Avis à lire par tous les lecteurs:

Les premiers articles du blog "Un médecin du sport vous informe" datent de 2013, mais la plupart sont mis à jour pour pouvoir coller aux progrè médicaux. Ce blog inter-actif répond à la demande de nombreux confrères, kinésithérapeutes, étudiants en médecine et en STAPS, patients et sportifs. Il est le reflet de connaissances acquises tout le long de ma vie professionnelle, auprès d'enseignants remarquables, connaissances sans cesse actualisées que je me suis efforcé de rendre accessibles au plus grand nombre par le biais d’images trouvées sur le Net, images qui sont devenues par la force des choses, la propriété intellectuelle de tous; si cela dérange, ces images seront retirées.

Certains articles peuvent apparaître un peu plus polémiques que d'autres et indisposer, mais il n'est pas question pour l'auteur de tergiverser ou de se taire, quand il s'agit de problèmes d'éthique, en particulier en matière de dopage et quand la santé des sportifs est en jeu, compte tenu du nombre élevé de blessures liées au surentraînement et à une pratique imbécile d'une certaine musculation, qui n'est plus au service de la vitesse et de la force explosive utile (et non de la force maximale brute), qui sont les deux qualités physiques reines, qui ne respecte pas les règles de la physiologie musculaire et qui, au lieu d'optimiser la performance, fait ressembler certains sportifs body-buildés à l'extrême, davantage à des bêtes de foire gavées aux anabolisants, qu’à des athlètes de haut niveau.

Ce blog majoritairement consacré à la traumatologie sportive, est dédié à mes maîtres les Prs Jacques Rodineau, Gérard Saillant et à tous les enseignants du DU de traumatologie du sport de Paris VI Pitié Salpétrière et en particulier aux docteurs Jean Baptiste Courroy, Mireille Peyre et Sylvie Besch. L'évaluation clinique y tient une grande place: "la clinique, rien que la clinique, mais toute la clinique" et s'il y a une chose à retenir de leur enseignement, c'est que dans l'établissement d'un diagnostic, l'examen clinique, qui vient à la suite d'un bon interrogatoire, reste l'élément incontournable de la démarche médicale. Toutefois dans le sport de haut niveau et guidé par la clinique, l'imagerie moderne est incontournable : radiographie conventionnelle, système EOS en trois dimensions pour les troubles de la statique rachidienne, échographie avec un appareillage moderne et des confrères bien formés, scanner incontournable dans tous les problèmes osseux et enfin IRM 3 Tesla, le Tesla étant l'unité de mesure qui définit le champ magnétique d'un aimant; plus le chiffre de Tesla est élevé et plus le champ magnétique est puissant ("à haut champ") et plus les détails des images sont fins et la qualité optimale.

Hommage aussi au Pr Robert Maigne et à son école de médecine manuelle de l'Hôtel Dieu de Paris ou j'ai fais mes classes et actuellement dirigée par son fils, le Dr Jean Yves Maigne. Je n'oublie pas non plus le GETM (groupe d'étude des thérapeutiques manuelles) fondé par le Dr Eric de Winter et ses enseignants, tous des passionnés; j'y ai peaufiné mes techniques et enseigné la médecine manuelle-ostéopathie pendant 10 années.

Dr Louis Pallure, médecin des hôpitaux, spécialiste en Médecine Physique et Réadaptation, médecin de médecine et traumatologie du sport et de médecine manuelle-ostéopathie, Pr de sport et musculation DE, ex médecin Athlé 66, comité départemental 66, ligue Occitanie et Fédération Française d’Athlétisme, médecin Etoile Oignies Athlétisme.

jeudi 27 avril 2023

Le genou du Lanceur en Athlétisme

 Généralités : Le genou est la plus grosse articulation du corps humain et aussi l’une des plus exposées en matière de traumatologie sportive. Il sert à passer le pas et, pendant la marche et les activités physiques, la bipédie fait subir à ses surfaces articulaires des pressions considérables (de l’ordre de 350 Kg/cm2 en appui monopodal, dont 70% seront absorbés par le compartiment interne) et des contraintes de tractions importantes sur l'appareil capsulo-ligamentaire et tendino-musculaire. A ces exigences imposées par la phylogenèse, le genou a répondu parfaitement par le cartilage de revêtement le plus épais de l'organisme, l'interposition de ménisques pour pallier au défaut de congruence de ses différentes composantes articulaires et par un dispositif péri-articulaire  extraordinairement efficient.

Anatomie fonctionnelle 

Le fonctionnement du genou étant particulièrement complexe, si l’on veut bien comprendre les différentes pathologies et tout spécialement les laxités secondaires à des ruptures des ligaments stabilisateurs du genou, il est fondamental de connaître d’abord son fonctionnement normal. 

Il comprend 2 articulations bien distinctes, l’articulation fémoro-patellaire entre trochlée fémorale et face postérieure de la rotule avec sa physiologie propre et les 2 compartiments fémoro-tibial interne et externe de l’articulation fémoro-tibiale qui mettent en contact les 2 condyles fémoraux et les 2 plateaux tibiaux. 

Les 2 compartiments du genou sont foncièrement différents à la fois dans leur conception et dans leur fonctionnement. Le compartiment fémoro-tibial interne est synonyme de stabilité. Il assure une coaptation articulaire efficace par l’intermédiaire d’un système ligamentaire puissant et par une complémentarité osseuse convenable entre la convexité de la poulie condylienne interne et la concavité de la glène tibiale. 

A l’opposé, le compartiment fémoro-tibial externe est taillé pour la mobilité. La coaptation articulaire y est moindre que sur le côté interne à cause de la faible tension de son appareil capsulo-ligamentaire et de son incongruence articulaire, avec 1 condyle externe tordu sur son axe sagittal en forme de haricot convexe et un plateau tibial externe, également convexe.

Le compartiment interne est congruent et stable; le compartiment externe est non congruent et mobile

Fonctionnellement cette double articulation fémoro-tibiale (F/T) est décrite comme une articulation bi-condylienne. 

En réalité elle fonctionne comme une articulation trochléenne modifiée par le massif des épineuses qui autorise 2 degrés de liberté, la flexion/extension et la rotation. 

- Dans le plan sagittal, le mouvement de flexion/extension (F/E) s’effectue par roulement-glissement des condyles sur les surfaces tibiales, avec une grande amplitude de mouvement de l’ordre de 150°. 

- Dans le plan horizontal, la genèse embryologique incomplète de la crête trochléenne tibiale du massif des épines autorise des mouvements de rotation (R) dont l’amplitude varie en fonction de la flexion du genou (R compris entre 26° et 29°). 

- Dans le plan frontal, il n’y a aucun mouvement physiologique, excepté une petite mobilité en varus correspondant à une adaptation minime aux contraintes de varus/valgus.

La double articulation fémoro/tibiale présente des axes de mouvement sagittal de flexion/extension et horizontal en rotation qui sont perpendiculaires et le lieu d’interception géométrique de ces axes définit le centre articulaire du genou (CAG).  Il correspond au point d’application des forces musculaires multidirectionnelles (le moteur musculaire des muscles péri-articulaires du genou) qui s’exercent sur ce CAG. Ce centre articulaire du genou se confond avec le massif des épines tibiales et donc avec les 2 ligaments du pivot central et on peut affirmer avec certitude que le pivot central ligamentaire correspond bien au CAG.

