Avis à lire par tous les lecteurs:

Les premiers articles du blog "Un médecin du sport vous informe" datent de 2013, mais la plupart sont mis à jour pour pouvoir coller aux progrè médicaux. Ce blog inter-actif répond à la demande de nombreux confrères, kinésithérapeutes, étudiants en médecine et en STAPS, patients et sportifs. Il est le reflet de connaissances acquises tout le long de ma vie professionnelle, auprès d'enseignants remarquables, connaissances sans cesse actualisées que je me suis efforcé de rendre accessibles au plus grand nombre par le biais d’images trouvées sur le Net, images qui sont devenues par la force des choses, la propriété intellectuelle de tous; si cela dérange, ces images seront retirées.

Certains articles peuvent apparaître un peu plus polémiques que d'autres et indisposer, mais il n'est pas question pour l'auteur de tergiverser ou de se taire, quand il s'agit de problèmes d'éthique, en particulier en matière de dopage et quand la santé des sportifs est en jeu, compte tenu du nombre élevé de blessures liées au surentraînement et à une pratique imbécile d'une certaine musculation, qui n'est plus au service de la vitesse et de la force explosive utile (et non de la force maximale brute), qui sont les deux qualités physiques reines, qui ne respecte pas les règles de la physiologie musculaire et qui, au lieu d'optimiser la performance, fait ressembler certains sportifs body-buildés à l'extrême, davantage à des bêtes de foire gavées aux anabolisants, qu’à des athlètes de haut niveau.

Ce blog majoritairement consacré à la traumatologie sportive, est dédié à mes maîtres les Prs Jacques Rodineau, Gérard Saillant et à tous les enseignants du DU de traumatologie du sport de Paris VI Pitié Salpétrière et en particulier aux docteurs Jean Baptiste Courroy, Mireille Peyre et Sylvie Besch. L'évaluation clinique y tient une grande place: "la clinique, rien que la clinique, mais toute la clinique" et s'il y a une chose à retenir de leur enseignement, c'est que dans l'établissement d'un diagnostic, l'examen clinique, qui vient à la suite d'un bon interrogatoire, reste l'élément incontournable de la démarche médicale. Toutefois dans le sport de haut niveau et guidé par la clinique, l'imagerie moderne est incontournable : radiographie conventionnelle, système EOS en trois dimensions pour les troubles de la statique rachidienne, échographie avec un appareillage moderne et des confrères bien formés, scanner incontournable dans tous les problèmes osseux et enfin IRM 3 Tesla, le Tesla étant l'unité de mesure qui définit le champ magnétique d'un aimant; plus le chiffre de Tesla est élevé et plus le champ magnétique est puissant ("à haut champ") et plus les détails des images sont fins et la qualité optimale.

Hommage aussi au Pr Robert Maigne et à son école de médecine manuelle de l'Hôtel Dieu de Paris ou j'ai fais mes classes et actuellement dirigée par son fils, le Dr Jean Yves Maigne. Je n'oublie pas non plus le GETM (groupe d'étude des thérapeutiques manuelles) fondé par le Dr Eric de Winter et ses enseignants, tous des passionnés; j'y ai peaufiné mes techniques et enseigné la médecine manuelle-ostéopathie pendant 10 années.

Dr Louis Pallure, médecin des hôpitaux, spécialiste en Médecine Physique et Réadaptation, médecin de médecine et traumatologie du sport et de médecine manuelle-ostéopathie, Pr de sport et musculation DE, ex médecin Athlé 66, comité départemental 66, ligue Occitanie et Fédération Française d’Athlétisme, médecin Etoile Oignies Athlétisme.

jeudi 27 avril 2023

Le complexe lombo-pelvi-fémoral du Lanceur en Athlétisme

 Anatomie 

Il englobe: 

-  les deux dernières vertèbres lombaires L4 et L5, 

- le bassin en entier: os coxaux, articulations sacro-iliaques, symphyse pubienne, 

- le secteur sous-pelvien avec les deux hanches et les muscles ischio-jambiers, droit fémoral et adducteurs. 

Biomécanique

Ce complexe est un système auto-bloquant et le sacrum y est encastré comme un coin entre les 2 ailes iliaques. Plus la charge axiale est élevée, plus le sacrum est maintenu par auto-blocage. C'est également un système suspendu par les 2 forts ligaments sacro-iliaques.

Sur le plan fonctionnel c’est un système articulaire mécaniquement asservi (SAMA) à la cardan et à fonctions dissociées dont le rôle essentiel est de préserver l’horizontalité de la plateforme pelvienne. 

Il permet: 

- l’orientation du tronc dans tous les mouvements de l’espace,

- la transmission et la répartition du poids du corps vers les 2 hanches par les 2 articulations sacro-iliaques 

- l’équilibration de la plateforme sacrée, inclinée à 37° en moyenne sur l'horizontale. 

