Avis à lire par tous les lecteurs:

Les premiers articles du blog "Un médecin du sport vous informe" datent de 2013, mais la plupart sont mis à jour pour pouvoir coller aux progrè médicaux. Ce blog inter-actif répond à la demande de nombreux confrères, kinésithérapeutes, étudiants en médecine et en STAPS, patients et sportifs. Il est le reflet de connaissances acquises tout le long de ma vie professionnelle, auprès d'enseignants remarquables, connaissances sans cesse actualisées que je me suis efforcé de rendre accessibles au plus grand nombre par le biais d’images trouvées sur le Net, images qui sont devenues par la force des choses, la propriété intellectuelle de tous; si cela dérange, ces images seront retirées.

Certains articles peuvent apparaître un peu plus polémiques que d'autres et indisposer, mais il n'est pas question pour l'auteur de tergiverser ou de se taire, quand il s'agit de problèmes d'éthique, en particulier en matière de dopage et quand la santé des sportifs est en jeu, compte tenu du nombre élevé de blessures liées au surentraînement et à une pratique imbécile d'une certaine musculation, qui n'est plus au service de la vitesse et de la force explosive utile (et non de la force maximale brute), qui sont les deux qualités physiques reines, qui ne respecte pas les règles de la physiologie musculaire et qui, au lieu d'optimiser la performance, fait ressembler certains sportifs body-buildés à l'extrême, davantage à des bêtes de foire gavées aux anabolisants, qu’à des athlètes de haut niveau.

Ce blog majoritairement consacré à la traumatologie sportive, est dédié à mes maîtres les Prs Jacques Rodineau, Gérard Saillant et à tous les enseignants du DU de traumatologie du sport de Paris VI Pitié Salpétrière et en particulier aux docteurs Jean Baptiste Courroy, Mireille Peyre et Sylvie Besch. L'évaluation clinique y tient une grande place: "la clinique, rien que la clinique, mais toute la clinique" et s'il y a une chose à retenir de leur enseignement, c'est que dans l'établissement d'un diagnostic, l'examen clinique, qui vient à la suite d'un bon interrogatoire, reste l'élément incontournable de la démarche médicale. Toutefois dans le sport de haut niveau et guidé par la clinique, l'imagerie moderne est incontournable : radiographie conventionnelle, système EOS en trois dimensions pour les troubles de la statique rachidienne, échographie avec un appareillage moderne et des confrères bien formés, scanner incontournable dans tous les problèmes osseux et enfin IRM 3 Tesla, le Tesla étant l'unité de mesure qui définit le champ magnétique d'un aimant; plus le chiffre de Tesla est élevé et plus le champ magnétique est puissant ("à haut champ") et plus les détails des images sont fins et la qualité optimale.

Hommage aussi au Pr Robert Maigne et à son école de médecine manuelle de l'Hôtel Dieu de Paris ou j'ai fais mes classes et actuellement dirigée par son fils, le Dr Jean Yves Maigne. Je n'oublie pas non plus le GETM (groupe d'étude des thérapeutiques manuelles) fondé par le Dr Eric de Winter et ses enseignants, tous des passionnés; j'y ai peaufiné mes techniques et enseigné la médecine manuelle-ostéopathie pendant 10 années.

Dr Louis Pallure, médecin des hôpitaux, spécialiste en Médecine Physique et Réadaptation, médecin de médecine et traumatologie du sport et de médecine manuelle-ostéopathie, Pr de sport et musculation DE, ex médecin Athlé 66, comité départemental 66, ligue Occitanie et Fédération Française d’Athlétisme, médecin Etoile Oignies Athlétisme.

samedi 13 décembre 2014

Après rupture isolée du LCA, est il possible pour un sportif d'échapper à la chirurgie?

