les problèmes osseux et enfin IRM 3 Tesla, le Tesla étant l'unité de mesure qui définit le champ magnétique d'un aimant; plus le chiffre de Tesla est élevé et plus le champ magnétique est puissant ("à haut champ") et plus les détails des images sont fins et la qualité optimale.

Hommage aussi au Pr Robert Maigne et à son école de médecine manuelle de l'Hôtel Dieu de Paris ou j'ai fais mes classes et actuellement dirigée par son fils, le Dr Jean Yves Maigne. Je n'oublie pas non plus le GETM (groupe d'étude des thérapeutiques manuelles) fondé par le Dr Eric de Winter et ses enseignants, tous des passionnés; j'y ai peaufiné mes techniques et enseigné la médecine manuelle-ostéopathie pendant 10 années.

Dr Louis Pallure, médecin des hôpitaux, spécialiste en Médecine Physique et Réadaptation, médecin de médecine et traumatologie du sport et de médecine manuelle-ostéopathie, Pr de sport et musculation DE, ex médecin Athlé 66, comité départemental 66, ligue Occitanie et Fédération Française d’Athlétisme, médecin Etoile Oignies Athlétisme.

vendredi 21 mars 2014

Désinsertion traumatique du ligament triangulaire du poignet

Le mécanisme lésionnel d'une désinsertion traumatique isolée du ligament triangulaire du poignet est le plus souvent une chute vers l’arrière sur le talon de la main positionnée en pronation et inclinaison cubitale. Sa traduction clinique correspond à un poignet discrètement tuméfié et douloureux sur son versant cubital et parfois instable accompagné de claquement. Même si le traumatisme est en apparence peu important, il faut se dépêcher de l’adresser à un chirurgien spécialisé SOS Main, tellement son diagnostic qui relève spécifiquement d’une exploration par arthroscopie et sa prise en charge thérapeutique demande des connaissances approfondies que seul un chirurgien orthopédique spécialisé est capable de maîtriser parfaitement.
En effet le ligament triangulaire en tant qu’amortisseur de contraintes entre le bord inférieur de l’articulation radio-ulnaire distale et le versant interne de la 1ère rangée du carpe tout comme les ligaments intrinsèques de stabilité scapho et pyramido-lunaire interviennent de manière conséquente dans la biomécanique du poignet et se trouvent fréquemment lésés dans les traumatismes du poignet avec chute sur le talon de la main soit de manière isolée, soit associée à des lésions osseuses du radius pour le ligament Triangulaire, soit du scaphoïde pour les ligaments intrinsèques scapho et pyramido-lunaires.

                              
                                  Imagerie classique du ligament triangulaire


            Imagerie des ligaments intrinsèques scapho et pyramido-lunaires

Le TFCC
1) Ligaments radio-ulnaires distaux antérieur et postérieur. 
2) Fibrocartilage triangulaire. 
3) Ligaments ulno-carpiens (ulno-lunaire et ulno-pyramidal).
4) Ménisque homologue
5) Gaine tendineuse du cubital antérieur ( extenseur ulnaire du carpe: EUC).

                 



L'Extenseur ulnaire du carpe (cubital antérieur) à des rapports étroits avec le ligament triangulaire

Physiopathologie
     La description anatomique du ligament triangulaire a grandement bénéficié des progrès de l’imagerie moderne, en particulier de l’arthro-scanner mais surtout des avancées thérapeutiques avec l’avènement de l’arthroscopie du poignet qui a bouleversé la prise en charge chirurgicale de ses poignets ligamentaires post traumatiques en proposant des solutions thérapeutiques peu invasives.
Ces données nouvelles lui ont fait même changer de dénomination si bien que désormais on ne parle plus de ligament triangulaire mais de complexe fibro-cartilagineux triangulaire du carpe (TFCC des anglo-saxons). A noter qu’à partir de la cinquantaine, le ligament triangulaire peut dégénérer et se perforer, mais cette perforation est rarement symptomatique et de découverte arthroscopique fortuite après un traumatisme du poignet. Les lésions quelles soient post traumatiques ou dégénératives, sont favorisées par un os cubital trop long qui va venir prendre en sandwich le ligament triangulaire par un effet butoir et le perforer en son milieu.
Biomécaniquement, en supination de la main, les 2 os de l’avant bras sont globalement alignés, tandis qu’en pronation, le radius s’enroule autour de l’ulna et se re trouve alors en position longue et vient agresser le ligament triangulaire en cas de mécanisme lésionnel de chute sur le talon de la main.
A noter qu’un certain nombre de lésions du ligament triangulaire sont associées à des fractures distales du radius qui forcément raccourcissent le radius et laissent l’ulna en position longue, raccourcissement qui peut être également secondaire à une ostéosynthèse défectueuse qui laisse le radius en position de consolidation trop courte.
Didier Fontès a particulièrement bien décrit anatomiquement le TFCC: il précise en particulier que son insertion radiale et les 3/4 centraux du disque sont constitués d’un fibrocartilage totalement avasculaire et donc dénué de toute possibilité de cicatrisation et que seul le quart périphérique et ulnaire du TFCC est vascularisé et donc avec des possibilités cicatricielles. L’attache radiale du TFCC se fait non pas sur le radius lui-même mais sur le cartilage hyalin qui le recouvre et il s’en suit une plus faible résistance mécanique et une vascularisation plus précaire.
La styloïde cubitale fait partie intégrante du TFCC qui s’attache sur sa base, ainsi toute
fracture siégeant à ce niveau devra être considérée comme une désinsertion du complexe triangulaire et être traitée comme telle. L’insertion fovéale du TFCC peut être avulsée partiellement ou sur la totalité de son épaisseur. L’imbrication anatomique dorsale entre la gaine de l’ECU et le TFCC permet une harmonisation entre système dynamique et passif de stabilisation de l’articulation radio-ulnaire distale.
Le diagnostic
Comme indiqué en préambule, le diagnostic d’une atteinte isolée du ligament triangulaire est une affaire de chirurgiens hyperspécialisés tellement la structure du TFCC est complexe et les possibilités thérapeutiques différentes suivant que la zone lésée est bien ou mal vascularisée, c'est-à-dire avec ou sans possibilité de cicatrisation.
En aigu le blessé se présente avec un poignet légèrement tuméfié sur son versant interne ulnaire secondairement à une chute en arrière sur le talon de la main positionnée en pronation et inclinaison cubitale+++.
La mobilisation douce en fin de pronation et de supination passive , coude bloqué à 90°est sensible, de même que l’inclinaison cubitale main en hyper- pronation.
La palpation antérieure du versant cubital s’accompagne d’une douleur exquise qui doit alerter l’examinateur.
La positivité de ces 3 signes doit sans attendre faire orienter le blessé vers une structure spécialisée en prenant bien soin au préalable de glacer ce poignet traumatique et de l’immobiliser dans une attèle en position neutre de fonction.
NB: La recherche d’un rabot douloureux de la radio-cubitale distale est un signe de lésion dégénérative. La recherche d’un claquement audible sur le versant cubital est un excellent signe, mais inconstant et il faudra le différencier d’un ressaut tendineux de l’ECU (cubital antérieur); des paresthésies du bord ulnaire peuvent parfois accompagner une lésion du TFCC. Il faut toujours compléter l’évaluation clinique par une palpation soigneuse des différents os du poignet qui s’avérera sans particularité en cas de lésion ligamentaire isolée.
L’imagerie
Les radiographies vont chercher à mettre en évidence un cubitus long et des signes d’hyperpression sur le versant interne de la 1ère rangée du carpe (géodes, sclérose sous chondrale). Les lésions pouvant être de l’ordre du millimètre, c’est l’arthrographie ou mieux l’arthro-scanner qui seront les plus contributifs en visualisant la fuite du produit de contraste et constituant en même temps un document médico-légal à surtout ne pas négliger (Fontès).