Ce SAMA autorise un mouvement régional lombaire bas ample de flexion/extension, d'inflexion latérale droite et gauche et des rotations très réduites de l'ordre de 1 à 2°. Le mouvement de flexion/extension au niveau des articulations sacro-iliaques est une nutation qui fait basculer le sacrum vers l’avant et le coccyx vers l’arrière et une contre-nutation qui est le mouvement inverse. Les avis diffèrent sur l’importance à accorder aux articulations sacro-iliaques. Pour Robert Maigne la mobilité à leur niveau est minime et négligeable sauf pendant la grossesse. Pour le GETM d’Eric de Winter et l’école dijonnaise du Pr Guy Piganiol, les contraintes sont identiques à tous les étages du segment lombo-pelvi-fémoral et les dysfonctions affecteront tout aussi bien le rachis lombaire et lombo-sacré que les articulations sacro-iliaques et la symphyse pubienne. 

La pathologie pelvi-fémorale des lanceurs 

La ceinture pelvienne et les 2 hanches sont des zones anatomiques extrêmement sollicitées dans la pratique sportive. 

Chez les lanceurs, tout  déséquilibre lombo-pelvi-fémoral sera, non seulement synonyme de geste technique défectueux, mais aussi pathogène pour le rachis lombaire bas, les sacro-iliaques et la symphyse pubienne. 

Pour le médecin de terrain, toute douleur de cette région constitue un challenge diagnostique et thérapeutique toujours difficile à relever, et le diagnostic de pubalgie du carrefour pubien ou de toute autre entité anatomo-clinique régionale ne doit jamais être un diagnostic de facilité, tellement l’anatomie y est compliquée, les causes de déséquilibre fonctionnel nombreuses et les pathologies très souvent intriquées.  

Nous ne retiendrons que les plus significatives: les pubalgies vraies et fausses, le conflit antérieur de hanche et son risque de coxarthrose précoce, l’épiphysiolyse de hanche de l’adolescent sportif, les dysfonctions sacro-iliaques et les accidents musculaires du secteur sous-pelvien.

1- La pubalgie vraie 

Selon la conception française (Pr Rodineau), une pubalgie vraie correspond à un syndrome de surmenage douloureux du carrefour pubien du pli de l’aine. 

Il recouvre 3 entités anatomo-cliniques bien distinctes qui risquent de s'intriquer en cas de retard diagnostique et/ou de prise en charge inadaptée. Elles ont un mécanisme lésionnel commun, la faiblesse de la paroi postérieure du canal inguinal. 

Les facteurs de risque 

La pubalgie vraie est une pathologie du sportif jeune et presque exclusivement masculine. En athlétisme elle affecte toutes les disciplines: marche, épreuves combinées, perche, courses de fond et de demi-fond, steeple, haies, lancers. Les facteurs de risque sont nombreux, mais nous ne retiendrons que le déséquilibre de la balance entre des adducteurs très puissants/des abdominaux plus faibles et un ratio de force adducteurs/abducteurs < ou =  à 0,8 .

Les trois formes cliniques de la pubalgie

- La tendinopathie des adducteurs (pubalgie basse) ou des grands droits de l’abdomen (pubalgie haute) de diagnostic clinique facile (stades de Blazina et triade symptomatique: douleur à la palpation, à la contraction résistée et à l’étirement), et à l’imagerie peu contributive.

 - L’ostéo-arthropathie pubienne (pubalgie médiane) 

C'est elle la vraie pubalgie. Elle touche la symphyse pubienne par surmenage de l'articulation et déséquilibre musculaire du ratio adducteurs (forts)/ abdominaux (faibles). L’aspect sur les radiographies est celui d’une pseudo-arthrite, sans corrélation radio-clinique, que mes confrères Durey, Boeda et Rodineau ont classée en 4 stades. L'évolution favorable se fait environ en 3 mois avec le plus souvent restitution ad integrum de la symphyse pubienne.

- La pathologie pariétale abdominale

Il s'agit généralement d'une pathologie congénitale du canal inguinal. La douleur est sus-pubienne et irradie volontiers vers le pubis et les testicules. Elle est d'apparition progressive et impulsive aux efforts de toux. La palpation de l'anneau inguinal est sensible et cherchera à mettre en évidence une déhiscence, une pointe de hernie ou un anneau dilaté et sensible. Tous les signes positifs se majorent lorsqu'on fait tousser le blessé. L'imagerie est peu contributive. Dans un certain nombre de cas rebelles, la symptomatologie douloureuse du canal inguinal est liée à un  syndrome canalaire des nerfs ilio-inguinaux ou ilio-hypogastriques avec troubles sensitifs de la région inguinale et irradiation pubienne. Ils seront traités par des infiltrations scanno-guidées d’hydrocortancyl 125 mg. 