Pendant une bonne trentaine d'année, pour un sportif et quelque soit son niveau de pratique, une rupture du ligament croisé antérieur du genou (LCA) était synonyme de réparation chirurgicale dans des délais extrêmement courts qui allaient de un à quelques jours ou quelques semaines, tandis que le traitement fonctionnel ou orthopédique était systématiquement cloué au pilori non seulement par les chirurgiens orthopédistes, mais également par la quasi totalité des médecins du sport. Mais ces dernières années, deux éminents éditorialistes du Journal de Traumatologie du sport, Christian Lutz et Jacques Rodineau ont attiré l'attention sur la nécessité de remettre en cause cette façon dogmatique de procéder en prenant en compte que le retour à son niveau de pratique antérieur chez un sportif opéré, oscille entre 50 et 75% et que le pronostic chondral (cartilagineux) à long terme, pourvoyeur d'arthrose post traumatique du genou, n'est pas amélioré après chirurgie. C'est ce changement de paradigme qui est en train de s'opérer, que nous allons développer dans cet article.
La jurisprudence Réveillère, joueur de football international, est la parfaite démonstration que le tout de suite la chirurgie ne se justifie pas +++
Le 22 novembre 2008, Anthony RÉVEILLÈRE de l’Olympique Lyonnais joue contre le PSG et se rompt le ligament croisé antérieur. Malgré les pressions du staff et l'avis de son chirurgien, il refuse de se faire opérer et opte pour une rééducation intensive. Son LCA cicatrise et il rejoue le 11 avril 2009, soit quatre mois et demi après son entorse et en tout cas plus vite qu’après une opération. Depuis, il n’a pas récidivé et poursuit une carrière pro en Angleterre, 6 ans après son traumatisme.
Conclusion: toute lésion du ligament croisé antérieur dans les sports de pivot-contact à très haut niveau ne nécessiterait donc pas toujours de reconstruction chirurgicale et le cas Réveillère en tout cas doit inciter à réfléchir.
Généralités
Le ligament croisé antérieur (LCA) du genou est un ligament torsadé composé de 2 faisceaux, un faisceau principal antéro-médial qui bloque l'avancée du tibia et contrôle donc la translation antérieure et un faisceau postéro-latéral qui limite la rotation interne.



Anatomie du LCA

Le LCA est très sollicité dans les activités sportives de pivot qui se caractérisent au niveau du genou par des rotations internes susceptibles d’entraîner sa rupture: réception de saut, changement de direction au tennis, en ski et dans les activités de pivot contact qui supposent que le mouvement est contrarié par un adversaire: football, rugby, sports de combat.

               

Sports de pivot-contact

Sa rupture survient chez un sujet jeune et sportif, volontiers de sexe féminin, avec un retentissement fonctionnel variable. Le prix à payer va être très lourd pour le sportif et pour l'assurance maladie qui  finance, surtout si réparation chirurgicale.

Epidemiologie
La fréquence
L'activité physique et sportive est grande pourvoyeuse de ruptures du ligament croisé antérieur. De 65% pour Miyasaka à 75 % pour Nicolas Lefèvre (clinique du sport Paris V).
16 000 ruptures du ligament croisé antérieur par an surviennent en France lors de la pratique du ski; aux USA on comptabilise 38000 lésions du LCA par an chez les féminines et en Norvège on compte 85 ruptures du LCA pour 100 000.


Cette fréquence des ruptures du LCA dépend du type d’activité sportive et du niveau d’activité; Roos rapporte une incidence de rupture du LCA 3,3 fois plus importante pour les joueurs pros de football que pour les amateurs et une incidence 1,8 fois plus importante pour les attaquants que pour les joueurs occupant un autre poste sur le terrain.
Pour Bjordal, le risque est surtout lié au nombre d’heures pratiquées et au type d’action sportive.