C’est toutefois l’arthroscopie entre des mains bien entraînées qui reste l’examen exploratoire le plus performant avec une sensibilité et une spécificité maximale de 100% ; elle seule permet d’apprécier l’élasticité du disque articulaire et les désinsertions fovéales qui sont généralement sous estimées par les explorations radiologiques.

La thérapeutique sera:
- ou médicale si la perforation est d’origine dégénérative ou devant un simple dérangement interne: immobilisation temporaire par attelle thermo-formée, médications anti-inflammatoires, physiothérapie.
- ou chirurgicale de réparation ligamentaire ciblée par voie arthroscopique avec agrandissement optique qui autorise des gestes précis et la possibilité d’y associer un geste d’ostéotomie de raccourcissement de l’ulna si nécessaire avec comme toujours le consentement éclairé du blessé. Chirurgie suivie de cryothérapie en post opératoire immédiat et de mobilisation passive précoce.
NB: en cas d'évolution post opératoire qui n'est pas rapidement favorable (persistances de douleurs, de fourmillements, de claquements, faire à nouveau appel au chirurgien qui soit rassurera le patient soit procédera à un geste complémentaire++++.
Sans tarder il ne faut pas hésiter devant un poignet douloureux post traumatique à faire une arthroscopie exploratrice+++ qui visualisera une ou plusieurs lésions ligamentaires intrinsèques du poignet et sera suivie d'une réparation ligamentaire qui alors aura les plus grandes chances de réussite+++.
Bibliographie
FONTES D (1992) Lésions ligamentaires associées aux fractures distales du radius - à propos d’une série de 58 arthrographies peropératoires - Ann Chir Main 11: 119-125.
FONTES D (1998) Les lésions du complexe triangulaire du poignet : mécanisme, diagnostic et conduite à tenir. La Main 3 : 61-68.Traitement arthroscopique des lésions du complexe triangulaire du poignet : à propos de 124 cas. La Main 3 : 17-22.
FONTES D (1998) Arthroscopie du poignet dans le traitement des fractures récentes et anciennes du radius distal, In Monographies de la SOFCOT : fractures du radius distal de l’adulte sous la direction de Y. Allieu. Exp.Scientifiques publications 195-207.

dimanche 16 mars 2014

Anatomie fonctionnelle de l’épaule

L'épaule est un ensemble articulaire à considérer comme un SAMA (système articulaire mécaniquement asservi) qui englobe la scapulo-thoracique (articulations acromio et sterno-claviculaires) et son espace de glissement omo-thoracique et la scapulo-humérale: articulation gléno-humérale et son espace de glissement sous-deltoïdien. Ce complexe de l'épaule est à la fois le plus mobile avec ses 3 axes de travail et ses 3 degrés de liberté articulaire, mais aussi potentiellement le plus instable de l'organisme qui sert à orienter la main dans les 3 plans de l’espace dans un but de préhension et de grimper. Scapulo-thoracique et scapulo-humérale fonctionnent non pas successivement, mais concomitamment grâce à l’action combinée des 19 muscles qui la composent (sur les 54 que comportent le membre supérieur). 
Pour le Montpelliérain François Bonnel, ces muscles agissent sous la forme de 25 couples de rotation, fonctionnant comme un seul muscle, si bien que la terminologie anatomique distinguant des mouvements de flexion-extension, d’abduction -adduction, d’élévation-abaissement et de rotation interne et externe s’avère tendancieuse, la mobilité en rotation constituant le seul substrat mécanique, tandis que les contraintes mécaniques que subit l’épaule sont telles que beaucoup d’épaules instables trouvent leur explication dans une désynchronisation musculaire.
Cette connaissance du fonctionnement de l’épaule a largement fait progressé les techniques de rééducation et de chirurgie et tout particulièrement le concept de stabilisation rotatoire dynamique articulaire tri-dimensionnel. La mobilité totale scapulaire permettant la préhension des objets dans toutes les directions sans toutefois occulter la nécessité de structures de stabilisation proximales très développées, corrélées avec le champ visuel. Cette corrélation permet de comprendre que la limitation de la rotation de la tête se répercute sur les possibilités de préhension. 
Pour Fick, la participation des différentes articulations est de 50 % pour la scapulo-humérale, 40 % pour l'acromio-claviculaire et 10 % pour la sterno-claviculaire.
Sur le plan anatomique et fonctionnel l’épaule est composée de :
I- 3 os formant une chaîne ostéo-articulaire instable :

                               