Le genou musculaire

1- Le moteur musculaire du genou

Le moteur musculaire du genou est constitué par ses muscles péri-articulaires: le quadriceps est extenseur et un peu rotateur interne, les muscles jumeaux interne et externe sont de puissants fléchisseurs et pas du tout rotateurs, les haubans musculaires latéraux (tenseur du facia lata et biceps fémoral) sont uniquement fléchisseurs et rotateurs externes, les haubans internes (muscles de la patte d’oie: couturier, droit interne et semi-tendineux) sont uniquement fléchisseurs et rotateurs internes.

La force motrice (Fm) a une direction fixe, parallèle à l'axe des fibres musculaires et un point d'application (PA) situé différemment par rapport au CAG et aux axes sagittaux et horizontaux.

2- Les forces musculaires perturbatrices

Le moteur musculaire du genou présente malgré tout un sérieux inconvénient, celui d’engendrer des forces perturbatrices qui agissent non plus sur les axes du centre articulaire du genou, mais directement sur les structures osseuses et en l’occurrence, pour le genou, sur le tibia. Par exemple, pour le quadriceps les forces perturbatrices vont s’exercer sur le tibia en position d'extension complète et jusqu’à 60° de flexion, d’abord en tiroir antérieur, puis en tiroir postérieur. Pour les muscles jumeaux du mollet, elles tirent sur les condyles sur lesquels elles s’insèrent vers l’arrière et donc exercent une contrainte délétère perturbatrice en tiroir antérieur, quel que soit le degré de flexion du genou. Ces forces perturbatrices musculaires risqueraient de déstabiliser complètement le CAG et compromettre le fonctionnement du genou, s’il n’y avait pour les contrer les stabilisateurs statiques ménisco-ligamentaires.

La stabilité du genou

La stabilité du genou est assurée par les 2 ménisques, les différents ligaments et les formations fibreuses. Comme tout ligament, ceux du genou sont des éléments élastiques composés de fibres de collagène qui en font des forces de rappel, dont l’action stabilisatrice va être proportionnelle à leur état de tension, avec une relation non linéaire entre la force de rappel développée par le ligament et son allongement. Les 2 variables ne sont pas proportionnelles, en début de sollicitation d’un ligament la force de rappel est moindre. 

Une fois les fibres recrutées, le ligament subit une phase de déformation élastique avec allongement sans dommage pour le ligament. Si la contrainte se poursuit, il va y avoir rupture partielle, puis totale, sans parallélisme avec la force de rappel développée par le ligament qui, elle, n’augmente pas. 

1- Action stabilisatrice des ménisques

Les 2 ménisques font office de cales et améliorent la congruence fémoro-tibiale tout en répartissant les contraintes. Ils ont un effet dynamique par leurs connexions postérieures avec les points d’angles antéro-interne (PAPI) et postéro-externe (PAPE), avec le semi-membraneux pour le ménisque interne (MI) et le muscle poplité pour le ménisque externe (ME). 

Genou en flexion, ils avancent et genou en extension, ils reculent et se comportent donc comme des sangles de protection activo-passives.

2- Action stabilisatrice du pivot central (LCA+ LCP) 

Parce que le pivot central qui englobe le ligament croisé antérieur et le ligament croisé postérieur se confond avec le centre articulaire du genou, son action stabilisatrice est déterminante. Le pivot central stabilise le genou dans les 3 plans de l'espace et particulièrement en sagittal où le LCA contrôle la translation antérieure, tandis que le LCP contrôle la translation postérieure. Dans le plan horizontal, le LCA s’enroule autour du LCP et contrôle la rotation interne. La rotation externe échappe au pivot complètement décroisé et inefficace dans cette position. Dans le plan frontal, lorsque le genou est tendu, le pivot s’oppose aux contraintes en varus/valgus. Quand le genou est fléchi, le varus/valgus est contrôlé par les ligaments collatéraux, LCI pour le valgus et LCE pour le varus.

3-Action stabilisatrice des  formations fibreuses postérieures 

Elles forment un ensemble fonctionnel avec les cornes postérieures des ménisques qu'on leur adjoint. 

Ce sont les premiers freins de l'avancée du tibia et donc du contrôle de la rotation externe, genou en flexion.

4-Action stabilisatrice des formations internes, LCI et PAPI

- Le ligament collatéral interne (LCI, ex LLI) 

C’est un ligament très puissant, très adhérent à la capsule. Il  court du condyle interne à la métaphyse tibiale proximale interne. Il s’oppose aux contraintes en valgus du genou en flexion. 

Avec le PAPI il contrôle la rotation externe en freinant l’avancée du plateau tibial interne et la translation antérieure.

- Le PAPI 

C’est une structure très résistante. Il est formé par le ligament oblique postérieur, la corne postérieure du MI et le tendon du muscle semi- membraneux qui est l’élément actif du PAPI. 

Il contrôle le tiroir postérieur, la rotation interne et le valgus dans une position proche de l’extension. 

5- Action stabilisatrice des formations externes, LLE et PAPE

- Le ligament collatéral externe (LCE, ex LLE) 

Il est tendu du tubercule condylien externe à la tête du péroné et n’adhère pas à la capsule. 

Il contrôle seul le varus quand le genou est fléchi. Quand le genou est tendu, il participe à son contrôle avec le LCP.

- Le PAPE 

Il est moins résistant que le PAPI. Il se compose de la corne postérieure du ménisque externe, de la coque condylienne externe, du tendon poplité, du muscle poplité qui est son élément actif, du complexe poplité fibreux et d’une arcade à sa partie inférieure (ligament poplité arqué) pour le tendon principal du muscle poplité. 

II empêche le recul du plateau tibial externe et doit être réparé en cas de lésion. 

Il contrôle essentiellement la translation postérieure, la rotation externe et le varus, genou à 30°de flexion. 

LCE et PAPE stabilisent la rotation externe, limitent la translation antérieure et accessoirement la rotation interne. 

Ils ont un rôle anti-varus modéré.

6- Action stabilisatrice des formations antéro-externes 

Elles participent au contrôle de la rotation interne et peuvent être lésées en cas de torsion excessive du genou en rotation interne et emporter un fragment osseux à leur insertion tibiale, en arrière du tubercule de Gerdy, connu sous le terme de fracture de Segond. 

Sa présence sur des radiographies en frais signe obligatoirement une rupture du LCA, le désamarrage des formations antéro-externes étant toujours précédé par celui du LCA (la présence d'une pastille osseuse emportant la marge tibiale externe est pathognomonique de la rupture du LCA).

La stabilité du genou en résumé

1- La stabilité sagittale 

Genou en extension, le LCA agit seul sur le déplacement antérieur. Lésion du LCA = translation antérieure du tibia = signe de Lachman à pratiquer à plusieurs degrés de flexion entre 10° et 25° et  toujours indolore, sauf si lésion méniscale associée.