L’âge moyen de survenue est de 30 ans. Les femmes constituant une population à haut risque lorsqu'elles ont entre 15 et 19 ans.
Le sexe: la rupture du LCA est 2 à 6 fois plus fréquente chez la femme. La différence avec les hommes est liée à une étroitesse anatomique de l'échancrure inter-condylienne, mais aussi à un déséquilibre du contrôle neuro-musculaire et aux variations hormonales du cycle menstruel.
Le coût estimé aux USA serait de 17 000 dollars si le LCA est réparé chirurgicalement et de 2000 dollars, s'il est non opéré.
Lésion Isolée du Ligament Croisé Antérieur, évolution des idées et des pratiques.
Jusqu'aux années 70, une rupture du LCA était considérée comme un accident traumatique grave avec des complications importantes et un reprise sportive incertaine.
En 1994, une conférence de consensus sur l’arthroscopie du genou concluait à propos du ligament croisé antérieur que, devant un genou traumatique récent il n’y avait pas lieu d’avoir recours à l’arthroscopie pour établir un diagnostic de lésion du LCA, mais que dans le traitement des lésions ligamentaires chroniques, la place de l’arthroscopie était prééminente et constituait le premier temps exploratoire, mais aussi une aide à la reconstruction ligamentaire, et permettait les sutures méniscales périphériques quand elles étaient nécessaires.
En juin 2008, la HAS (haute autorité de santé) et un panel d'experts émettait un certain nombre de recommandations professionnelles sur la prise en charge chirurgicale des lésions isolées du ligament croisé antérieur, à partir de 4 niveaux de preuves fourni par des études thérapeutiques sur la réparation du LCA. Ils ont émis 3 grades de recommandations, A, B et C. L’objectif de ce travail étant de promouvoir de bonnes pratiques en cas de traitement chirurgical.
Etudes thérapeutiques de niveau 1 = recommandations de grade A = preuve scientifique établie.
- Essais comparatifs randomisés de forte puissance.
- Méta-analyse d’essais comparatifs randomisés.
- Analyse de décision basée sur des études bien menées.
Etudes thérapeutiques de niveau 2 = recommandations de grade B = présomption scientifique.
- Essais comparatifs randomisés de faible puissance.
- Études comparatives non randomisées bien menées.
- Études de cohorte.
Etudes de niveau 3 = grade B = présomption scientifique.
- Études cas-témoins.
Etudes de niveau 4 = grade C = faible niveau de preuve.
- Études comparatives comportant des biais importants.
- Études rétrospectives.
- Séries de cas.
La clinique

Le diagnostic clinique d'une rupture du LCA doit être réalisé au mieux immédiatement ou dans l'heure qui suit le  traumatisme; si ce n'est pas le cas, la plupart du temps, le genou gonfle rapidement et devient difficilement inexaminable.

Le diagnostic de rupture du ligament croisé antérieur doit reposer sur l’examen clinique, temps essentiel pour le diagnostic:
1- l’interrogatoire: il doit faire préciser le mécanisme lésionnel, genou en hyper extension ou en hyper-flexion, en VRI ou en VFE, notion d’un craquement ou d’un dérobement.
2- l’examen physique comparatif: cherche à mettre en évidence une laxité: c'est la manœuvre de Lachman qui objective une translation antérieure du tibia sous le fémur à 20° de flexion, typiquement avec arrêt mou. Cette manœuvre est toujours réalisable même sur un genou fraîchement traumatisé. Elle est d’une grande spécificité et sensibilité.

Lachman

Les manœuvre de ressaut en rotation interne (Lemaire, pivot shift, jerk test, etc.) ne sont pas réalisables sur un genou fraîchement traumatisé. Sur une laxité chronique elles reproduisent la sensation d’instabilité ressentie par le blessé.


signe de Lemaire

Le tiroir antérieur direct (TAD) à 90°, sa présence en post traumatique immédiat témoigne d’une globalisation de la laxité avec association lésionnelle.  Son absence ne signifie pas une absence de rupture du LCA.

TAD

L'imagerie
Le bilan radiographique standard doit être systématique. Il permet de rechercher d’éventuelles fractures parcellaires et d’apprécier la hauteur des interlignes.

                                           Fracture de Segond du plateau tibila externe

L'IRM a surtout l’intérêt de rechercher d’éventuelles lésions associées méniscales, cartilagineuses et osseuses. Elle ne doit pas être systématique, mais constitue une aide précieuse à la décision chirurgicale éventuelle.