Les trois os: humérus, clavicule, omoplate (scapula) composant l'armature de l'épaule sont en position d'instabilité maximum au cours des différents mouvements, leurs surfaces articulaires de raccordement entre eux et avec le squelette axial étant comme nous le verrons éminemment discordantes, la disposition spatiale des 3 segments osseux étant orientés de manière divergente va favoriser l'instabilité rotatoire tri-dimensionnelle de Bonnel. La clavicule, très grêle, est le seul os de raccordement avec le squelette axial, quant à la scapula, elle est rattachée par son angle supéro-externe avec les articulations acromio-claviculaires et scapulo-humérale. Pour remplir le contrat de mobilité, les surfaces articulaires sont peu rétentives et ont des surfaces de contact articulaires très réduites : de 6 cm2 pour la surface glénoïde, de 3 cm2 pour la surface acromio-claviculaire et de 4 cm2 pour la sterno-claviculaire.
II- 3 articulations vraies: la gléno-humérale, l'acromio-claviculaire et la sterno- claviculaire


                                  

L’articulation gléno-humérale

          

L'articulation gléno-humérale appartient au groupe des énarthroses avec une surface sphérique humérale (1/3 de sphère). Son orientation en rétroversion assure un minimum de stabilité antéro-postérieure, limitant ainsi les risques de luxation. On note la présence de 2 tubérosités: les tubercules majeur (Trochiter) et mineur (Trochin) et d’une gouttière bicipitale inter-tubérostaire. Le cartilage qui recouvre la cavité glénoïde rend cette dernière particulièrement plane; glène agrandie toutefois par un fibro-cartilage: le bourrelet glénoïdien (labrum) dont la fonction est d’améliorer la concordance articulaire mais aussi hélas de subir d’importantes contraintes qui vont aboutir à sa destruction progressive. La valeur angulaire de la surface cartilagineuse de la tête humérale de 150° à 160° et celle de la glène de 60° rend compte de l'importance de la mobilité. Cette disposition anatomique prédispose à une grande mobilité aux dépend de la stabilité.
La capsule articulaire gléno-humérale et ses solutions de continuité antérieures, les ligaments gléno-huméraux, le ligament coraco-huméral qui participe à la suspension de l'humérus et joue un rôle de frein dans les mouvements de rotations et de flexion-extension de l’humérus (décollement capsulo-ligamentaire de Broca en pathologie), n’interviennent pour François Bonnel que très peu dans la stabilité de la gléno-humérale, cette stabilité étant dévolue quasi exclusivement sur le plan dynamique à la musculature péri-articulaire et à l’intégrité anatomique du labrum sur le plan statique (lésion de Bankart). 
L’articulation acromio-claviculaire
            
                                   

Une des caractéristiques de l’acromio-claviculaire est d’être soumise à des pressions brusques et importantes et d'être une articulation de souplesse dont la forme et surtout l'orientation des surfaces articulaires sont destinées à empêcher la clavicule de se déplacer vers le bas, (fréquence des luxations supérieures). 
La présence de l'articulation acromio-claviculaire permet une transmission souple des contraintes et évite à la scapula d'être dans un plan horizontal propulsée loin de la cage thoracique (Bonnel). Les facettes articulaires sont séparées à leur moitié supérieure par un croissant prismatique ou par un ménisque complet solidement amarré à l'acromion et plus lâchement à la clavicule. Il est le siège de lésions dégénératives dès la deuxième décade de l'existence (De Palma).
La stabilité est assurée accessoirement par la capsule renforcée par le ligament acromio-claviculaire. Les ligaments principaux sont extrinsèques : ligament trapézoïde, épais et quadrilatère, situé dans le plan frontal et ligament conoïde triangulaire, moins puissant, plus vertical que le précédent, et positionné en sagittal. Ils limitent l'amplitude des mouvements de la scapula et assurent ainsi le couplage mécanique. Les ligaments coraco-claviculaires médiaux et latéraux ne sont que des épaississements de l'aponévrose clavi-pectorale avec laquelle ils se confondent.
Avec des chiffres variables en fonction des auteurs (Fischer, Carret, Muller, Conway), 40% de l'élévation antérieure du bras, 60% de l’élévation postérieure et 13% de l'abduction du bras, reviennent en moyenne à l’acromio-claviculaire. En anté et rétropulsion, cette mobilité acromio-claviculaire s'accompagne d’un mouvement d'ouverture et de fermeture de l'angle scapulo-claviculaire limités par les ligaments conoïde et trapézoïde. Grâce à la forme incurvée en "S" de la clavicule, l'articulation acromio-claviculaire est également (Inman) le siège de mouvements de rotation axiale de la clavicule dans le godet articulaire ménisco-claviculaire controlés par les ligaments acromio-claviculaire et coraco-claviculaires.
La coaptation dynamique des surfaces articulaires est le fait des différents muscles: le trapèze tend à plaquer l'acromion sous la clavicule et renforce ainsi l'étroitesse de contact entre les surfaces articulaires en présence, le sterno-cléido-mastoïdien a tendance à écarter les surfaces articulaires en élevant la clavicule, le grand pectoral et le sous-clavier tendent à plaquer la clavicule sur l'acromion, le grand dorsal et le dentelé antérieur agissent indirectement en plaquant les surfaces articulaires l'une contre l'autre.
A cette articulation acromio-claviculaire se rattache l'ensemble syndesmosique constitué par l’apophyse coracoïde et la clavicule : en effet dans certains mouvements de l'épaule, la face inférieure de la clavicule entre en contact avec le processus coracoïde et les deux os glissent l'un sur l'autre jusqu’à développer quelques fois une néo-articulation coraco-claviculaire avec un encroûtement fibro-cartilagineux. 
L’articulation sterno-claviculaire
        
                     