Genou en flexion, la translation antérieure est aussi limitée par les ligaments collatéraux et les points d’angles. Elle est, au mieux, appréciée à 70° de flexion. Dans une lésion isolée du LCA, il n’y a pas de tiroir antérieur direct (TAD). Si un TAD est présent dans une lésion fraîche du genou, cela correspond à une lésion du LCA + des lésions des formations latérales ou postérieures, surtout quand la cale représentée par le ménisque interne disparaît. 

La translation postérieure s'apprécie à 90° de flexion. Elle est limitée par le LCP et les cornes postérieures des 2 ménisques.

2- La stabilité rotatoire

Le déplacement en rotation est contrôlé par le pivot, le LCA quand le genou est proche de l'extension et le LCP genou en flexion. Le genou n’a que deux positions de stabilité, le VFE et le VRI. Des lésions capsulo-ligamentaires très souvent associées surviendront sur un mouvement forcé indirect ou plus grave si le mouvement est appuyé sur les 2 positions de stabilité : 

en VFE (valgus/flexion/rotation externe) la stabilité est à dominante active, ischio-jambiers pour la flexion avec en particulier le demi-membraneux, le poplité pour la rotation externe, avec danger d'abord théorique pour le PAPI et le LCI, ce qui n'est toujours pas vérifié en pratique où le LCA  peut être lésé isolément. 

en VRI (varus/flexion/rotation interne) la stabilité est activo-passive par la bandelette de Maissiat et le biceps, avec danger pour le PAPE et le LCA en cas de mécanisme lésionnel en VRI.

3- La stabilité frontale 

Le valgus est limité par le LCI + le pivot central ligamentaire, genou en extension. Petit valgus = lésion du LCI = entorse bénigne.  Grand valgus = lésion du pivot + LCI. 

Le varus est limité par LCE + pivot (LCP surtout) + PAPE. Petit varus physiologique en flexion. Grand varus en extension = lésion externe (LCE) + postéro-externe (PAPE) + pivot. 

La stabilité du genou est maximale en VFE et VRI. Si ces positions de stabilité maximale sont forcées, les structures ligamentaires stabilisatrices passives vont céder.

4- Limites du système de stabilisation ligamentaire

Le système ligamentaire du genou n’échappe pas à la règle de tout système ligamentaire qui a ses propres limites liées à la rigidité fonctionnelle de ses structures. Avec une résistance élastique de 60 kilos/cm2 le LCA n’est pas assez fort pour contrer le quadriceps qui peut développer des forces de contraintes pouvant aller jusqu’à 400 kilos/cm2. 

Le genou aura donc besoin d’un système de suppléance qui sera en même temps un système de protection pour les ligaments. Ce système de suppléance sera forcément dynamique et dévolu aux différents muscles du moteur musculaire péri-articulaire. Ils s’avéreront les meilleurs des coaptateurs articulaires et assureront, avec l’action stabilisatrice des différents ligaments, l’équilibre biomécanique du genou face aux forces perturbatrices qui seront ainsi maîtrisées.

Les pathologies du genou

1- Le genou méniscal                                                                      

Les ménisques sont des fibro-cartilages en forme de demi-lune qui s’interposent entre l’extrémité inférieure du fémur et l’extrémité supérieure du tibia de manière à amortir et à répartir les différentes contraintes exercées sur le genou. Grâce à leurs connections avec les formations postérieures, le ménisque interne recule de 6mm en flexion et le ménisque externe de 12 mm. En extension ils sont attirés vers l'avant par les ligaments ménisco-rotuliens, et en rotation leur déplacement se fait en sens inverse de celui de la glène tibiale. 

Le point de départ d’une lésion méniscale traumatique est un mécanisme de torsion qui commencera par déchirer sa corne postérieure. 

Si ce mécanisme lésionnel en twist se répète (classique drame en plusieurs actes), la lésion traumatique se complètera progressivement vers l’avant et aboutira à une lésion dite en anse de seau qui se traduira en clinique par des blocages itératifs du genou. 

Avec l’âge et les répétitions des contraintes axiales les ménisques vont dégénérer et se fissurer horizontalement (lésion radiaire) en feuillets de livre, de dedans (versant libre) en dehors (mur périphérique); mais ces fissures radiaires à faible pouvoir chondrogène resteront longtemps bien tolérées fonctionnellement. Quand la totalité de la largeur du ménisque est lésée, quelques gouttelettes de synovie peuvent passer à travers une brèche capsulaire et former un kyste méniscal bien visible. 

Le ménisque interne ou médial (MI)

le MI est anatomiquement très ouvert (en forme de C) et adhère fortement au plan ligamentaire interne. Il a un effet de cale par sa corne postérieure qui limite la translation antérieure et, en le maintenant fixé, ses puissantes attaches ménisco-tibiales le rendront vulnérable à tout mécanisme lésionnel en torsion.

Le ménisque externe ou latéral (ME)

Le ME est anatomiquement fermé (en forme de o) et très mobile. Il est sujet aux anomalies morphologiques (ménisque discoïde visible en imagerie). 

La lésion méniscale externe est plus antérieure et plus proche du mur périphérique que celle du ménisque interne, avec quasi constamment au bout d'un certain nombre d'années d’évolution, formation d'un pseudo-kyste extériorisé dans l'interligne antéro-externe.

Diagnostic d’une lésion méniscale

Aucune manoeuvre physique de coincement méniscal n’est pathognomonique mais, dans le diagnostic d’une lésion méniscale, c’est la symptomatologie clinique qui reste la plus fiable et toute douleur après traumatisme en torsion d'un genou doit faire évoquer de principe une lésion méniscale longitudinale à point de départ postérieur. 

Formes cliniques 

A côté du classique drame en plusieurs actes souvent étiqueté à tort entorse du genou, il existe 3 formes cliniques assez caricaturales de diagnostic facile: 

1- les kystes méniscaux extériorisés dans l'interligne externe pour le ME ou dans le creux poplité pour le MI. 

2- les désinsertions périphériques (rarement isolées et plutôt sur entorses graves du genou) avec tableau clinique d’hémarthrose. 

3- les blocages aigus avec flexum irréductible du genou sur anse de seau luxée. 

Dans les lésions anciennes et particulièrement chez les vétérans, la symptomatologie est celle d'une souffrance chronique avec épanchement intra-articulaire et amyotrophie quadricipitale. 

L’imagerie

L'IRM est maintenant le moyen d’investigation le plus prescrit et un très bon moyen d’évaluation des différentes lésions méniscales avec 4 grades lésionnels. 

Le traitement des lésions méniscales

En prévention de l'arthrose fémoro-tibiale bon nombre de lésions méniscales, lorsqu’elles sont non chirurgicales et symptomatiques, sont traitées par des infiltrations de corticoïde (Diprostène) pour vaincre l'inflammation réactionnelle. Elles seront suivies par des injections d’acide hyaluronique par voie latéro-rotulienne externe (Go on, Arthrex, Sinovial, Synvisc One), excellente alternative à la chirurgie. En cas de résistance à l'acide hyaluronique, des injections de PRP sont de plus en plus proposéesLa douleur, souvent vive dans les atteintes du mur périphérique, peut être calmée par des infiltrations d’anesthésiques locaux (xylocaïne). 