Histoire naturelle d'un LCA rompu
Les ruptures du ligament croisé antérieur, excepté les ruptures intra - parenchymateuses, ne cicatrisent pas spontanément. Elles s’accompagnent fréquemment d’une instabilité fonctionnelle faîte de dérobements et de gène à la pratique sportive, et ce d’autant plus que le patient est jeune, pratique un sport de pivot et présente un ressaut franc. Cette instabilité fonctionnelle peut se manifester aussi dans les activités quotidiennes ou parfois rester muette.
En l’absence d’intervention, les ruptures complètes du ligament croisé antérieur laissent habituellement persister une laxité résiduelle. L'important sera de l'appréhender sous l'angle fonctionnel d'une instabilité potentielle, et sous l'angle anatomique d'un risque de dégradation méniscale accéléré et d'une dégradation cartilagineuse secondaire; quant à l’arthrose avérée, elle est diagnostiquée plus de 30 ans après le traumatisme initial.
Toute rupture du ligament croisé antérieur ne justifie pas une prise en charge chirurgicale. La décision d'opérer doit être raisonnée et se baser sur les résultats attendus de stabilisation post chirurgicale du genou, de reprise des activités en particulier sportives, et de préservation de l’avenir du genou en limitant le risque de lésion méniscale secondaire et éventuellement de dégradation cartilagineuse, la présence de signes arthrosiques variant entre 10 et 70% après 5 à 15 d’une plastie du LCA.
Techniques chirurgicales du LCA par autogreffe
La chirurgie de reconstruction du LCA fait appel en France quasi exclusivement à l’autogreffe tendineuse.
L'age.
L’âge au delà de 40 ans n’est pas en soi une contre indication à la chirurgie à condition que le genou ne présente pas de pathologie dégénérative au niveau du cartilage.
Le délai d'intervention.
On entend par intervention retardée du LCA, une intervention au delà de 3 mois, effectuée sur un genou non inflammatoire. Il n’y a donc pas d’indication à opérer un sportif en urgence pendant cette période inflammatoire de 3 mois, sous peine d’augmenter la morbidité opératoire.
Mobilité du genou et force du quadriceps sont en effet statistiquement plus élevées si la chirurgie est différée et le fait que l’intervention de reconstruction par autogreffe est identique en aigu ou en chronique et l’absence de perte de chance dans le résultat plaidant en faveur d’une intervention retardée à un stade où les phénomènes inflammatoires ont disparu.
La reconstruction par ligamentoplastie KJ os-tendon-os dans un délai d’un an après la rupture du ligament, a permis d’obtenir une meilleure fonction du genou, un meilleur prise en charge thérapeutique des lésions méniscales associées et des lésions isolées du ligament croisé antérieur, et de prévenir de manière significative la survenue de lésions méniscales secondaires.
Pour Eriksson et al, le délai optimum doit être de moins de 5 mois après le traumatisme.
En cas d'association d'une rupture du LCA avec une lésion méniscale en anse de seau luxée et ou une lésion ostéo-chondrale mobile de gros volume, il faut envisager une chirurgie précoce afin de traiter simultanément la rupture ligamentaire et la ou les lésions associées (accord d’experts).
En dehors de ces cas, un traitement fonctionnel devrait être entrepris pendant quelques mois devant une rupture récente du ligament croisé antérieur, avant de décider d'une éventuelle ligamentoplastie chirurgicale.
La voie d'abord.
La voie arthroscopique est la seule qui permette dans le même temps opératoire, un bilan complet de l’articulation, de meilleures suites opératoires, une baisse de la morbidité post opératoire et une récupération plus rapide.
Le choix du transplant.
Il est fonction du résultat fonctionnel évalué sur l'IKDC (International Knee Documentation Committee) qui sont des critères subjectifs, sur la laxité résiduelle, les douleurs, le flessum résiduel et le niveau de reprise sportive.
Le Kenneth Jones os tendon os et le DIDT à 4 brins ont des résultats équivalents et les recommandations sont de grade A. Il n'a pas été possible à partir des données de la littérature d'établir de recommandations sur les ligamentoplasties de type Mac Intosh au fascia lata et celles à partir du tendon quadricipital.


KJ


DIDT
Le positionnement optimal du transplant.
Le positionnement du transplant même sous arthroscopie n’est pas aisément reproductible; or c'est un facteur essentiel du succès de la ligamentoplastie.
De nombreuses études confirment le lien entre le positionnement du transplant et la laxité résiduelle, le positionnement du transplant et le taux de réintervention. Et 2/3 des ligamentoplasties itératives sont associées à un mauvais positionnement fémoral et/ou tibial du transplant.
Le mode de fixation de la plastie.
La fixation du transplant par des vis d’interférence fémorale et tibiale est la technique de référence. Une double fixation au fémur ou au tibia est inutile, sauf tenue médiocre de la vis tibiale.
Cette vis peut être métallique ou bio-résorbable, et il n’a pas été mis en évidence de différences entre les deux (grade C).
Les vis composites ostéo-inductrices sont en cours d’évaluation. En cas de vis métallique, l’utilisation de titane facilite l’interprétation des IRM et scanners post opératoires. L’utilisation d’une vis résorbable facilite l’imagerie par IRM post opératoire et en cas de reprise chirurgicale éventuelle.
Place de la ténodèse latérale de Lemaire.
Les résultats satisfaisants des plasties intra articulaires KJ ou DIDT même au delà de 50 ans, et l’absence de contrôle de la translation antérieure par la ténodèse latérale, conduisent à ne pas recommander la ténodèse latérale isolée de Lemaire quel que soit l’âge (Accord d’experts et Grade B).
Quant à la plastie latérale associée à la plastie intra - articulaire, elles ne peuvent être envisagées que dans le cadre d’une laxité antérieure globale. En l’absence d’étude prospective comparative de puissance suffisante publiée dans ce cadre particulier de laxité antérieure globale, cette proposition est un accord d’experts.