L'articulation sterno-claviculaire est l’élément de jonction articulaire unique du membre supérieur au squelette axial. Elle appartient au groupe des articulations en selle. En fait, la surface articulaire de la clavicule se prolongeant à sa partie inférieure par le premier cartilage costal, il est plus juste de parler plutôt d’une articulation sterno-costo-claviculaire dont la stabilité est accrue par l’interposition d’ un fibro-cartilage intra-articulaire dont le rôle est d’amortir les contraintes transmises au sternum par le membre supérieur. La capsule articulaire est épaissie par les ligaments sterno-claviculaire antérieur et postérieur et inter-claviculaire. Le ligament costo-claviculaire extrinsèque à la capsule demeure le moyen de contention le plus efficace. 
Les déplacements angulaires sont variables et suivant les auteurs vont de 32° à 40° lors de l’abduction du bras (de La Caffinière, Carret et Fischer). Le ligament costo-claviculaire par sa position joue le rôle d'axe vis-à-vis de la clavicule que l'on peut comparer au fléau d'une balance. Les mouvements effectués sont: d' une part ceux d'élévation, d'abaissement d'une amplitude de 8 à 10 cm, et d'autre part d'antépulsion et de rétropulsion. L'association de ces mouvements aboutit à une rotation combinée dont les muscles trapèze, deltoïde, grand pectoral, sous-clavier et à un degré moindre sterno-cléido-mastoïdien sont les principaux moteurs. Le ligament costo-claviculaire est le frein au cours de l'élévation, alors que le ligament inter-claviculaire freine l'abaissement. 
Dumontier assimile l'articulation sterne-claviculaire au pied d’1 mât de planche à voile qui barre l’accès aux éléments nobles vasculo-nerveux et viscéraux de la jonction cou-tronc, avec gravité potentielle des luxations postérieures et danger potentiel des luxations rétro-sternales de la S/C, à cause des éléments nobles rétro sterno-claviculaires:
- gros vaisseaux: troncs artériel et veineux brachio-céphaliques = vaisseaux Innominés 
- nerfs : vague (Xème paire crânienne) et phrénique pour le diaphragme.
- veine jugulaire interne
- œsophage, et très en AR la trachée moins exposée.

Les différents éléments nobles vasculo-nerveux et viscéraux de la jonction cou-tronc

III- Deux espaces de glissement:
1- L'espace sous deltoïdien

                             

                                     
 Bourse séreuse de glissement sous-deltoïdienne

2- L'omo-thoracique
Elle est divisé en deux espaces par le muscle dentelé antérieur: l'espace inter-serrato-scapulaire et l'espace inter-serrato-thoracique. La justification mécanique de cet espace est due à ce que dans le premier temps de l'abduction (0° à 90°), les muscles responsables parviennent à leur limite de raccourcissement. Pour aboutir à une élévation de 180°, la solution adoptée est celle de la bascule de la scapula (mouvement de sonnette) grâce à un mouvement de rotation frontale de 25° à 50° selon les auteurs. La fin du mouvement d'élévation étant complétée par une inflexion rachidienne (Kapandji). L'amplitude des déplacements de la scapula est majeure lors de l'abduction et de la flexion.

                        

IV- Les 2 pyramides musculaires tronquées de raccordement spino- scapulo-huméral 
Le membre supérieur appendu au squelette axial par la ceinture scapulaire avec des surfaces de contact articulaire discordantes et réduites est obligé pour assurer une certaine stabilité, d'avoir des moyens de raccordement complémentaires extra-articulaires musculaires disposés sous la forme d'une pyramide tronquée à base axiale médiale spinale et à sommet latéral axillaire. Les parois de cette pyramide sont en dedans le muscle dentelé antérieur, en arrière les muscles trapèze et rhomboïde, en avant le muscle grand pectoral, en haut le muscle supra épineux et élévateur de la scapula (angulaire de l’omoplate), en bas le muscle grand dorsal. Ces muscles assurent la fixation de la scapula permettant la mise en action de l'articulation scapulo-humérale qui peut alors se déplacer sur un socle relativement stable. 
Au niveau de l'articulation scapulo-humérale, on retrouve le même système de stabilisation sous la forme d'une pyramide tronquée à base scapulaire et à sommet huméral. Les faces antérieures, externes et postérieures sont limitées par le deltoïde, la face interne est limitée par le muscle coraco-brachial.
V- Deux entités fonctionnelles bien distinctes qui se complètent: 
1- la scapulo-humérale avec son espace sous-acromial 
2- la scapulo-thoracique et ses plans musculaires.
L'espace sous-acromial

                

La cavité articulaire de cet espace sous-acromial y est pratiquement aussi large que celle du genou et sur son plancher se situent la coiffe des rotateurs et le TLB, tandis que la voûte est représentée par l’arche acromio-coracoïdienne: bord antéro-inférieur de l’acromion, ligament coraco-acromial et face inférieure de l’articulation acromio-claviculaire. C’est dans cet espace particulièrement sollicité en élévation et rotation que la pathologie dégénérative de la coiffe des rotateurs va se développer.
La scapulo-thoracique et ses plans musculaires :

                       

VI- des structures péri-articulaires et articulaires représentées essentiellement:
1- Par les tendons de la coiffe des rotateurs (supra et infra -épineux, sous scapulaire, TLBiceps.

                                

2- Par les ligaments gléno-huméraux, acromio-coracoïdiens, acromio-claviculaires; mais aussi par la capsule gléno-humérale vaste et lâche, le bourrelet glénoïdien ou labrum, les 2 tubérosités de la tête humérale (trochiter et trochin), l'apophyse coracoïde...


                                  

3- Par les structures nerveuses impliquées: 
- racine nerveuse C4 se projetant en scapulo-thoracique antérieur (branche antérieure de C4) et postérieur (branche postérieure de C4)
- racine nerveuse C5 avec points métamériques (deltoïdien externe, sillon delto-pectoral et en sus épicondylien latéral) à l'origine de douleurs référées de l'épaule.
- nerf sus-scapulaire et grand dentelé de Charles Bell.
VII- Le paradoxe de Codman est la parfaite illustration des couples de rotation tridimensionnels
C’est dans la réalisation du mouvement complexe de Codman que s’apprécie au mieux la fonction de stabilisation rotatoire tridimensionnelle des muscles de l’épaule chère à Bonnel. Son analyse objective est basée sur un mouvement successif de rotation interne et externe qualifié par Mac Conaill de "diadochodal" (Mac Conaill MA: Studies in the mechanics of the synovial joints: displacement on articular surfaces and significance of saddle joints. Irish J M. Sci., 223-235, 1946).