Le traitement d’une pubalgie vraie

Il est médical avant tout et conduit à une guérison dans 80 à 85% des cas. Le repos sportif est incontournable et peut aller jusqu'à 3 mois avec exclusion totale du geste technique déclenchant les douleurs. La prise en charge de la douleur est fonction de la forme anatomo-clinique et la kinésithérapie occupe une place de choix. Son objectif est d'éviter le passage à la chronicité. 

- Intérêt des injections de PRP  

Pour beaucoup d’auteurs elles sont efficaces dans les lésions tendineuses aiguës ou chroniques et dans l’ostéo-arthropathie. Elles seront suivies par un traitement fonctionnel qui doit débuter quelques jours après l’injection et être poursuivi plusieurs semaines.

- Place de la chirurgie

La chirurgie pariétale du canal inguinal, par abaissement des muscles larges de l'abdomen et leur mise en tension, doit être plus ou moins rapidement proposée, au plus tard vers le 4ème mois. La rééducation post-chirurgicale doit respecter les délais de cicatrisation de la sangle abdominale et éviter toute sollicitation intempestive de la paroi abdominale pendant les 4 premières  semaines. 

La prévention de la pubalgie vraie 

Dans cette pathologie complexe avec facteurs de risques nombreux et lésions multiples, des exercices physiques spécifiques à visée préventive doivent être intégrés dans la préparation physique des lanceurs, avec l'aide de kinésithérapeutes ou de préparateurs physiques spécialement formés: échauffement long, stretching avant tout exercice et surtout, à distance de l’exercice, renforcement musculaire excentrique des adducteurs (avec ou sans bandes élastiques) et des muscles larges de l’abdomen (gainage), correction des défauts techniques, éducation posturale. 

2- Les fausses pubalgies 

Il existe un certain nombre de fausses pubalgies qui se rapprochent cliniquement des pubalgies vraies. Les douleurs se projetant au niveau du pli de l’aine, elles en ont toute l’apparence. En réalité elles ont des causes différentes et sont des entités anatomo-cliniques bien distinctes. 

La problématique est que certaines peuvent parfaitement s’intriquer avec une pubalgie vraie en cas de retard diagnostique ou de prise en charge inadaptée. Les examens complémentaires seront alors d’un grand secours pour le clinicien. 

Ces fausses pubalgies comprennent :

- Les douleurs projetées d'origine rachidienne thoraco-lombaire

Le syndrome de la charnière dorso-lombaire de Robert Maigne pose problème à cause de sa projection lombaire basse faussement prise pour une pathologie de charnière lombo-sacrée, mais aussi parce que ce syndrome est presque toujours associé à une pubalgie vraie. Cette pathologie vertébrale de charnière, si elle n’est pas diagnostiquée précocément, traitée en même temps que la pubalgie vraie et régulièrement surveillée, sera source de chronicisation de la symptomatologie pubienne.

- La névralgie pudendale d'origine sacrée

C’est une neuropathie du canal d’Alcock dans lequel le nerf pudendal (honteux interne) se trouve contraint. Les douleurs, quand elles se projettent au niveau du pli de l’aine, peuvent un temps passer pour une pubalgie vraie et faire errer le diagnostic. Mais, à type de brûlures ou de picotements avec irradiation vers le périnée, elles finiront par évoquer un syndrome canalaire qu’une ou deux infiltrations scanno-guidées traiteront avec succès.

- Les fractures de fatigue des branches pubiennes

Elles se manifestent par des douleurs de topographie variable autour du pli de l’aine, mais avec cette caractéristique de se majorer à l’effort jusqu’à le rendre quasi impossible. Le diagnostic est radiologique et l’imagerie IRM sera déterminante pour le diagnostic précoce.

- Les dysplasies de hanche 

Elles correspondent à une malformation constitutionnelle de l’articulation de la hanche par déficit de couverture de la tête fémorale. Elles conduiront à une arthrose de hanche précoce de traitement chirurgical. 

3- Le conflit antérieur de hanche 

C’est un conflit par frottement entre la jonction tête fémorale-col du fémur et bord antérieur du cotyle-labrum (bourrelet cotyloïdien). Il affecte tout spécialement une population sportive qui sollicite les hanches dans des positions extrêmes de flexion et de rotation. En athlétisme ce sont les coureurs de haies et les sauteurs qui sont préférentiellement touchés et quelquefois les lanceurs de javelot. Si on laisse filer le conflit par frottement, il va évoluer vers des lésions cartilagineuses et une arthrose de hanche précoce. Le chirurgien suisse Reinhold Ganz a décrit 2 types de conflits, le conflit par effet came et celui par effet tenaille à cause d'un rebord cotyloïdien trop couvrant. En théorie la tête du fémur est bien ronde et vient parfaitement bien s’articuler dans le cotyle, doublé du bourrelet cotyloïdien. 