Ténodèse latérale avec le fascia lata

Place de la plastie à double faisceau.
La plastie à double faisceau s’appuie sur le fondement anatomique logique que le LCA est constitué de 2 faisceaux. Cependant cette plastie à double faisceau est techniquement plus difficile et ses résultats sur le bénéfice fonctionnel à moyen terme sont encore controversés, et l’absence d’études sur les difficultés d'une possible reprise chirurgicale et la nécessité d’une fixation habituellement quadruple en font encore une technique en cours d’évaluation (Grade B).
La chirurgie assistée par ordinateur
Bien qu’aucune étude n’en démontre le bénéfice fonctionnel, cette assistance permet d’améliorer la reproductibilité du positionnement des tunnels et de quantifier la laxité en particulier rotatoire en per opératoire.
La difficulté de mise en œuvre de cette technique, son coût et la courbe d’apprentissage propre à toute chirurgie assistée par ordinateur en font encore actuellement une technique en évaluation mais qui à l’avenir devrait aider à préciser les options chirurgicales.
Technique TLS de greffe courte
Cette technique TLS semble promise à un bel avenir mais doit encore faire l'objet d'études prospectives pour assoir définitivement sa fiabilité.
TLS est un système de reconstruction des ligaments croisés du genou imaginée par le Dr Michel Collette, chirurgien orthopédiste belge, qui en a décrit les principes en 2001 et les a peaufinés avec le Dr Xavier Cassard, chirurgien toulousain. Cette technique offre les avantages combinés d’une greffe courte mécaniquement très performante à partir d'un seul tendon IJ préparé en 4 brins et précontraint de 0 à 300 N, et d’un système de fixation particulièrement résistant et peu traumatisant.
Les axes des tunnels osseux sont indépendants, de faible calibre (4,5 mm) et obtenus par visée de dehors en dedans (out-in) avec creusement manuel rétrograde des logettes osseuses de réception de la greffe et adaptées aux diamètres de la greffe.
Les ruptures partielles du LCA
Un test de Lachman retardé à arrêt dur témoigne d’une rupture partielle ou d’une rupture partiellement cicatrisée. Ce type de laxité nécessitant une analyse laximétrique antérieure et rotatoire. Mais l’histoire naturelle de ces ruptures partielles n’est pas suffisamment connue aujourd’hui, pour recommander une attitude univoque.
La morbidité globale post opératoire
La ligamentoplastie, même sous contrôle arthroscopique, n’est pas une intervention à morbidité nulle: il y a 6,3 % de reprises pour raideur, 5 % de reprises pour ablation de matériel tibial et 6 % de reprises pour différentes lésions (corps étranger, ostéophytes). Possibilité également de reprises chirurgicales pour arthrolyse, cyclope syndrome, retrait de matériel intra articulaire, plastie de l’échancrure et parfois arthroscopies diagnostiques pour douleurs non étiquetées. Reprises chirurgicales aussi pour infections superficielles ou profondes, variant de 0,14 à 1,70 % et reprises pour ruptures secondaires.
Des complications thrombo - emboliques dans les 3 premiers mois suivant les ligamentoplasties ont été rapportées et leur survenue est corrélée à une reconstruction du croisé antérieur au stade aigu.
La reprise sportive après ligamentoplastie
Dans une ligamentoplastie, le LCA qui est un ligament dont la structure est élastique, a été remplacé par un tendon dont la structure est plutôt rigide. Des contraintes mécaniques progressives vont stimuler l’adaptation et la transformation du transplant tendineux par un lent processus biologique de remodélisation du transplant tendineux par les globules blancs, avec une période de vulnérabilité maximale vers 3 à 4 mois. L’amélioration de la texture du transplant permet de reprendre progressivement l'entraînement dans les sports avec pivots et contacts après 7 à 8 mois post opératoire. Il faudra au minimum une bonne année pour que le sportif oublie le traumatisme et retrouve ses automatismes et toute reprise avant l'échéance d'une année post traumatique est une entreprise à haut risque de re-rupture, la ligamentisation du transplant ne s’achèvant que deux à trois ans après l'intervention.
Des auteurs ont rapporté une différence significative en faveur de la réparation du LCA pour des activités telles que la marche, l’escalade, la course, la montée et la descente d' escaliers.