                                             

C'est dans son livre The Shoulder: Rupture of the Supraspinatus Tendon and Other Lesions In or About the Subacromial Bursa. Boston: Thomas Todd Co., 1934 que Codman parle de son paradoxe, et le décrit ainsi:
Si, partant de la position de référence du membre supérieur, pendant verticalement le long du corps, la paume de la main appliquée contre la cuisse, le pouce se dirigeant vers l’avant. 
 On effectue d’abord, membre supérieur étendu, une abduction de 180° dans le plan frontal, le portant jusqu’à la verticale.
Puis, à partir de cette position, on ramène le membre vers le bas, dans le plan sagittal, c’est-à-dire vers l’avant, (deux flèches rouges) en effectuant une extension relative de 180°.
Le membre supérieur se retrouve alors dans sa position initiale, mais, fait important, la paume « regarde en dehors » et le pouce est dirigé vers l’arrière.
Il s’est donc produit, sans qu’on en ait conscience, une rotation interne de 180° du membre supérieur sur son axe longitudinal : c’est ce qui, selon Codman constitue le paradoxe.
Si, partant pouce en avant, on essaie de faire le parcours à l’envers : d’abord flexion de 180° vers l’avant, puis descente sur le côté dans le plan frontal, on ne peut revenir le long du corps pouce en arrière, par insuffisance de rotation externe, due au blocage ligamentaire.
Par contre, il est possible de partir pouce en arrière, en flexion première, puis redescendre sur le côté de revenir à la position initiale, pouce en avant : c’est le mouvement inverse de celui décrit en premier.
 Il est impossible de commencer une deuxième fois une abduction si le pouce est dirigé vers l’arrière, là encore, en raison de blocage ligamentaire.
VIII- Fonctions des muscles de l’épaule

                                     


                     