L’abstention chirurgicale est de mise lorsque la lésion méniscale traumatique se limite à la corne postérieure et dans les lésions dégénératives. Si la lésion déborde vers l’avant et si le sportif est gêné dans sa pratique, il est légitime de procéder à une méniscectomie partielle sous arthroscopie tout en restant très économe dans le geste chirurgical. Les suites de la chirurgie (hydro-hémarthrose) sont vénielles mais ne doivent pas faire oublier l'augmentation notable de la surcharge mécanique imposée au compartiment lésé. 

Une suture chirurgicale peut être envisagée sur les lésions méniscales très périphériques en zone rouge très souvent associées à des ruptures des ligaments du genou (cette suture méniscale n'alourdit pas la ligamentoplastie). 

A noter que la réparation chirurgicale du ménisque externe peut s’accompagner d’une chondrolyse aiguë, complication redoutable lorsque la reprise de l’activité sportive est trop précoce (avant le 4ème mois). 

2- Le genou ligamentaire 

Les différents ligaments du genou constituent un ensemble solide et cohérent qui assure sa stabilité frontale par les ligaments collatéraux et sa stabilité antéro-postérieure et rotatoire par le pivot central. Dans les lancers (au javelot surtout, par insuffisance de fixation au moment du double appui), cet ensemble peut se rompre en cas de mécanisme lésionnel en VRI ou en VFE.

Parce qu’il adhère très fortement à la capsule articulaire et au peu mobile MI, le maillon faible de ce système ligamentaire, particulièrement efficient pour assurer la stabilité et la cinétique fémoro-tibiale de cette articulation, reste le ligament collatéral interne.

Le pivot central (LCA + LCP)

En maintenant le contact fémoro-tibial lors des mouvements sagittaux et de rotation, le pivot central (ligament croisé antérieur et ligament croisé postérieur) intervient de façon majeure dans la cinétique et la stabilité du genou. Une lésion d’un de ces 2 éléments définit l'entorse grave.

1- Le ligament croisé antérieur ( LCA )

Long de 38 mm, large de 11 mm et à grand axe oblique, le LCA est composé de deux faisceaux: le faisceau antéro-médial et le faisceau postéro-latéral (avec possibilité de rupture totale ou partielle d'un seul faisceau). 

Il est vascularisé essentiellement à partir de la membrane synoviale qui se comporte comme une lame porte-vaisseaux (l'hémarthrose peut manquer en cas de lésion isolée, de rupture partielle ou de brèche capsulaire). 

Les propriétés visco-élastiques du LCA s'altèrent avec l'âge et l’immobilisation. Il  peut s'allonger physiologiquement jusqu'à 20% de sa longueur sans dégât anatomique, mais en cas de rupture, il n’a aucune possibilité de cicatrisation sauf à se mettre en nourrice sur le LCP. 

Son innervation est riche en propriocepteurs et pauvre en récepteurs de la douleur (d’où cette extrême diversité du tableau douloureux qui va de l'indolence totale jusqu’à la douleur syncopale).

Evolution naturelle d'une rupture du LCA 

Chez les sportifs (surtout ceux qui ont un morphotype en varus), l’évolution d’une rupture du LCA se fait vers une instabilité majeure avec entorses à répétition, dégradation méniscale et cartilagineuse, laxité antérieure globale par distension des formations antérieures et latérales avec cliniquement un tiroir antérieur direct (syndrome chronique du LCA de Mac Intosch). 

Dans les suites immédiates d'un traumatisme du genou et jusqu'à 2 heures après, c'est l'examen clinique qui est le moyen le plus fiable pour mettre en évidence une entorse grave du genou (fiabilité supérieure à celle de l’IRM).

Les signes immédiats de gravité d’une rupture du LCA

- La douleur 

En cas de lésion isolée la douleur parfois syncopale au début s’atténue fortement en quelques minutes et laisse du temps pour un bon examen clinique qui va devenir beaucoup plus compliqué quelques heures après, la tension globale liée à l'hémarthrose entravant la recherche d'une rupture. 

Si la douleur persiste sans intervalle libre, surtout sur mécanisme lésionnel en VFE comme notre lanceuse de javelot au dernier championnat de France Élite 2020 à Albi, il faut craindre une lésion associée du plan ménisco-ligamentaire interne. Inversement, en cas d’indolence totale toujours possible, cette absence de douleurs peut être source d'erreur diagnostique ou de non consultation, la récupération apparente d'une lésion du LCA se faisant en quelques jours.

- Le craquement ressenti par le blessé au moment de l’impact

L’impotence fonctionnelle immédiate 

A de rares exceptions près, on ne se relève pas seul après une entorse grave.                                                                      

- Le gonflement rapide du genou 

En quelques heures le genou gonfle. Cela correspond à une hémarthrose (épanchement de sang intra-articulaire) qui, en cas de brèche capsulaire, va s'extérioriser sous la forme d'une ecchymose secondaire. 

- Le signe de Lachman à 20° de flexion  

C’est le signe cardinal de certitude. Il correspond à une avancée ample du tibia (de quelques millimètres jusqu'à 10 mm et plus) avec arrêt mou et asymétrique par rapport au genou controlatéral où l’arrêt est franc. Ce signe n'est toutefois pas facile à mettre en évidence si les cuisses du blessé sont proéminentes comme le sont les cuisses des lanceurs et si le blessé n’est pas relâché au niveau de ses ischio-jambiers. 

Les faux négatifs sont rares: anse de seau luxée et bloquée dans l’échancrure inter-condylienne, languette méniscale ou moignon de LCA également bloqués. 

- Le ressaut rotatoire en rotation interne 

Les tests de ressaut (Jerk test, Lemaire, Pivot shift, etc.) sont très délicats à mettre en évidence dans une lésion fraîche et nécessitent un relâchement complet du blessé, difficile dans un contexte post-traumatique immédiat. Leur sensibilité est faible, le ressaut est retrouvée 1 fois sur 10 et au mieux 1 fois sur 3, mais leur spécificité est proche de 100% ce qui en fait des tests d’une grande valeur diagnostique.

Le traitement d’une rupture du LCA

Compte tenu de l'histoire naturelle du LCA rompu il est licite d'en opérer un certain nombre et tout particulièrement dans le haut niveau.

Actuellement la préférence est donnée aux nouvelles techniques chirurgicales mini-invasives sous arthroscopie à partir des tendons ischio-jambiers (demi tendineux et droit interne dédoublés) ou du tendon rotulien. Le matériel (vis) de fixation bio-résorbable, n’entraînant pas de dommage osseux, a permis de réduire considérablement la morbidité post-opératoire et d'optimiser la réhabilitation fonctionnelle du genou sans toutefois pour l'instant préjuger du devenir à long terme.

Le gonflement rapide du genou lésé en quelques heures va le rendre rapidement  inexaminable. 

2- Le ligament croisé postérieur (LCP)

Il est plus long, plus épais et nettement plus solide que le LCA. Son grand axe est vertical et il est accompagné dans son trajet dans l’échancrure inter-condylienne par le ligament ménisco-fémoral. Il est constitué de 2 faisceaux antérieur et postérieur. En flexion à 90° il contrôle essentiellement la translation postérieure (un tiroir postérieur est pathognomonique). 