Avec un recul de 13 ans, Salmon et al ont objectivé 96 % de bons résultats avec une fonction du genou considérée comme satisfaisante par les patients. Le retour au sport initial est effectif dans 48 à 95 % des cas, avec un recul minimum de 2 ans.
Mais Roos et al, parmi 778 patients sélectionnés à partir des fichiers des assurances sportives, n’ont retrouvé que 30 % de joueurs de football retournant au même niveau à échéance de 3 ans post opératoire, et aucun joueur professionnel n'est resté au même niveau 7 ans après la chirurgie. Mais cette étude est ancienne et a une méthodologie discutable, les patients ayant été contactés par courrier et avec seulement 83 % de réponses.
Pour Aune et al, à 2 ans de suivi, 20 % des patients ne sont pas satisfaits et 18,9 à 35,5 % présentent des douleurs de genoux.
Fithian et al. ont rapporté un taux significativement plus important de douleur à l’agenouillement dans la population opérée.
Biau et al. ont montré dans leur méta-analyse après ligamentoplastie du LCA, que le genou n’est considéré comme normal au score IKDC que par 33 % des patients pour les transplants ischio-jambiers et par 41 % des patients pour les transplants os-tendon-os. Concernant le retour au sport au même niveau, les auteurs ont rapporté des pourcentages respectifs de 67 et 76 %.
Les données de la littérature ont montré indépendamment du niveau sportif des patients, un retour au sport initial variant de 48 à 95 %.
A noter que la différence entre reprise ou non du sport peut être modifiée de façon significative par des facteurs psychologiques.
Globalement, il faut retenir que le taux de retour au sport au même niveau est en moyenne de 65 %. Parmi les 35 % restant, 24 % reprennent le sport à un niveau inférieur et 11 % ne reprennent pas.
Chez les skieurs de haut niveau, la reprise du sport au même niveau ne serait possible uniquement que par le biais de la reconstruction, les skieurs de haut niveau ont repris la compétition après reconstruction du LCA, et la durée de leur activité professionnelle a été plus longue que chez les patients n’ayant pas été opérés.
Waldén et al. ont montré que chez le joueur de football professionnel, le risque de traumatisme sévère itératif du genou était statistiquement plus élevé si le croisé antérieur n’était pas reconstruit.
Malgré les évolutions des techniques chirurgicales concernant les plasties du LCA, la proportion de patients qui retrouvent un niveau physique suffisant pour reprendre le sport semble être le même après plastie du LCA qu' après traitement conservateur. Il n'y a pas de différence également dans la récupération de la force musculaire et le niveau fonctionnel. La problématique est donc la qualité de la rééducation.
Quel type de rééducation
A l’issue d'études bibliographiques, il n’est pas possible de décrire un programme type de rééducation après ligamentoplastie du fait de la diversité des lésions et notamment de la présence de lésions périphériques, des techniques chirurgicales (type de greffon, moyen de fixation, ligamentisation), des protocoles post-opératoires (appui, chaîne cinétique ouverte, etc.) et des contextes du patient (type de sport et d’activité, antécédents, etc.).
On distingue néanmoins trois phases : rééducation pré-opératoire fortement recommandée, rééducation en phase aiguë, rééducation secondaire. Dans tous les cas, les modalités du programme de rééducation sont à adapter aux consignes chirurgicales post-opératoires et aux caractéristiques du patient.
Conclusion+++
Sauf exceptions (lésion méniscale traumatique qui ne ferait que s'aggraver et ou pavé ostéochondral associés à la lésion du LCA), il semple de plus en plus possible et la jurisprudence Reveillère en est la parfaite illustration, d'échapper à la chirurgie de reconstruction ligamentaire en cas de rupture fraîche du LCA, le traitement fonctionnel étant à envisager en priorité au moins les 3 premiers mois y compris chez les sportifs professionnels et de haut niveau pratiquant un sport de pivot ou de pivot-contact. Au terme de ces 3 mois de traitement fonctionnel, si le genou présente encore une instabilité avérée, il sera alors temps de le confier à un chirurgien spécialisé pour une chirurgie de reconstruction ligamentaire.