 Bien que les muscles de la ceinture scapulaire ne représentent qu'un tiers du nombre total des muscles, ils constituent par leur poids plus de la moitié de toute la masse musculaire du membre supérieur et répondent à deux fonctions qui nécessitent le développement de forces importantes :
- la fonction de suspension-élévation de tout le corps par les membres supérieurs
- la fonction de soutènement et de transport de charges lourdes.
Parmi les autres fonctions, ces muscles assurent le déplacement angulaire des surfaces articulaires avec une grande amplitude permettant le positionnement de la main dans toutes les directions en même temps que leur stabilisation sous contrainte. 
Les muscles moteurs de la scapula sont au nombre de 6 avec le rhomboïde, l'élévateur de la scapula, le trapèze, le dentelé antérieur, le petit pectoral et accessoirement l'omo-hyoïdien. 
Les muscles moteurs de la clavicule sont au nombre de 2 avec les muscles sous- clavier et sterno-cléïdo-mastoïdien.
Les muscles moteurs de l'humérus sont au nombre de 11 avec les muscles deltoïde, grand pectoral, sub scapulaire, supra épineux, infra-épineux, petit rond, grand rond, grand dorsal, coraco-brachial, longue portion du biceps et longue portion du triceps. 
Pour aboutir à une efficacité maximale des couples de rotation, il faut une bonne stabilisation de la tête humérale et tous les muscles y participent mais un certain nombre d’entre eux au contact de la tête humérale: les supra épineux, infra-épineux, petit rond, sub scapulaire et longue portion du biceps constitutifs de la coiffe des rotateurs, sont essentiels. 
25 couples musculaires de centrage vont agir successivement au niveau des articulations scapulo-humérale, acromio-claviculaire, sterno-claviculaire, et de l'espace de glissement scapulo-thoracique. que Milch définit en trois cônes dont les sommets sont centrés sur l'humérus, conception qui ne tient compte n que de la seule articulation gléno-humérale. Bonnel tenant compte de toutes les articulations distingue 5 groupes musculaires: suspenseurs, abaisseurs, adducteurs, rotateurs internes et externes, antépulseurs et rétropulseurs mais ne reconnait pas sur le plan analytique de muscles spécifiquement abducteurs, l'abduction étant la résultante des actions de couples musculaires antagonistes. 
Le mouvement de circumduction est la résultante de plusieurs déplacements dans les trois plans de l'espace, avec dans le plan frontal: l'abduction-adduction, dans le plan sagittal: la flexion-extension (antépulsion-rétropulsion) et dans le plan horizontal: rotation interne et externe.
Abduction
La conservation du mouvement d'abduction est fondamentale dans la fonction de tout le membre supérieur et repose sur une rotation dans le plan frontal dans un premier temps de l'humérus et dans un deuxième temps de la scapula. 
Ce mouvement complexe fait appel d'une part, à l'articulation scapulo-humérale de 0° à 90° et d'autre part, de 90° à 180° à l'espace de glissement scapulo-thoracique et aux articulations acromio-claviculaire et sterno-claviculaire.
L'abduction de l'humérus de 0° à 90° est un mouvement complexe qui met en jeu toutes les structures de stabilité et de mobilité. Lors de l'abduction passive, l'humérus, par l'intermédiaire du tubercule majeur, bute contre l'acromion et le ligament gléno-huméral inférieur se tend empêchant toute progression. La rotation externe de l'humérus efface la butée rigide et permet l'élévation.
L'abduction active, sous la seule contraction du muscle deltoïde, n'est pas suffisante pour Bonnel à la compréhension du phénomène et contrairement à la conception classique, il ne serait pas abducteur. En effet, au cours des paralysies du nerf circonflexe, on peut observer une conservation de l'abduction et lors de la perforation ou de la rupture des muscles de la coiffe des rotateurs, malgré un muscle deltoïde intact, il n'est pas possible d'obtenir un mouvement d'abduction.
 Les principes mécaniques de l'abduction obéissent à la loi du centrage dynamique rotatoire tridimensionnel et peuvent être schématisés ainsi: une poutre étant placée parallèlement à un mur, avec un cordage de traction à une extrémité, il n'est pas possible de mettre cette poutre à 90° par rapport à la verticale, car on obtient une ascension. Pour y parvenir, il est nécessaire d'adjoindre à la partie supérieure une butée qui va stabiliser la poutre. La stabilité ne devant pas entraver la mobilité, la butée sera élastique. 
Cette approche du mouvement d'abduction ne fait intervenir que 2 muscles sur les 19 qui entourent l'articulation : l'action isolée du deltoïde entraîne une ascension de la tête humérale, muscle suspenseur mais ne provoque pas de mouvement d'abduction. Pour s'opposer à cette ascension, deux éléments interviennent, l'un actif représenté par le muscle supra épineux et l'autre passif par la voûte ostéo-ligamentaire acromio-coracoïdienne considérée comme une articulation dite sous-acromiale. Il s'agit d'un espace de glissement avec une bourse conjonctive qui dans certaines circonstances se fibrose et va limiter l'amplitude du mouvement d'abduction. Cette butée élastique s'adapte dans tous les plans de l'espace sans entraîner de limitations. Le mouvement d'abduction n'est possible que par la stabilisation musculaire supplémentaire des muscles sub scapulaire et infra-épineux abaisseurs courts, et des abaisseurs longs avec le grand pectoral et le grand dorsal.
Au-delà de 90°, le trapèze et le dentelé antérieur entraînent la bascule de la scapula en faisant appel à deux types de couples musculaires: d'une part un couple d'action de muscles agonistes et d'autre part un couple d'action de muscles antagonistes. La scapula en tant qu'os intermédiaire est soumise aux actions musculaires qui agissent comme fixateurs ou rotateurs dans les trois plans de l'espace. La scapula est en permanence maintenue par des muscles plus courts, l'élévateur de la scapula, le rhomboïde et le petit pectoral. Dans l'élévation au zénith, le rachis subit une inclinaison latérale.
Rotation interne, rotation externe
Dans le groupe des muscles agonistes aboutissant à un mouvement de rotation interne, on distingue les couples : rhomboïde - élévateur de la scapula, petit pectoral - sub clavier, rhomboïde - faisceau supérieur du trapèze.
Parmi le groupe des muscles antagonistes aboutissant à un mouvement de rotation externe, on distingue le couple des faisceaux supérieur et inférieur du trapèze, le couple des faisceaux supérieur et inférieur du dentelé antérieur.
Adduction
Dans la dynamique gestuelle courante, l'adduction ne met en action que peu de muscles dans la mesure où la pesanteur a tendance à maintenir le bras au contact du thorax. L'adduction véritable n'est réalisée que dans le grimper avec l'entrée en action de muscles longs et puissants : grand pectoral et grand dorsal.
La fixation de la scapula est le premier temps de l'adduction lors du grimper, avec la contraction simultanée du trapèze, du rhomboïde, de l'élévateur de la scapula, du petit pectoral et du sub clavier. La scapula ainsi fixée, le bras va pouvoir être ramené efficacement contre le thorax sous les actions du grand rond, du grand pectoral, de l'infra épineux et du sub scapulaire. Pour éviter une luxation inférieure de la tête humérale, les muscles supérieurs de l'humérus (deltoïde, courte portion du biceps, coraco-brachial, longue portion du triceps) se mettent en action sous forme de couples de rotation de recentrage. L'action du grimper nécessite à la fois force et déplacement de grande amplitude que le grand dorsal est le seul à réaliser avec l'aide du chef long du triceps qui empêche la luxation de la tête humérale.
Le positionnement final de la main en plus des mouvements de pronation et une supination de l'avant-bras nécessitent pour un meilleur rendement une intégrité du mouvement de rotation horizontale de l'articulation scapulo-thoracique qui compense grandement une raideur de l'articulation scapulo-humérale. Le mouvement de rotation externe est obtenu par l'action isolée de l'infra épineux et du petit rond. En raison de la discordance articulaire, on risque une luxation postérieure ou du moins une instabilité postérieure. Pour éviter cette éventualité, les muscles antérieurs, sub scapulaire et grand pectoral, favorisent le recentrage de la tête humérale. L'amplitude du mouvement est complétée par le trapèze et le rhomboïde. La répartition angulaire est de 30° à la scapulo-humérale, 30° à l'espace scapulo-thoracique et 25° à l'inclinaison de la colonne vertébrale.
 La fonction de rotation interne orientée vers la préhension nécessite un nombre de muscles plus important avec le sub scapulaire, le grand dorsal, le grand pectoral et le grand rond. A ces groupes musculaires, il faut rattacher l'action du tendon du chef long du biceps qui limite l'amplitude du mouvement de rotation externe de l'humérus et se comporte comme un rotateur interne.
Antépulsion Flexion - Rétropulsion extension - élévation -abaissement
Dans le plan sagittal, les déplacements ont lieu à deux niveaux, les déplacements ont lieu à deux niveaux, celui de la flexion extension pour l'articulation scapulo-humérale et celui de l'antépulsion-rétropulsion pour l'ensemble articulaire acromio-claviculaire, sterno-claviculaire et de l'espace de glissement scapulo-thoracique.
Les mouvements d'élévation ou d'abaissement de l'épaule représentent le deuxième type de déplacement du complexe de l'épaule soumis à des contraintes importantes lors du grimper.
Pour le mouvement de flexion, l'amplitude est de 30° avec comme muscle actif le faisceau antérieur du deltoïde, le coraco-brachial, le chef long et du chef court du biceps et les fibres verticales du muscle sub scapulaire.
Pour le mouvement d'extension, les muscles actifs sont représentés par le faisceau postérieur du deltoïde, le grand rond, le grand dorsal et le chef long du triceps.
La stabilité de la tête humérale par rapport à la cavité glénoïde de la scapula est assurée grâce à l'action des couples de rotation musculaires de flexion et d'extension.
L'antépulsion beaucoup plus utile que la rétropulsion fait intervenir la scapulo-humérale, l'espace de glissement scapulo-thoracique et la sterno-costoclaviculaire.
Cependant, comme pour les autres mouvements, les couples musculaires sont indispensables pour stabiliser les structures osseuses. La complémentarité du mouvement par l'intermédiaire de l'espace de glissement thoracique est prise en charge par les couples trapèze, dentelé antérieur, rhomboïde et grand dorsal.
Les muscles s'insérant sur la scapula et la clavicule assurent de par leur direction des mouvements d'élévation, d'abaissement, d'antépulsion et de rétropulsion. Ces mêmes muscles lorsqu'il se contractent en couple entraînent une stabilisation de la scapula (fixateur) ou une bascule phénomène fondamental au cours de l'abduction.
Lors de l'élévation, le déplacement de l'ensemble scapula (omoplate)-clavicule est de 8 à 12 cm. Les muscles qui interviennent sont le chef supérieur claviculaire du trapèze, le rhomboïde et l'élévateur de la scapula. L'abaissement est provoqué par le chef inférieur du trapèze, le petit pectoral et le sub clavier.
 Pour l'antépulsion, le déplacement de la scapula est de 8 à 15 cm. Les muscles actifs sont le dentelé antérieur, le petit pectoral, le sub clavier et le chef supérieur du trapèze. Pour la rétropulsion, les muscles actifs sont le trapèze dans son ensemble et le rhomboïde.
Long biceps
La véritable fonction du chef long du biceps brachial est à considérer dans l'ensemble constitué par le muscle deltoïde en dehors et par les muscles coraco-brachial et courte portion du biceps brachial en dedans. Ce tendon se situe au milieu de l'angle formé par les deux muscles, d'où sa dénomination de bissectrice vectorielle. Lors de la contraction des muscles deltoïde et coraco-brachial, courte portion du biceps brachial, on constate une ascension de la tête humérale. Pour protéger la coiffe des rotateurs de cette surcharge mécanique, le chef long du biceps brachial par son trajet intra-articulaire va contrebalancer cette action par un effet d'abaissement dynamique.
Long triceps 
L'action du triceps brachial est à envisager à 3 niveaux : le bras le long du thorax (position zéro), la contraction du triceps brachial entraîne une ascension de la tête humérale. A 90° d'abduction le triceps brachial a une action de coaptation. Au delà de 90°, sa fonction de coaptation est constante et est renforcée par la position sous-glénoïdienne du tendon qui empêche la luxation inférieure de la tête humérale. 
En position 0°, les muscles grand dorsal et grand rond contre-balencent l'action luxante du muscle chef long du triceps.
A 90° les trois muscles ont une fonction de coaptation. A partir de cette angulation les muscles grand dorsal et grand rond ont une action luxante qui est contre-balancée par le muscle triceps brachial qui constitue la deuxième bissectrice vectorielle de recentrage.
Sur le plan anatomique, les deux bissectrices vectorielles de recentrage avec le tendon du chef long du biceps brachial à la partie supérieure de la tête (tubercule supra-glénoïdien) et celui du chef long du triceps brachial à la partie inférieure (tubercule infra glénoïdien ont pour Bonnel un rôle essentiel dans les instabilités inférieures ou supérieures de la tête humérale.
Rythme scapulo-huméral