Il contrôle aussi la rotation externe, le varus et le recurvatum (petit recurvatum unilatéral = lésions des coques; grand recurvatum = lésions des coques et du LCP. En cas d'atteinte associée du PAPE, les 4 signes se majorent). Il se lèse complètement dans sa moitié supérieure. Sa rupture est parfois basse avec avulsion osseuse. En cas de triade (lésion triple) et surtout de pentade externe (quintuple lésion) il faut impérativement tester le nerf sciatique poplité externe, anatomiquement très proche et assez souvent lésé, et l’articulation tibio-péronière supérieure. La symptomatologie, en cas de lésion isolée, est plus dominée par la douleur que par l'instabilité (en fait le diagnostic en frais n'est pas très souvent posé). La tolérance à moyen terme d'une lésion du LCP est exceptionnelle. 

Après 15 ans d’évolution, le processus de dégradation du cartilage frappe les compartiments fémoro-tibial interne et fémoro-patellaire, à cause du recurvatum induit par la rupture du LCP. Le traitement chirurgical est à réserver au sujet jeune ou en cas de triade externe ou de pentade.

Les ligaments collatéraux 

Ils interviennent dans la stabilité frontale.

1- Le ligament collatéral interne (LCI ex LLI)

C’est une large bande aplatie formée de deux couches, l’une superficielle résistante et l’autre profonde accessoire, avec des fibres qui adhèrent fortement à la capsule et au ménisque interne. Le LCI est le frein principal du valgus genou fléchi. C'est le ligament le plus faible du genou, notamment à son insertion condylienne. Son atteinte traumatique sur mécanisme lésionnel en valgus forcé est très douloureuse et responsable d'un flexum antalgique. Cette lésion sur l'insertion condylienne cicatrise toujours et n'a pas besoin d'être réparée chirurgicalement. Les complications d'un traitement mal conduit aboutit au syndrome de Pellegreni-Stieda avec calcifications aux radiographies standards et, plus rarement, au syndrome de Palmer qui correspond à une cicatrisation du ligament en position raccourcie.

2- Le ligament collatéral externe (LCE ex LLE) 

C’est un cordon arrondi, épais, indépendant de la capsule, bien individualisable et parfaitement palpable. Il se dirige vers l’arrière sur la tête du péroné. Avec la bandelette de Maissiat, c'est le frein principal du varus, genou proche de l’extension. Il est détendu en flexion. Il se lèse sur un mécanisme lésionnel en varus forcé, rarement isolé, qui ne lèse que les formations périphériques externes sans abîmer les ligaments croisés. 

Le tableau clinique est souvent frustre. Un examen clinique soigneux aidé et complété par une imagerie appropriée (IRM) vont faire le diagnostic. En cas de rupture sa réparation doit être de principe chirurgicale car il n'a aucune tendance à cicatriser spontanément, surtout si genu-varum associé.

3- Le Genou tendineux

Tendon quadricipital, rotule et tendon rotulien sont constitutifs d'une seule et même unité biomécanique, l'appareil extenseur du genou qui permet son extension active et assure le maintien de la station debout. Cet appareil extenseur du genou est extrêmement sollicité dans la pratique sportive et tout spécialement dans les sports d'impulsion et les sauts en athlétisme, mais aussi chez les lanceurs par dysentraînement (excès de musculation avec charges lourdes), source de tendinopathies quadricipitales (squat) ou rotuliennes (banc à quadriceps).

- Les tendinopathies rotuliennes et quadricipitales de sur-utilisation

Le diagnostic de ces tendinopathies

Le début des troubles est habituellement progressif. Dans quelques cas il est brutal. L'interrogatoire retrouve les stades de Blazina:

- stade 1, douleur après l’effort

- stade 2, douleur en fin d’effort

- stade 3, douleur permanente pendant et après l’effort

- stade 4, rupture.

L’examen clinique bilatéral et comparatif met en évidence la triade symptomatique de toute tendinopathie :  

- douleur à la mise en tension contre résistance du tendon en souffrance dans les différentes courses interne et externe.

- douleur à l’étirement lors de  la manoeuvre talon-fesse, pour les 2 tendons.

- douleur à la palpation de la pointe de la rotule, ou au niveau de son insertion basse, ou en plein corps du tendon pour la tendinopathie rotulienne, et douleur à la palpation du tendon quadricipital pour la tendinopathie quadricipitale.

Les examens complémentaires 

Ils comprennent de manière systématique des radiographies. L’échographie, très performante, peut visualiser un nodule ou un épaississement. L’IRM est demandée à titre systématique dans le haut niveau. 

Le traitement médical des tendinopathies du genou 

La technique de Stanish sur un protocole excentrique est effectuée en chaîne fermée classique pendant 4 à 6 semaines, en fonction du stade de la tendinopathie. Elle peut aussi se faire sur un dynamomètre isocinétique et donne d'excellents résultats. Le traitement en chaîne fermée classique s'effectue en 2 phases, d'abord un travail statique qui consiste à augmenter la longueur et l’élasticité de l’unité muscle/tendon par des étirements, puis à compter de la 3ème semaine, des exercices en excentrique, en augmentant progressivement la charge, amélioreront la résistance du tendon. Toute séance de travail doit être précédée d’exercices d’échauffement, de massages et surtout d’étirements de l’appareil extenseur du genou. En fin d’exercice, ces mêmes étirements seront répétés et le glaçage du tendon douloureux sera systématique. 

- Les sports non traumatisants pour le tendon (notamment natation et vélo) sont à réintroduire dès la 2ème semaine à condition d’être pratiqués après une séance d’étirements et que le tendon soit glacé en fin d’activité.

- Des injections de PRP sont de plus en plus proposées par de nombreuses équipes médico-chirurgicales. 

- La thécarthérapie et les ondes de choc sont largement utilisées par les kinésithérapeutes, mais les preuves scientifiques de leur efficacité manquent .

Un traitement chirurgical de peignage du tendon est proposé dans les échecs du traitement médical.

- Les ruptures tendineuses quadricipitales et rotuliennes    

Elles sont rares d’emblée sauf si le mécanisme lésionnel est brutal comme peut l'être une contraction violente du quadriceps, genou en extension. 

Elles surviennent habituellement dans un contexte de tendinopathie chronique. Les infiltrations de corticoïdes semblent être un facteur favorisant ces ruptures tendineuses. Le diagnostic clinique est le plus souvent évident. La douleur est violente, l’impulsion stoppée et l’athlète chute. L’impotence fonctionnelle est totale. En frais, l’examen clinique retrouve une dépression sous-rotulienne qui signe la rupture du tendon rotulien et une dépression sus-rotulienne quand le tendon quadricipital est rompu. 

Les radiographies vont confirmer la clinique et l’absence de lésion osseuse. 

Le traitement relève de la chirurgie orthopédique. 

Les tendinopathies de l’appareil extenseur du genou par choc direct

Ce type de tendinopathie par choc direct sur les tendons de l'appareil extenseur du genou se rencontre volontiers dans les sports de contact et de combat, mais aussi en athlétisme par contusion d’un des 2 tendons. 