Quelquefois la tête du fémur n’est pas aussi ronde qu’elle devrait l’être et les sportifs qui ont des troubles de la sphéricité vont développer à terme une arthrose de hanche, la petite bosse de la tête fémorale, qui rentre dans le cotyle dans certains mouvements extrêmes, va finir par entraîner des lésions du cartilage qui vont s’étendre et détruire l’articulation. 

Les 2 formes cliniques 

Le conflit antérieur de hanche par effet came 

Il correspond à une déformation de la partie antérieure de la tête fémorale, avec un rajout en forme de bosse qui va entraîner des lésions cartilagineuses par hyperpression localisée. 

Le conflit antérieur de hanche par effet tenaille 

Il se différencie du précédent à cause d’une paroi antérieure cotyloïdienne trop couvrante qui va limiter la flexion de hanche, le col venant buter sur le bourrelet cotyloïdien. Dans l’effet tenaille, les lésions sur le cartilage restent proches du bourrelet et ne s’étendent pas au cotyle, si bien qu'une arthroscopie simple d’exérèse sur une ossification localisée du bourrelet donnera de bons résultats.

Le diagnostic 

Le sportif se plaint au départ de douleurs dans le pli de l’aine que l’on aurait tort de prendre pour une pubalgie vraie, de craquements ou de blocages fugaces de sa hanche en dysfonction. 

Ces signes d’alerte vont s’accentuer et devenir de plus en plus gênants fonctionnellement. 

A ce stade, l’examen clinique mettra en évidence un déficit de la rotation interne de hanche et une asymétrie de mobilité en flexion croisée. 

Les radiographies (face, faux profil de Lequesne et profil chirurgical) sont normales en début d’évolution puis vont finir par se positiver.

Le traitement 

A partir du moment où l’on a bien compris que le problème venait d’un trouble de la sphéricité ou d’une paroi antérieure trop couvrante avec lésions du bourrelet chez des sportifs, le chirurgien suisse Ganz a proposé d’opérer sous arthroscopie ce trouble de la sphéricité ou de lésion du bourrelet. 

Cette chirurgie a minima va sinon enrayer du moins considérablement freiner le processus arthrogène et permettre à une très grande majorité de sportifs de retrouver une hanche quasi parfaite et la possibilité de reprendre leurs activités sans trop de perte de niveau. 

Même s’il est encore un peu tôt pour affirmer qu’à très long terme on va éviter à ces sportifs la mise en place d'une prothèse, ce traitement conservateur a au moins le mérite de la simplicité et de l’efficacité sur les douleurs et sur la mobilité de la hanche. 

Il est moins efficace en cas de pincement de l’interligne articulaire ou de lésions cartilagineuses nettes.

La prévention

Chez les sportifs la présence de douleurs inguinales ou trochantériennes et une limitation de la rotation interne de hanche doivent immédiatement alerter, évoquer en premier un problème de hanche articulaire et faire pratiquer une imagerie qui conduira à un diagnostic précoce et à une intervention sous arthroscopie.

4- L’épiphysiolyse (décollement de l'épiphyse supérieure du fémur) du jeune lanceur

L'épiphyse supérieure du fémur correspond à son extrémité supérieure. Chez l'enfant et l'adolescent en période de croissance, cette épiphyse est séparée du col du fémur et du reste du fémur par du cartilage de conjugaison et l'épiphysiolyse correspond à un décollement de l'épiphyse fémorale qui glisse vers l'arrière ou vers le dedans. 

Généralités

Vers 13-15 ans et jusqu'à 18 ans, l'épiphysiolyse touche surtout le garçon (2,5 fois plus de garçons que de filles).  Elle peut être à début brutal ou progressif et à évolution longue. La pratique sportive est un facteur favorisant. Dans 30% des cas l'affection est bilatérale et dans ce cas, la 2ème hanche est atteinte le plus souvent à 18 mois d'intervalle.

Le diagnostic 

Il est souvent porté avec retard en raison de sa rareté et des formes trompeuses que peut prendre cette affection (les douleurs peuvent n’être ressenties qu’au niveau du genou et c’est un piège clinique fréquent). 

Comme l’examen du genou s’avérera strictement normal, il faut vite examiner l’articulation adjacente de la hanche qui mettra en évidence le plus souvent une asymétrie de mobilité spécialement en rotation interne, genou tendu posé sur le plan de la table d’examen, ou à la flexion croisée (flexion, adduction, rotation interne), genou fléchi à 90°. 

Des radiographies de hanche comparatives mettront en évidence le glissement de la tête fémorale, soit vers l'arrière, soit vers le dedans. 