                          

Les éléments articulaires huméro-scapulaire et scapulo-thoracique sont étroitement couplés par une continuité musculaire qui transmet les contraintes mécaniques. Il y a une distinction fondamentale entre l'anatomie morphologique et l'anatomie fonctionnelle. 
Ainsi l'entité du muscle supra épineux appartient à l'anatomie morphologique et l'ensemble muscle-deltoïde, supra épineux et élévateur de la scapula, à l'anatomie fonctionnelle. 
Les muscles coraco-brachial et courte portion du biceps sont en continuité avec le muscle petit pectoral. Selon le même principe le muscle grand rond est en continuité avec le muscle rhomboïde. 
Ces muscles constituent le losange stato-dynamique de la scapula. Le muscle deltoïde par son faisceau antérieur se continue avec le muscle grand pectoral et par son faisceau postérieur avec le muscle trapèze. La finalité de ces dispositions musculaires est d'assurer le couplage mécanique entre l'organe effecteur du membre supérieur et le squelette axial par l'intermédiaire des os.
L’apophyse coracoïde 

                                 

C’est est un élément essentiel de raccordement à la fois statique et dynamique de toute l'épaule avec ces 4 insertions tendineuses (ligaments conoïde, trapézoïde, acromio-coracoïdien, coraco-huméral) et ces 3 insertions musculaires (petit pectoral, coraco-brachial, chef court du biceps). C’est véritablement le noyau central mixte de stabilisation statique et dynamique du complexe articulaire de l'épaule.
La clavicule est limitée dans son amplitude par les ligaments trapézoïde et conoïde qui s'insèrent au bord supérieur du processus coracoïde. En dedans l’on trouve le ligament coraco-claviculaire qui complète de façon passive la stabilité de la clavicule.
Le ligament acromio-coracoïdien a une double fonction: d'une part il participe à la stabilisation de la tête humérale lors de l'abduction en tant que butée élastique, d'autre part l'acromion et l'épine de la scapula sont soumis à des contraintes de traction très importantes par le muscle trapèze. Pour contrebalancer cette action de tension, le ligament acromio-coracoïdien intervient comme élément de neutralisation. 
L'humérus est le troisième élément relié au processus coracoïde avec le ligament coraco- huméral qui suspend l'humérus et limite le mouvement de rotation externe. 
Le muscle petit pectoral qui s’insère sur le processus coracoïde est le seul muscle antérieur de la scapula évitant l'ouverture de l'angle scapulo-thoracique. Il est aidé en arrière par le muscle dentelé antérieur. Le processus coracoïde suspend de façon active l’humérus avec le coraco-brachial et du chef court du biceps.
Centres de rotation et épaule

                 

Il est important de connaître le centre instantané de rotation pour bien comprendre les modes d'action musculaire. Les études analytiques ont permis de définir les centres instantanés de rotation. Pour l'articulation scapulo-humérale le centre instantané a été défini au niveau du col anatomique (Fick), en dedans et au-dessous du tubercule majeur (De Luca).
Il semble que les analyses cinématiques de Carret, Fisher et Dimnet soient plus proches de la réalité. Les résultats ont montré qu'au cours de l'abduction de 0° à 50° le centre instantané se situe dans la moitié inférieure de la tête humérale, et de 50° à 90° dans la moitié supérieure de la tête humérale. 
Pour l'articulation sterno-claviculaire le centre instantané de rotation lors de l'abduction se situe au niveau du quart interne de la clavicule. Pour l'ensemble scapulo-thoracique le centre instantané de rotation se situe pour l'abduction dans le plan frontal au niveau du bord spinal et dans le plan horizontal, au milieu de l'épine de la scapula (Carret). 
Pour l'articulation acromio-claviculaire, le centre instantané de rotation se situe au-dessus du quart externe de la clavicule. Pris dans son ensemble, le centre de rotation a été défini par Provins comme variable depuis le processus coracoïde vers le bord spinal de la scapula puis le bord axillaire. La concentration d'insertion d'éléments sur le processus coracoïde sont une preuve tangible de son rôle comme centre de tout le complexe de l'épaule. Elle est un élément essentiel de raccordement à la fois statique et dynamique de l’ épaule.
IX- Incidences cliniques selon Bonnel 
L’organisation mécanique du complexe de l’épaule induit en cas de dysfonctionnement un certain nombre de lésions bien systématisées dégénératives et instables.
1- L’épaule dégénérative de surcharge 
Les surcharges mécaniques s’expriment sous la forme de tendinopathies qui sur le plan anatomique peuvent être classée en 4 stades : 
- le premier stade est celui de la tendinopathie oedémateuse qui peut régresser si la contrainte mécanique cesse. 
- le deuxième stade est celui de la tendinopathie fissuraire. 
- le troisième stade est celui de la tendinopathie avec zone de nécrose et aspect mucoïde. 
- le quatrième stade est selon l'intensité celui des micro-ruptures ou de la rupture franche. 
Quelque soit le stade évolutif on trouve à l'analyse histologique du tendon des lésions appartenant à plusieurs stades avec des lésions d'hyper-vascularisation ou de fibrose qui traduisent les efforts de la nature pour aboutir à une réparation. Dans certains cas on trouve dans le tendon des calcifications. Sous la contrainte mécanique le tendon est l'objet de micro-ruptures avec tentatives de cicatrisation et en fonction des conditions physico-chimiques locales de précipitations calciques. Ces calcifications sont à distinguer des calcifications de la bourse sous-acromiale. 
Nouvelle conception du conflit sous-acromial 