Ici, la lésion tendineuse n'est jamais isolée et en fonction de la violence du choc elle est souvent associée à une bursite d’une des 2 bourses séreuses superficielle ou profonde et à d'autres souffrances de l'appareil extenseur du genou: contusion osseuse de la tubérosité tibiale antérieure (TTA) ou chondromalacie rotulienne par souffrance cartilagineuse avec épanchement intra-articulaire (indispensables: radiographies et échographie).

Suivant l’intensité de la force vulnérante, les lésions tendineuses et péri-tendineuses seront de sévérité croissante: 

- soit rupture de quelques fibres au niveau du corps ou de l’insertion du tendon et processus de cicatrisation qui commencera à partir des premiers jours et récupération variable de quelques semaines à 2 mois et plus. 

- soit, si traumatisme plus conséquent, réparation du tendon plus longue, apparition d'un cal tendineux et régénération complète à la fin du 3ème mois quand tout va bien. 

En cas de forte contusion le tendon peut rester fragile et la récupération totale demander une bonne année. Un déficit peut même s’installer surtout s'il persiste au sein du tendon un foyer de nécrose, un nodule fibro-cicatriciel, une cavité kystique ou des calcifications (signes d’une cicatrisation de mauvaise qualité qui relèvera alors de la chirurgie). 

Sur le plan thérapeutique, ces contusions tendineuses (qui ne sont en rien des tendinopathies de sur-utilisation) doivent être glacées les 3 premiers jours, mises sous AINS pendant une semaine et rééduquées après la 1ère semaine (le tendon rotulien doit être progressivement sollicité selon le protocole en excentrique de Stanish, d'abord en statique, puis en dynamique). 

Il est recommandé d'associer à cette rééducation, en se guidant sur les douleurs, de la natation et du vélo à condition exclusivement de mouliner. Ondes de choc et surtout PRP peuvent accélérer le processus de régénération.

4-L’arthrose du genou ou gonarthrose du «vieux» lanceur

Activités physiques à haute exigence ostéo-articulaire, les lancers en athlétisme sont de grands pourvoyeurs d’arthrose du genou ou gonarthrose qui correspond à 1 dégradation majeure du cartilage et de l’os sous-chondral, de ses surfaces articulaires. 

Dans la population générale cette arthrose du genou est 1 affection fréquente (3 fois supérieure à l'arthrose de hanche) et invalidante qui devrait pouvoir bénéficier d'une prise en charge par une équipe médicale expérimentée (médecin MPR et kinésithérapeutes), dès l’apparition des 1ers signes cliniques au stade de chondropathie, associant des mesures orthopédiques à des thérapeutiques innovantes, avant de relever de la chirurgie prothétique dont l’échéance pourrait être retardée et même évitée dans certains cas. 

Après 70 ans, la fréquence d'une gonarthrose radiologique avec pincement des interlignes fémoro-tibiaux et/ou fémoro-rotulien est de 40 %, toutes n’étant pas symptomatiques. A un degré lésionnel moindre, celle des chondropathies du genou sont de  70 % à 70 ans. 

Classification anatomique

Suivant leur localisation sur les différents compartiments du genou, on distinguera 2 types de gonarthrose, la gonarthrose fémoro-tibiale et la gonarthrose fémoro-patellaire. Suivant la sévérité de l’atteinte dégénérative, on distinguera une gonarthrose globale (la totalité du cartilage des 2 compartiments de la fémoro-tibiale et ou de la fémoro-patellaire sont atteints) et 1 gonarthrose interne ou externe (gonarthrose uni-compartimentale). Les 2 localisations peuvent être associées (gonarthrose tri-compartimentale). 

L’arthrose fémoro-tibiale

La gonarthrose fémoro-tibiale est plus fréquente chez les lanceuses que chez les lanceurs, pendant, en fin ou après leurs carrières, en cas de surcharge pondérale, surtout si se surajoute 1 insuffisance veineuse chronique (varices).

Physiopathologie

La dégradation intra-articulaire dans une gonarthrose est en rapport avec des phénomènes mécaniques et biologiques qui vont modifier l’équilibre entre la synthèse et la dégradation du cartilage et de l’os sous-chondral: 

- la membrane synoviale, qui tapisse la face interne des articulations du genou et élabore le liquide articulaire (liquide synovial) qui permet la lubrification et la nutrition du cartilage, intervient aussi en produisant des médiateurs chimiques qui vont altérer directement sa matrice. 

- l’os sous-chondral participe également à ce phénomène de dégradation articulaire par la sécrétion d’enzymes protéolytiques. Par ailleurs le cartilage ne possèdant pas de nocicepteurs (récepteurs de la douleur), l’origine des douleurs dans une gonarthrose provient essentiellement de l’os sous-chondral qui possède lui, ce type de récepteur. 

Epidémiologie

La prévalence de la gonarthrose varie selon la définition retenue (clinique ou radiologique) et selon les populations étudiées et leur âge (l’incidence augmente avec l’âge avec un maximum entre 70 et 79 ans). 

Dans une gonarthrose qui affecte 1, 2, ou les 3 compartiments du genou, l’atteinte est fémoro-patellaire à 88%, fémoro-tibiale interne à 67%,  fémoro-tibiale externe à 16% et bilatérale dans 2/3 des cas. 

Facteurs de risques 

Le développement d’une gonarthrose peut être favorisé par des facteurs biomécaniques locaux et systémiques.

Les facteurs biomécaniques locaux

Ils sont de grands pourvoyeurs de gonarthroses secondaires et comprennent:

les traumatismes articulaires et en particulier les fractures articulaires (rotule, plateaux tibiaux ou condyles), les entorses graves par lésions des ligaments croisés (surtout les séquelles de rupture ancienne du ligament croisé antérieur), les lésions traumatiques longitudinales et en anse de seau des ménisques.

- l’entraînement répétitif avec des charges lourdes dans les sports de force/vitesse comme les lancers est en général très délétère pour les cartilages; pourtant, à propos du squat complet qui est l’exemple type d’un entraînement répétitif avec charges lourdes, certaines études récentes démontrent le contraire, ce mouvement de flexion du genou en charge  pourrait même avoir un effet protecteur sur les éléments amortisseurs et de de stabilité du genou (cartilages, ligaments, tendons péri-articulaires).

- la surcharge pondérale, principalement après l’arrêt des compétitions de lancer est l’un des facteurs les plus importants de l’apparition et de la progression radiologique de la gonarthrose. Elle agit en augmentant les pressions sur le genou mais également par l’intermédiaire d’anomalies métaboliques, plusieurs substances synthétisées par les adipocytes (cellules du tissu graisseux) telles que la leptine et l’adiponectine sont incriminées dans la genèse des lésions cartilagineuses.

- les vices architecturaux (genu varum = jambes en O ou genu valgum = jambes en X) peuvent aussi favoriser l’apparition d’une gonarthrose par augmentation des pressions au niveau d’un compartiment par rapport à l’autre (le genu varum favorisant la gonarthrose interne et le genu valgum la gonarthrose externe par ailleurs d’apparition très tardive par rapport à la précédente).