Le glissement de l’épiphyse fémorale

Il est le plus souven

L’évolution spontanée 

Elle est  dominée par la majoration du déplacement et le risque de survenue d’un glissement «aigu» qui peuvent s'associer à des complications précoces (coxite, ostéonécrose) et à long terme (arthrose secondaire).

Le traitement 

Il est affaire de chirurgien orthopédique spécialisé et vise à stopper la progression du glissement pour éviter les complications dont la fréquence augmente avec l’importance du déplacement. Un diagnostic précoce reste le meilleur facteur pronostique dans cette affection.

A retenir : 

Entre 13 et 18 ans, tout adolescent sportif présentant une boîterie de hanche, des douleurs spontanées, localisées dans le pli de l'aine et irradiant jusqu'au genou, ou provoquées par l'examen physique, une limitation fonctionnelle de  la rotation interne seule ou de la flexion croisée  (flexion/adduction/rotation interne), doit être considéré comme une épiphysiolyse et conduire à une interdiction formelle de poursuivre  toute activité physique et sportive jusqu’à preuve radiologique du contraire et avis d'un chirurgien orthopédique.      

5- Les dysfonctions sacro-iliaques du SAMA lombo-pelvien

Dans la mesure où il est admis que le mouvement de flexion-extension au niveau des articulations sacro-iliaques est une nutation qui fait basculer le sacrum vers l’avant et le coccyx vers l’arrière et la contre-nutation, le mouvement inverse; qu’une des fonctions du SAMA lombo-pelvien est de transmettre et de répartir le poids du corps vers les 2 hanches par l’intermédiaire des 2 sacro-iliaques et que les contraintes sont identiques à tous les étages du segment lombo-pelvi-fémoral, force nous est donnée de reconnaître que ces dernières peuvent être, tout comme en lombaire et lombo-sacré, le siège de dysfonctions isolées chez les lanceurs, que des techniques manuelles bien ciblées seront parfaitement capables de corriger. Ces techniques manuelles lombo-pelviennes vont agir sur les articulations sacro-iliaques qui sont des di-arthrodies pourvues d’une certaine mobilité (affirmée par Ambroisé Paré d’abord, puis par Zaglas (1851) et Duncan (1854) qui ont parfaitement décrit les mouvements de nutation et de contre-nutation). Il faut reconnaître quand même, qu’après 50 ans, cette articulation est le siège de remaniements anatomiques dégénératifs se traduisant par une rigidité sacro-iliaque (dans une proportion de 87% et de manière très prononcée dans le sexe masculin). Cela ne changera rien au problème dans la mesure où biomécaniquement le système lombo-pelvien étant un système articulaire mécaniquement asservi, les techniques lombo-pelviennes et lombaires sur les segments L4/L5 et L5/S1, même en cas de raideur majeure sacro-iliaque, vont agir sur tous les étages du SAMA lombo-pelvien.

- Manoeuvre en dénutation

Une nutation du bassin ayant été mise en évidence par l'examen clinique (schéma de gauche: pouces de l’opérateur sur les fossettes sacrées de Michaléis, ascension d’une épine iliaque postéro-supérieure = signe de Piédalu). Cette nutation unilatérale du bassin sera traitée par une manoeuvre en dénutation (dé dans le sens de défaire la nutation), patient positionné sur le côté opposé à la dysfonction (image de droite). Dans cette dysfonction, l'ilion fixé en postérieur va être repoussé vers l'avant et vers le bas (on ne peut agir que sur lui).  

- Manoeuvre en décontre-nutation qui va repousser vers l’arrière l'hémi-sacrum bloqué vers l'avant et vers le bas.

- Une manoeuvre sur la symphyse pubienne (qui subit des contraintes de cisaillement en cas de nutation du bassin) complète les 2 manoeuvres précédentes: sujet en décubitus dorsal, genoux pliés. L’opérateur commande d’écarter puis de serrer les genoux. La pulsion se fait en sens inverse.

6- Les accidents musculaires dans le secteur sous-pelvien 

De tous les termes utilisés pour désigner les accidents musculaires intrinsèques,  celui qui est le mieux compris des sportifs parce qu'ils l'ont eux- même inventé est celui de « claquage ». Avec l'entorse externe de cheville, ce sont les 2 traumatismes les plus fréquemment rencontrés en pratique sportive. Un claquage survient quasi exclusivement sur un groupe musculaire des membres inférieurs mis en tension trop brutalement et s'accompagne le plus souvent d'un claquement caractéristique, à la manière d'un coup de fouet et audible parfois à plusieurs mètres de distance. La douleur vive quelquefois syncopale et l’impotence fonctionnelle immédiate empêchent un athlète, le plus souvent de vitesse ou de sauts, de poursuivre son effort. Excepté au javelot où nous en rencontrons de temps en temps, les trois autres disciplines (poids, disque et marteau), sauf exceptions,  semblent épargnées. 