                                            

Le fonctionnement du complexe de l'épaule est basé essentiellement sur les synergies musculaires. A la lumière d'une telle organisation mécanique et de constatations arthroscopiques de l'articulation scapulo-humérale, Bonnel envisage une conception différente pour les lésions de la coiffe des rotateurs:
1- La longue portion du biceps
Dans une première phase le déséquilibre entre les muscles ascensionnels deltoïde, coraco-brachial, courte portion du biceps brachial et le muscle abaisseur représenté par la bissectrice vectorielle de recentrage avec le chef long du biceps brachial va entraîner une surcharge mécanique du tendon du long biceps; surcharge responsable d'une tendinopathie d'intensité variable avec fissures, microruptures et au final, rupture. Cette première phase avec lésion du chef long du biceps brachial est aléatoire et fonction du type d'asynchronisme musculaire.
2- La coiffe des rotateurs
Dans la deuxième phase le déséquilibre entre le muscle deltoïde et les muscles de la coiffe des rotateurs va provoquer une surcharge par distension entre les trois muscles sub-scapulaire, infra-épineux et supra épineux qui entraîne des lésions fissuraires et de micro-ruptures endo-articulaires visibles par arthroscopie. Progressivement, la coiffe s'amincit pour parfois aboutir à la rupture. La localisation et l'étendue de la rupture sont fonctions des axes de déséquilibre.
3- Le conflit
La troisième phase qui fait intervenir le conflit acromion-tubercule majeur ne serait que la conséquence de l'asynchronisme musculaire qui aboutit à une ascension de la tête humérale au contact à la face inférieure du tubercule majeur et du ligament acromio-coracoïdien. Cette phase de conflit est parfaitement réversible, si grâce à la rééducation, on parvient à rééquilibrer les actions entre les muscles ascensionnels et abaisseurs. 
L'acromioplastie de Neer enlève le conflit mais laisse persister le déséquilibre musculaire. A la phase de rupture, la rééducation a moins d'efficacité, car la sangle d'abaissement de la coiffe des rotateurs ne peux plus jouer efficacement son rôle.
2- L’épaule instable
Les asynergies lors de la contraction musculaire vont aboutir à une instabilité articulaire qui peuvent être uni-directionnelle ou multi-directionnelle.
X- Bilan fonctionnel de l'épaule
Il est proposé, au-delà des classifications anatomiques, de faire un bilan qui va s’attacher à recueillir des éléments fonctionnels:
- mobilités passives et actives analytiques: EA, EL, RP, RI et RE, les mouvements complexes main-nuque et main-dos.
- le score fonctionnel de Constant sur 100 points et l'évaluation isocinétique.
XI- Quelques définitions
1- Le plan de la scapula: c'est le plan de mobilité physiologique de l'omoplate compris entre 20 et 40° d'antépulsion. Plans de glissement de l’omoplate: le grand dentelé est séparé de la cage thoracique et du sous-scapulaire par des plans cellulo-graisseux. Ceux-ci sont indispensables au bon glissement de l’omoplate sur le thorax et sont considérés comme faisant partie du complexe articulaire de l’épaule.
2- La Zéro-position de Saha correspond en rééducation, à l'angle d'élévation de 150° à atteindre passivement dans le plan de l'omoplate à 20-40° d'antépulsion, avant d'attaquer les mobilisations actives. C'est une position qui permet un bon réveil musculaire du deltoïde, tout en protégeant la coiffe des rotateurs et avec un bon centrage de la tête humérale. C’est une position d’équilibre où les forces agonistes et antagonistes s’annulent.
3- La voie de passage de Sohier dans le conflit antéro-supérieur de coiffe; c'est un trajet en S qui évite le conflit trochiter-voûte sous-acromiale, sans provoquer de conflit mécanique.
NB: Sohier a décrit 3 voies de passage:
- la voie antérieure par abduction-rotation interne et antépulsion
- la voie postéro-latérale par rotation externe-élévation
- la voie postérieure par rotation interne-rétropulsion et adduction.
En conclusion
L'épaule est bien la plus complexe et la plus passionnante des articulations; elle arrive à concilier 2 impératifs contradictoires de mobilité et de stabilité du moins tant que la musculature périarticulaire reste parfaitement synchrone parce que non polluée par une laxité uni ou pluridimensionnelle, une lésion du labrum ou une tendinopathie de la coiffe des rotateurs avec ou sans conflit sous acromial. Avec son fonctionnement en couples musculaires de rotation tri-dimentionnels François Bonnel, après I.A Kapandji, renouvelle les idées sur la biomécanique mais aussi après Neer, Jobe et quelques autres grands orthopédistes, la physiopathologie de l'épaule dégénérative conflictuelle et conforte la médecine de rééducation comme atout maître dans la prise en charge thérapeutique des épaules douloureuses et ou instables, guidée par une évaluation isocinétique préalable.
Afin de profiter pleinement de l’article ci-dessus, nous conseillons une lecture attentive préalable des ouvrages du Pr François Bonnel et de I A Kapandji.