Les facteurs systémiques 

Nous l’avons déjà évoqué, la prévalence et l’incidence de la gonarthrose augmentent avec l’âge et sont plus élevées chez les femmes après 50 ans; plusieurs travaux ont démontré l’influence de facteurs génétiques dans la survenue de la gonarthrose. Inversement, l’hormonothérapie substitutive (oestrogénothérapie) en post-ménopause interviendrait en réduisant le risque de gonarthrose. Quant au rôle du tabac, il reste encore flou.

Clinique 

Les douleurs de la gonarthrose se manifestent préférentiellement lors de la mise en charge, la marche prolongée ou sur terrain accidenté ou montagneux. 

Leur horaire est de type mécanique (diurne), accentué par l’effort et calmé par le repos. Il peut parfois être nocturne, d’allure pseudo-inflammatoire, en cas de poussée congestive d’arthrose. 

Les douleurs peuvent également être diffuses ou localisées, mais il n'y a pas nécessairement concordance entre la localisation du ressenti douloureux qui peut être, soit du côté interne, soit du côté externe du genou, et leur origine sur 1 des 2 compartiments fémoro-tibiaux (piège clinique que l’imagerie corrigera). 

Les signes d'examen 

L'exploration clinique du genou est facilitée par son positionnement anatomique  superficiel et la facilité à palper ses différentes structures : 

- douleurs à la palpation de l’interligne antéro-médial ou antéro-latéral ou sur les 2, genou fléchi.

- limitation articulaire de la flexion à la distance talon-fesse et en extension à la distance talon-table d’examen, avec possible déficit d'extension passive et active (= flexum). 

- épanchement articulaire (hydarthrose) entraînant une augmentation de volume du genou avec présence d'un choc rotulien à l’examen physique et, en cas d’épanchement, pas de signes inflammatoires (pas d'augmentation de la chaleur locale et le liquide synovial quand il est ponctionné est de type mécanique, pauvre en cellules et en globules blancs avec moins de 2000 cellules/mm3 et 50 % de polynucléaires). 

- désaxation possible en genu varum associée à une arthrose fémoro-tibiale interne ou en genu valgum associée à une gonarthrose fémoro-tibiale externe.

Cas particulier de la poussée congestive d'arthrose 

L’histoire d’une arthrose du genou est jalonnée de poussées congestives qui correspondent à une irritation de la membrane synoviale, en réaction à la libération de fragments cartilagineux. Cette congestion synoviale va activer le processus arthrogène, avec risque accru d’accentuation de la dégradation cartilagineuse, si l’inflammation synoviale n’est pas vite maîtrisée par une thérapeutique symptomatique par anti-inflammatoires (AINS) ou par infiltrations intra-articulaires de corticoïdes ou d’acide hyaluronique (s’il n’y a pas ou très peu d’épanchement), voire par une synoviorthèse (Hexatrione) en cas d’épanchements chroniques récurrents.

Cliniquement 

Une poussée congestive d’arthrose va se caractériser par une modification des douleurs qui, d’intermittentes, vont devenir plus ou moins permanentes, et par la présence d'un épanchement intra-articulaire avec possibilité de signes inflammatoires discrets (légère augmentation de la chaleur locale, l'épanchement restant toutefois de type mécanique à l'analyse cytologique). Ces poussées congestives sont mal calmées par le repos et répondent au glaçage de l’articulation et au traitement symptomatique vu précédemment.

Le diagnostic radiologique d'une gonarthrose

Les radiographies vont mettre en évidence les signes habituels d’arthrose qui vont affecter soit l'ensemble des 2 articulations fémoro-tibiales, soit uniquement les compartiments fémoro-tibiaux interne ou externe, avec pincement de l’interligne, condensation et géodes sous-chondrales, ostéophytose marginale des bords des condyles  et des épines tibiales sur le cliché debout «en schuss» à 30° de flexion».

Clichés radiographiques à demander  

Pour diagnostiquer précocément une arthrose débutante sous forme d'un pincement discret de l'interligne articulaire, il faut demander:

- 1 cliché comparatif de face des 2 genoux en position debout en charge, qui peut aussi révéler une petite désaxation en genu-varum ou valgum.

- 1 cliché en schuss à 30° de flexion qui explore plus particulièrement la zone portante des condyles, la plus exposée. 

Le cliché de profil est moins utile. 

Dans certains cas, une téléradiographie prenant l'ensemble des membres inférieurs en charge permet de bien étudier l'axe mécanique des membres inférieurs (cet axe mécanique =  tracé du centre de la tête du fémur au milieu de la cheville doit passer entre les 2 épines tibiales). 

L’évolution d’une gonarthrose

L'évolution va se faire quasi inéluctablement vers une aggravation lente du processus arthrogène, entrecoupée de périodes de poussées douloureuses. La perte moyenne de hauteur de l'interligne articulaire est de 0,2 mm par an, mais avec de très grandes variations individuelles. 

Les formes cliniques d’une gonarthrose

La gonarthrose peut être primitive (sans cause particulière) ou secondaire. 

Les gonarthroses secondaires sont la conséquence de traumatismes ou de micro-traumatismes et de désaxations axiales en genu varum ou en genu valgum: 

- en cas de genu varum, l'axe mécanique des membres inférieurs en téléradiographie passe en-dedans du genou, entraîne une hyperpression du compartiment fémoro-tibial interne et une arthrose fémoro-tibiale interne. 

- en cas de genu valgum, l'axe mécanique du membre inférieur passe en-dehors du genou, entraîne une hyperpression du compartiment fémoro-tibial externe et une arthrose fémoro-tibiale externe. 

Le genu varum ou/et le genu valgum constitutionnels entraînent une arthrose secondaire (mais il est quelquefois difficile de dire si la déviation axiale est primitive ou secondaire à l’arthrose). 

Traitement de la gonarthrose fémoro-tibiale

L’éducation du gonarthrosique est fondamentale

Education sur sa maladie, les facteurs de risque, les profils évolutifs, les différents traitements, l’apprentissage de l'économie articulaire, la pratique d’exercices réguliers pour entretenir les amplitudes articulaires et l'endurance musculaire (contractions isométriques des quadriceps et des fessiers par exemple), l’auto-rééducation à domicile par l’utilisation de chaussures amortissantes et à semelles souples et la marche avec pas simulés (marche qui protège l’appui en n’appuyant pas trop du côté arthrosique et davantage appui avec les bras sur les cannes anglaises). La réduction d'une surcharge pondérale est fondamentale. 

Les traitements pharmacologiques

le paracétamol en début d’évolution est l'antalgique de 1ère intention; à poursuivre au long cours si son efficacité est suffisante. La dose est de 2 à 3 g/jour à prendre régulièrement.

les applications locales d’AINS et de capsaïcine en complément du paracétamol sont de bons adjuvants, efficaces et sans danger. Ils permettent d'éviter les effets indésirables systémiques gastriques et rénaux des AINS, 1 patient sur 2 obtenant un soulagement > 50% par rapport au placebo, ce qui n’est pas négligeable.