A quoi correspond la lésion musculaire dans un claquage?

Depuis l'avénement de l’échographie et de l’IRM pour le haut niveau, la compréhension de la lésion musculaire n'est plus la même et on est passé d'une atteinte pure des fibres musculaires à une lésion musculo-aponévrotique. Et si l'on peut oser cette comparaison avec une feuille de vigne, on est passé d'une lésion de la partie verte de la feuille à une lésion qui intéresse les nervures.

Cette grande facilité à se claquer est à mettre au compte de l’évolution de l’espèce humaine (syndrome de Lucy)

C’est l’acquisition progressive de la station debout au cours de la phylogenèse (syndrome de Lucy) qui a rendu les muscles postérieurs, internes et antérieurs de cuisse, ischio-jambiers, adducteurs, droit fémoral du quadriceps trop courts structurellement et mal adaptés au travail excentrique pendant la marche et la course. Parmi les facteurs de risque classiquement évoqués dans un claquage, nous ne retiendrons que les déséquilibres musculaires quadriceps/ischio-jambiers et abdominaux/adducteurs, un dysentraînement qualitatif ou quantitatif, des antécédents de claquage et le SCTPM de Robert Maigne, amplement développé avec les bases médicales des blessures de surcharge.

Les deux mécanismes lésionnels des claquages

C'est à partir d'études suédoises chez les footballeurs professionnels qu'ont été décrits deux types de lésions: 72% sont des sprint-lésions qui surviennent pendant une course de vitesse ou sur une accélération et 28% sont des stretch-lésions par étirements brusques. Ce sont ces dernières qui sont susceptibles de frapper les lanceurs.

La clinique des claquages

Sur le plan clinique le diagnostic de claquage est une évidence, aussi nous ne retiendrons que les trois critères de gravité de Guillodo qui nous semblent les plus pertinents: 1- si la douleur immédiate est > 6 à l'échelle visuelle analogique (EVA) qui va de 1 à 10; 2- si la limitation à l'étirement du muscle lésé est > de 15%; 3- si malgré le protocole de traitement Rice ou Grec à appliquer immédiatement, douleur et impotence fonctionnelle sont > 3 jours, c’est grave et le temps de guérison de l'accident musculaire sera >  40 jours.

L’imagerie 

L’échographie reste l’imagerie de 1ère intention. L’examen IRM est réservé au haut niveau. Il est très sensible pour la détection de l’oedème, constamment présent dans un claquage.

La conduite à tenir dans les minutes qui suivent le claquage  

1- application immédiate du protocole GREC ou Rice: repos avec retrait immédiat de la compétition, glace, compression, élévation; ou application du système Game Ready qui comprime et refroidit en même temps.

2- prescription d'antalgiques de niveau 1 ou 2 suivant l’importance de la douleur à l’EVA (bannir absolument les anti-inflammatoires qui n’ont pas leur place la 1ère semaine, leurs effets, minorant la phase cellulaire de l’inflammation, aggravent le saignement).

3- le risque thrombo-embolique est gravissime et ne doit pas échapper à la vigilance du médecin. Suivant le degré de sévérité de l’impotence fonctionnelle, préventivement seront injectées des héparines de bas poids moléculaire (HBPM).

La prise en charge secondaire: avant tout une kinésithérapie de type excentrique 

La kinésithérapie a pour objectif premier d’optimiser la cicatrisation et de redonner au tissu musculaire ses propriétés biomécaniques et physiologiques initiales, garantes d'un geste sportif efficient. Le protocole suédois de type excentrique à partir d’exercices sub-maximaux est nettement supérieur à tous les autres protocoles. Par rapport à un protocole classique d’étirement et de renforcement musculaire concentrique, il réduit le délai moyen de cicatrisation qui passe ainsi de 51 à 28 jours. Les massages intempestifs du foyer lésionnel sont totalement contre-indiqués en phase aiguë. Ils peuvent entraîner des calcifications secondaires, une cicatrisation anarchique et des complications veineuses.

En prévention 

Tout déséquilibre musculaire quadriceps/ischio-jambiers et abdominaux/adducteurs doit être corrigé, l’entraînement physique maîtrisé; le renforcement excentrique des 4 groupes musculaires à risque doit faire partie intégrale de l’entraînement physique; le SCTPM et un DIM de Robert Maigne, amplement développé avec les bases médicales des blessures de surcharge, doivent être systématiquement recherché et traité.

7- L’arthrose de hanche ou coxarthrose du «vieux» lanceur

La hanche ou articulation coxo-fémorale unit le fémur à l'os coxal du bassin. C’est la plus grosse articulation du corps humain et la 2ème après l'épaule au niveau mobilité. 

Chez tous les individus et a fortiori chez les sportifs de force/vitesse comme dans les lancers, la hanche est soumise en permanence à d’importantes contraintes d’hyperpression articulaire (déjà pendant la marche, à chaque appui unipodal, elle supporte 4 fois le poids du corps). 

D'où le risque élevé de coxarthrose, la 2ème en fréquence après l'arthrose du genou. 

Cette arthrose de hanche qui touche environ 4% des individus entre 40 et 70 ans peut être primitive (sans cause précise) par dégénérescence, avec comme dans toute arthrose, 1 usure du cartilage articulaire (pincement articulaire), associée à de l’ostéophytose (sorte d'éperons osseux qui entourent l’articulation sur différentes localisations), des phénomènes d’ostéosclérose caractérisés par une dégradation de l'os sous-chondral et formation de lacunes (géodes) et à une inflammation de la membrane synoviale.

Une coxarthrose peut être aussi secondaire (avec cause), généralement une dysplasie sur un vice architectural (coxa valga, coxa vara ou coxa plana) ou 1 maladie articulaire pré-existante. 

Inversement à la population générale, la coxarthrose chez les lanceurs est presque toujours primitive. 

Epidémiologie

La prévalence (nombre de cas dans la population générale à un moment donné, englobant aussi bien les cas nouveaux que les cas anciens) de l’arthrose de hanche augmente avec l’âge, avec une légère prédominance féminine. 

Sa fréquence est en nette augmentation du fait du vieillissement de la population et de la progression des facteurs de risques tels que le surpoids et une sédentarité relative. 

L’OMS (organisation mondiale de la santé) a estimé qu’entre 2015 et 2050 la proportion des plus de 60 ans dans le monde va passer de 12% à 22%.

Parmi les plus de 60 ans, il y en aura un grand nombre qui souffriront d’arthrose, maladie articulaire la plus répandue et responsable d'une sédentarisation forcée. 

L’arthrose, toutes localisations confondues, touche actuellement 15% de la population mondiale dont 20 millions d’européens. 

A 65 ans, selon les critères radiologiques, il y a à peu près 70% des gens qui vont présenter des signes d’arthrose. 

Cette proportion va encore s’accentuer avec l’âge avec un lien scientifiquement prouvé entre le fait de souffrir d’arthrose et de développer un diabète, de l’obésité et des maladies cardio-vasculaires. 

En-dehors de la chirurgie, aucun traitement médical ne permet encore de véritablement soigner l’arthrose de hanche.

Les traitements médicaux proposés aux coxarthrosiques ne les améliorent que sur le plan algo-fonctionnel et encore pendant 1 certain temps, et c’est déjà bien. 

Seul un remplacement prothétique ou la correction d’un vice architectural est capable de leur redonner une vie normale.

Physiopathologie

Un excès pondéral dans la population générale et des micro-traumatismes répétés chez les sportifs sont les grands pourvoyeurs d’arthrose de hanche. 

De la même manière, un vice architectural par dysplasie ou, chez les lanceurs, une anomalie de sphéricité de la tête fémorale ou un toit de cotyle trop couvrant, vont entraîner des pressions qui vont se répartir inégalement sur le cartilage et le bourrelet cotyloïdien, les abîmer, et finalement aboutir à une arthrose plus précoce (coxarthrose sur hanche dysplasique ou par conflit antérieur). 

Les lésions anatomiques dans une arthrose de hanche affectent tous les tissus articulaires: 

Non seulement le cartilage, qui va se fissurer de la superficie vers la profondeur, finira par se détacher en lambeaux et ses propres cellules (les chondrocites) vont sécréter des enzymes de dégradation; mais aussi l’os sous-chondral qui va être le siège d’un hyper-remodelage condensant et géodique et la membrane synoviale qui va devenir inflammatoire et hypervascularisée.

De l’ostéophytose (sorte de bave osseuse) cotyloïdienne, péricapitale, cervicale inférieure, sous-capitale, de l’arrière-fond du cotyle, complète le tableau.

Signes cliniques de présomption

- les douleurs 

Elles ont un horaire mécanique et apparaissent lorsque l'articulation est en charge ou en activité (pendant la marche ou à la station debout prolongée) et sont calmées par le repos. 

Leur topographie est variable. 

Dans les cas typiques:

 - il s’agira de douleurs dans le pli de l’aine à irradiation crurale antérieure

- parfois il va s’agir de douleurs postérieures fessières ou encore de la région externe trochantérienne. 

- dans un certain nombre de cas les douleurs vont siéger exclusivement au niveau du genou (fausses gonalgies et piège clinique: toute douleur du genou doit conduire systématiquement à examiner la hanche).

- la gêne fonctionnelle 

Elle va se manifester par une limitation du périmètre de marche en durée ou en distance, de  la boiterie, des difficultés pour rentrer ou sortir d'une voiture ou d'une baignoire, de s'asseoir sur un siège bas, de mettre ses chaussettes. 

L'indice de Lequesne est un indice algo-fonctionnel basé sur:

- la douleur

- le périmètre de marche 

- les difficultés dans la vie quotidienne. 

Plus le score de Lequesne  est élevé, plus l’arthrose de hanche est sévère.

- l’examen clinique

Il est toujours comparatif par rapport à la hanche controlatérale et affirmera l'existence d'une pathologie coxo-fémorale, sans présumer de l’étiologie. 

Le signe majeur est la limitation fonctionnelle douloureuse des mouvements de la hanche qui va affecter en priorité la flexion croisée: flexion-adduction-rotation interne. 

Les chiffres retrouvés sur une hanche saine sont de 130° en flexion, 60° en abduction, 30° en adduction, 60° en rotation externe, 40° en rotation interne, 30° en extension. 

Le diagnostic étiologique par les radiographies

Pour le diagnostic de coxarthrose primitive ou secondaire, les radiographies  avec clichés du bassin de face et faux profil de Lequesne des 2 hanches sont essentielles: 

Recherche dans 1 coxarthrose primitive :

- d’1 pincement de l'interligne dû à la diminution de hauteur du cartilage

 - d’1 réaction osseuse d’ostéosclérose sous forme de condensation sous-chondrale au niveau de la zone de pincement articulaire et parfois géodes

- d’1 ostéophytose de l'avant-toit de l’acétabulum (cavité articulaire de la hanche qui reçoit la tête du fémur), de la jonction toit-fond (double fond) et à sa partie inférieure et interne sur le pourtour du col du fémur (collerette ostéophytique). 

Recherche dans 1 coxarthrose secondaire de signes radiographiques 

- dysplasiques ( coxa valga ou coxa vara)

-  ou de maladie articulaire

Evolution d’une coxarthrose

Les coxarthroses primitives ont de grandes différences dans leur manière d’évoluer individuellement (ça va de quelques années à quelques décennies et environ 60 % des coxarthroses vont nécessiter la mise en place d’une prothèse totale de hanche après 10 ans d’évolution). 

Les coxarthroses secondaires ont un début plus précoce (vers 30 ou 40 ans) et la dégradation articulaire y est plus rapide. 

Une forme particulière d’arthrose de hanche, la coxarthrose destructrice rapide, provoque en moins d'un an 1 disparition complète du cartilage et d'importantes destructions osseuses de la tête fémorale. 

Traitement 

Celui de la coxarthrose primitive 

- Il est longtemps médical

Il va s’agir d’un traitement de rééducation fonctionnelle avec un grand volet d’éducation thérapeutique: ménagement relatif de l'articulation avec réduction des déplacements à pied; limitation des stations debout; marche avec une canne tenue du côté opposé à la coxarthrose; entretien de la trophicité musculaire et des amplitudes articulaires par kinésithérapie idéalement en décharge (balnéothérapie en piscine); prévention des attitudes vicieuses. Le maintien d'une activité physique est  conseillé. 

Associé à un traitement médicamenteux avec :

- des antalgiques de niveau 1 (paracétamol) ou de niveau 2 (+ codéine) 

+ des anti-inflammatoires (AINS); 

- un traitement anti-arthrosique d’action lente (sulfate de chondroïtine, glucosamine, etc);

-  une visco-supplémentation scanno-guidée avec de l’acide hyaluronique (AH) et pour certaines équipes médicales, injections de PRP (Platelet Rich Plasma=concentré de plaquettes sanguines) en cas d’échec de la visco-supplémentation.

- Il deviendra chirurgical dans une coxarthrose primitive

Par la mise en place d'une prothèse totale de hanche, dès que la dégradation algo-fonctionnelle sera patente à l’indice de Lequesne et sans attendre que la fonte musculaire des fessiers et du quadriceps ne soit trop prononcée et devienne rédhibitoire. 

Dans les coxarthroses secondaires à une pathologie articulaire ou à une malformation architecturale 

Dès l'apparition des douleurs, un traitement chirurgical correctif doit être envisagé très précocement (butée cotyloïdienne ou ostéotomie), avant que la dégradation articulaire et fonctionnelle ne complique les suites opératoires.

Coxarthrose et sports

Sports autorisés 

- marche rapide

- golf 

- natation

- canoë 

- bowling

 - voile

- gymnastique 

- ski alpin sur pente moyenne et ski de fond 

- vélo d’appartement.

Sports autorisés à leur niveau antérieur de pratique 

- tennis en double sur terre battue

- randonnées en moyenne montagne

- tennis de table

- vélo de route

- équitation, escrime

Sports déconseillés 

- tennis en simple sur terrain dur, squash

- ski alpin sur pente raide et/ou bosses, escalade

- sports de combat et de ballon avec pivots

- course à pied sur sols durs.

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