 - les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) par voie générale en cas de non réponse au paracétamol et aux applications locales

- les antalgiques opiacés (codéïne + paracétamol) sont utiles comme alternative chez les patients chez qui les AINS sont contre-indiqués, inefficaces, ou mal tolérés. Leurs effets secondaires sont fréquents (constipation, sécheresse bouche, etc) surtout chez les sujets âgés.

les anti-arthrosiques symptomatiques d'action lente (sulfate de glucosamine, chondroïtine sulfate, diacérhéine) ont un effet symptomatique réel et sans doute structural. Leur activité anti-inflammatoire est prouvée mais inférieure aux AINS, leur effet retard est de 4 semaines, l’effet rémanent à l'arrêt du produit est de 2 à 3 mois et ils sont bien tolérés notamment sur le plan digestif. 

linfiltration de corticoïdes locaux est indiquée en cas de poussées congestives douloureuses avec peu ou pas d’épanchement intra-articulaire. 

la viscosupplémentation par injections intra-articulaires d'acide hyaluronique (AH) semble avoir actuellement une place reconnue dans le traitement de la gonarthrose. Elle est indiquée en cas d'échec du traitement médical classique et en l'absence de poussée congestive (douleurs nocturnes, épanchement). Son efficacité sera d'autant plus probable que l'arthrose est modérée,  sans ou avec très peu d’épanchement intra-articulaire. 

les PRP (concentré de plaquettes sanguines) sont de plus en plus utilisés, mais comme pour tout dérivé sanguin, avec beaucoup de précautions. 

la synoviorthèse par injection d'hexacétonide de triamcinolone (Hexatrione = corticoïde fluoré puissant) ou d’1 radio-isotope (l’Ytrium 90) donne de bons résultats dans les épanchements chroniques du genou. 

Le traitement chirurgical 

le lavage articulaire est un traitement d'appoint précieux dans la gonarthrose. Il consiste à irriguer l'articulation avec du sérum physiologique, ce qui permet d'évacuer toutes les micro-substances qui contribuent à entretenir l'inflammation synoviale, sources de douleurs chroniques. 

la chirurgie du cartilage est une technique que proposent certaines équipes chirurgicales.

le traitement par implant de cellules souches dans la gonarthrose localisée semble promis à un bel avenir.

 - une ostéotomie de réaxation est indiquée en cas de genu varum ou valgum. 

la prothèse uni- et surtout bi-compartimentale en cas de douleurs rebelles associées à un handicap et à une destruction radiologique (rare chez les sujets de moins de 60 ans, sauf en cas de maladie inflammatoire associée comme une polyarthrite rhumatoïde ou une arthrose post-traumatique).  

5- Le syndrome rotulien (patellaire) 

Caractéristiques cliniques de la série rotulienne

Les signes fonctionnels 

- douleurs à la descente d’escaliers 

- douleurs à l'accroupissement 

- douleurs au maintien de la station assise prolongée = signe du cinéma 

- parfois accrochage ou pseudo-blocage rotulien.

Les signes d'examen 

- le palpé rotulien des 2 facettes articulaires de la rotule (facette latérale et médiale) en poussant transversalement la rotule est sensible 

- le signe du rabot = sensation d'accrochage et de frottement douloureux à la mobilisation verticale et transversale de la rotule dans la trochlée. 

Le bilan d’imagerie

Les radiographies dans un syndrome rotulien visent à explorer la course de la rotule dans la gorge trochléenne, pendant la flexion du genou: 

L’incidence radiographique la plus intéressante est l’incidence axiale du défilé rotulien réalisée à 30° de flexion.

 L’articulation fémoro-patellaire est également bien analysée sur les clichés de profil. 

Pour explorer les 1ers degrés de flexion, le scanner est plus intéressant. 

Cette imagerie vise à mettre en évidence des signes d'atteinte du cartilage fémoro-patellaire sous forme d'un pincement débutant de l'interligne (pincement global, médial ou plus habituellement latéral). 

Le bilan d’imagerie cherchera également à vérifier la bonne position de la rotule et l'absence de dysplasie fémoro-patellaire (rotule trop plate, gorge trochléenne pas assez profonde, berge externe de la trochlée dépassant la berge interne de  5 mm). 

La chondropathie rotulienne 

Elle est en général post-traumatique par choc direct sur la rotule et affecte souvent les sujets de moins de 40 ans. 

Les lésions sont plus ou moins sévères et vont du stade 1 de chondromalacie (sorte de ramollissement de l’épais cartilage rotulien) au stade 3 avec fissures profondesd’évolution variable, soit favorable avec stabilisation puis régression des douleurs, soit défavorable avec apparition progressive d'une arthrose fémoro-patellaire. 

Le diagnostic de chondropathie 

Il est avant tout clinique avec présence de signes de la série rotulienne. 

A noter que la tendance naturelle de la rotule est de tendre vers une déviation externe due au positionnement anatomique latéral de la tubérosité tibiale antérieure, de sorte que le quadriceps, le tendon rotulien et son insertion sur la tubérosité tibiale antérieure forment un angle ouvert vers l'extérieur (angle Q) qui ne doit pas être > 15°.

L’arthrose fémoro-patellaire

L’arthrose fémoro-patellaire se rencontre plus particulièrement chez la lanceuse de 40 ans et plus ou dans les suites d'une chondropathie post-traumatique ou d'une instabilité rotulienne. 

Elle affecte le plus souvent la facette articulaire externe et peut être isolée ou associée à 1 arthrose fémoro-tibiale. 

Du point de vue clinique 

L’examinateur va retrouver, comme dans une chondropathie rotulienne, les différents signes cliniques de la série rotulienne (douleurs à la descente d’escaliers plus qu’à la montée, à l’accroupissement, à la station assise prolongée, accrochages ou pseudo-blocages, signes du rabot, etc).

Les radiographies 

Elles vont visualiser les signes habituels d'arthrose (pincement articulaire, condensation sous-chondrale, géodes, ostéophytes). 

Le traitement 

Le traitement médicamenteux de l'arthrose est similaire à celui de la gonarthrose fémoro-tibiale. La kinésithérapie avec renforcement isométrique du vaste interne pour rééquilibrer la rotule est indispensable. 

L’indication chirurgicale doit être toujours proposée de manière prudente. 

Gonarthrose et sports

Les facteurs de risques généraux non modifiables des gonarthroses

- l’âge, le sexe féminin, le profil génétique.

 - les antécédents de traumatismes et de maladies inflammatoires du genou.

Les facteurs de risque modifiables

- la surcharge pondérale au delà d’un indice de  masse corporelle (IMC) > 27

- l’insuffisance d’activités physiques,  la faible capacité aérobie.

- la faiblesse du quadriceps (gardien de la rotule par le vaste interne)

- le stress biomécanique  dans les excès d’un travail de force.

Les activités sportives modérément contraignantes pour les genoux: la voile, le ski de fond, l’équitation.

Les activités sportives contraignantes sur le plan articulaire: l’athlétisme, le basket, le volley, le football, le rugby, le karaté, le tennis en simple.

Les activités sportives recommandées après prothèse: le golf, la natation, la marche, le vélo. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire